Le cannabis, le tabac, la drogue, l'alcool, la jalousie, l'envie, la guerre.
Bukowski, le pape de la décadence, en a même fait un titre.
Séquestré dans une auberge en région en raison d'un tournoi de hockey de fiston en janvier, la réalité de mon époque m'avait frappé. Il y avait là 15 garçons de 13-14 ans. 12 bidules technologiques et tout ce monde qui, au lieu de se dégourdir comme nous l'aurions fait à leur âge en jouant au mini-hockey dans les corridors (parfait pour le faire à cette auberge), étaient en communion avec leur ère et jouaient en réseau sur des Ipod, des Ipads, des ordis portables, à Minecraft ou à d'autres jeux qui les amusaient.
Minecraft est un jeu de construction architecturale qui peut vous faire construire des villes entières, un jeu qui fait appel à une certaine créativité. Un des joueurs de cette jeune équipe de hockey est un véritable artiste. Très talentueux de surcroît. Il n'a que 13 ans et déjà il a vendu une peinture pour plus de 1000 dollars. Ce n'est pas lui qui en a eu l'initiative, pas même ses parents, c'est un homme riche qui a eu vent de son talent, qui a craqué pour une de ses oeuvres et qui a proposé le prix. J'ai vu un mur chez ce garçon signé de sa main et il est effectivement fort impressionnant pour son âge. Mais le petit gars n'est certes pas le genre à s'en vanter. Et physiquement, il est aussi plutôt beau. Le sublimé est toujours invisible à soi-même. Son tempéremment d'artiste au milieu de jeunes sportifs a fait naturellement incliner quelques-uns de ses coéquipiers vers du "taxage docile". Le faire trébucher lors d'un exercice dans une pratique, feindre de se battre avec sans raison, et ce week-end là, détruire un à un tout ce qu'il créait (qui était aussi beaucoup plus beau que tout ce que les autres faisaient) au fur et à mesure qu'il érigeait ses oeuvres. Il prend tout ça avec un grain de sel car c'est un bon garçon. Un sublimé, nettement au dessus de tout ça. Mais détruire le beau semblait naturel chez ces ados.
Sans prétendre que je sois beau, (nous sommes toujours les pires juges à ce niveau) je sais que ma tête m'a souvent ouvert bien des portes. Des portes souvent que je ne méritais pas. Ce qui a nécessairement inspiré beaucoup de jalousie autour de moi toute ma vie. Le sentiment d'imposteur est une seconde nature chez moi en raison de ces accès faciles. La jalousie est devenue un pêché que je sais flairer partout. J'ai une amie qui est rongée par l'envie et qui en mourra peut-être un jour. Je le répête souvent aux enfants, la jalousie est un mal terrible qui peut faire faire d'horribles choses à toute sorte de gens simplement pour détruire le beau qu'il ne sont pas capable de se créer pour eux-même.
J'écris ceci en regardant Cosmopolis, le film de David Cronenberg. Il a adapté l'inadaptable roman de Don DeLillo publié en 2003 et qui annonçait, sans le savoir, la bascule du capitalisme 5 ans avant l'heure. Le livre raconte la randonnée en limousine d'un multimilliardaire de 28 ans qui veut se faire couper les cheveux à Manhattan dans un trafic causé par la visite du président et l'enterrement d'une star du rap. L'histoire est plus accessoire que les idées idées de DeLillo sur l'Homme et le capitalisme qui y sont véhiculées. Un des personnages, joué par le toujours brillant Mathieu Almaric, est un entarteur qui se décrit comme un "peintre à la tarte" qui se plait à emmerder le riche et le puissant. Qui s'attaque à se ce qu'il n'arrive pas à se créer pour lui-même: le pouvoir.
Deux jours avant, une pizerria locale passait au feu dans notre secteur, brûlée par un compétiteur à coup de cocktail molotov.
Cocktail d'impuissance.
Ces hommes qui assassinent les belles femmes ou les violent, rarement de beaux gosses.
Le marathon de Boston attire 500 000 spectateurs chaque année, ce qui en fait l'événement sportif le plus suivi en Nouvelle-Angleterre. Débutant avec un nombre de 18 participants il y a 116 ans, la course attire désormais chaque année une moyenne d'environ 20 000 participants. Le record a été atteint lors de la 100ème édition avec 38 708 participants.
Les explosions qui ont causé l'horreur de lundi dernier n'ont pas encore de signature(s).
Sinon celles de l'envie et de l'impuissance.
Une impuissance qui, telle une maladie, a été transférée à quelques familles innocentes qui se trouvaient là où des êtres sombres avaient choisi de détruire le beau.