Pour enrayer la hausse du chômage, les Pays-Bas, pourtant dirigés par un gouvernement libéral, viennent de renoncer à un plan d’austérité drastique. Qu’est-ce qu’on attend pour les imiter ?
Les graves difficultés économiques, sociales et politiques créées par les politiques d’austérité excessives menées partout en même temps en Europe ne touchent pas uniquement les pays périphériques en crise depuis 2010. Elles atteignent aussi des pays souvent considérés comme des « modèles » de rigueur comme les Pays-Bas (voir à ce sujet notre dossier « Le tour d’Europe de la crise sociale »).
Les Pays-Bas sont en effet en récession pour la seconde année consécutive. Le chômage qui jusque-là tournait autour de 6 % a bondi à 8,1 % en l’espace de quelques mois. Les faillites ont augmenté de 48 % au premier trimestre par rapport à la même période de 2012. Et du côté des finances publiques, le pays affichait un déficit de 4,1 % du PIB l’an dernier et selon les prévisions de la Commission européenne, n’avait, comme la France, guère de chance de ramener ce déficit sous la barre des 3 % non seulement cette année mais aussi en 2014.Depuis fin 2012 le pays est dirigé par une coalition formée par les libéraux du Premier ministre Mark Rutte et les travaillistes. Ceux-ci ont fourni notamment le ministre des Finances Jeroen Dijsselbloem qui dirige désormais l’Eurogroupe. Pour ramener les choses dans l’ordre voulu par la Commission européenne et les nouvelles règles adoptées depuis la crise (Six packs, Two packs, TSCG), ce gouvernement avait prévu un nouveau train de mesures d’austérité : gel des salaires dans la fonction publique, mise en place de quota de handicapés pour limiter l’usage de ce statut comme retraite anticipée, diminution de l’aide fiscale apportée à l’épargne retraite… De quoi économiser 5 milliards d’euros de dépenses publiques, 0,8 % du PIB néerlandais, soit l’équivalent de 16 milliards d’euros pour nous (un peu moins que les 20 milliards d’euros que le gouvernement français veut économiser l’an prochain)
Mais, après négociation avec les syndicats et le patronat, le gouvernement néerlandais a renoncé finalement le 12 avril dernier à mettre en œuvre ce plan devant la gravité de la situation économique et sociale et sa dégradation rapide. Et par là même il a renoncé à s’engager vis-à-vis de Bruxelles à ramener les déficits publics sous la barre des 3 % en 2014. Si, dans un pays aussi réputé pour la rigueur de sa gestion que les Pays-Bas, un gouvernement dirigé par un libéral, dont le ministre des Finances dirige l’Eurogroupe, en arrive à de telles conclusions, on se demande ce qu’attend encore le gouvernement français pour lui emboîter le pas…
Guillaume Duval Source: Alternatives Economiques