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De "Elle s'appelait Sarah" à "La Mémoire des Murs"

Publié le 17 avril 2008 par Tatiana Yansor

Préface de "la Mémoire des Murs" (7 mai 2008, EHO)
"J’ai toujours été attirée par les maisons, les appartements, leurs secrets, leurs mystères. Comment, lorsqu’on entre dans un endroit, on peut s’y sentir merveilleusement bien, ou au contraire, très mal. Je ne parle pas de fantômes, d’apparitions, simplement de la sensation puissante qu’une demeure peut exercer sur vous, malgré vous. Il y a une dizaine d’années, j’avais emménagé avec ma famille rue D., une jolie rue du quartier de Montparnasse. Je connaissais mal cet arrondissement et je me souviens de l’avoir découvert avec plaisir. Puis un jour, j’ai su, par une voisine prolixe, qu’un tueur en série notoire avait assassiné sa première victime en 1991 dans un immeuble qui jouxtait pratiquement le mien. Elle m’avait même montré la fenêtre au dernier étage, celle où s’était déroulé le crime. Une jeune femme de dix-neuf ans, un meurtre laissé longtemps irrésolu. Je me souviens que cette nouvelle m’avait glacée, même si ce terrible fait divers avait déjà dix ans.
Un soir d’hiver, alors que je rentrais tard, seule, et que je me hâtais le long de la rue subitement déserte, j’ai levé les yeux vers la fameuse fenêtre. Elle brillait dans la nuit froide, et j’ai compris avec une sorte de stupéfaction horrifiée, que quelqu’un vivait là, dormait là, dans ces murs marqués par le crime. Comment était-ce possible ? Ces locataires savaient-ils que leur studio avait abrité un crime atroce ? Leur avait-on dit au moment de signer le bail ? Ressentaient-ils quelque chose entre ces murs teintés de sang ? C’est alors que j’ai commencé à écrire ce court et noir roman, que j’ai imaginé la vie d’une femme ordinaire, Pascaline Malon, qui en emménageant dans un appartement estampillé par un drame, allait faire remonter malgré elle une blessure secrète…
C’est en écrivant la Mémoire des Murs, que j’ai entamé un voyage étrange et marquant à travers la capitale. Un voyage mâtiné de violence, de douleur. Oui, Paris n’avait cessé de connaître des événements barbares, des conflits cruels plus ou moins connus, plus ou moins oubliés avec le temps, les années. La deuxième guerre mondiale en particulier avait laissé des stigmates encore présents, et je me souviens de m’être penchée sur ces photographies pas si lointaines d’une capitale soumise, hachurée de croix gammées et de lettres gothiques.
Dans mes recherches, une adresse revenait sans cesse, la rue Nélaton. Le Vel d’Hiv. Oui, bien sûr, j’avais entendu parler de la rafle du Vel d’Hiv, mais je ne l’avais pas apprise au collège, dans les années 70. Je ne savais pas grand-chose de l’organisation de cette rafle, du rôle exact de la police française, du nombre d’enfants raflés, de leur sort.
Tout en écrivant la Mémoire des Murs, je me suis rendue rue Nélaton, dans le 15° arrondissement, pas loin de chez moi. J’ai été frappée par la tristesse de cette rue, par cette petite plaque qu’on cherche longtemps, et qui se trouve boulevard de Grenelle, sur un édifice moderne qui a remplacé le Vel d’Hiv en 1959 et qui abrite à présent une annexe du Ministère de l’Intérieur, ironie suprême. J’ai été tellement marquée par cette vision que je l’ai intégrée dans ce présent roman. Et c’est à partir de ce jour là que j’ai commencé mon enquête. Savoir comment s’était déroulée cette rafle. Tout savoir sur le 16 juillet 1942.
Ce que je ne savais pas encore, c’était que Pascaline Malon et ses souffrances enfouies allait ouvrir la porte à Sarah Starzcynski et Julia Jarmond, mes héroïnes de Elle s’appelait Sarah, dont j’ai commencé la redaction en juillet 2002, immédiatement après avoir terminé la Memoire de Murs. "
TR

Parution simultanée le 7 mai 2008 de la Mémoire des Murs (EHO) et Elle s'appelait Sarah (Livre de Poche)


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