Le Marathon des Sables, c'était la troisième fois que je le vivais. Une première fois en tant que coureur en 2009 puis ces deux dernières années comme journaliste pour le service de presse de la course. L'occasion de voir les deux facettes de cette course pionnière des courses extrêmes, à une époque où le mot trail n'existait pas encore et où les organisateurs ne rivalisaient pas pour savoir qui avait la plus dure (je parle des courses).
Aujourd'hui, le Marathon des Sables, c'est plus de 1000 coureurs venus de près de 50 pays et une équipe d'organisation de plus de 400 personnes. Un vrai barnum qui se déplace de bivouac en bivouac pendant une semaine avec pour les coureurs six étapes comprises entre 30 et 75km à parcourir en auto-suffisance alimentaire. Ce barnum, ce n'est pas vraiment ma tasse de thé. Mais la richesse du Marathon des Sables repose dans la multitude des petites histoires qui au fil des éditions ont permis d'écrire la grande histoire de l'épreuve. Des petites histoires de coureurs et d'organisateurs qui font que le MDS a une âme. J'essaierai dans une prochaine news de partager quelques-unes de ces petites histoires et surtout de ces rencontres qui font du MDS un rendez-vous à part dans la vie d'un coureur d'ultra.
Pour le moment, voici la compile des news que j'ai eu le plaisir de régider tout au long de la semaine. Vous pouvez les retrouver sur le site de la course www.marathondessables.com avec également plein de jolies photos et de portraits de coureurs.
En attendant le passage aux contrôles techniques, il y a les habitués, les vieux routiers. Depuis plusieurs années, ils se retrouvent sur le MDS avec la sensation de s’être quittés il y a à peine quelques jours. Pour eux, la routine est bien installée. Mais par expérience, ils savent aussi que le MDS n’est pas une course comme les autres et que tout peut y arriver.
Et puis il y a les « bizuths ». « C’est la journée la plus difficile, confie Fulvio Villano. L’Italien de 70 ans a l’expérience de six MDS. « Tu passes ta journée à te demander ce que tu prends avec toi et ce que laisses dans ta valise. C’est le point de non retour. Après le contrôle technique, c’est terminé. La seule chose dont tu es sûr, c’est que ce stress d’avant course, tu le laisses dans cette valise. Et demain, c’est la liberté ! »
Cette première étape est pour les plus anciens l’occasion de retrouver leurs repères. Pour les novices, elle est une immersion dans l’aventure, dans l’esprit MDS où la difficulté du parcours est largement compensée par le plaisir de laisser sa trace dans ce décor unique. Un dernier col très caillouteux pour pénétrer dans l’oued Tijekht et la banderole d’arrivée, symbole de délivrance et de repos, est en vue.
Plus longue que d’ordinaire, cette première étape aura marqué les esprits. Les organismes aussi avec des températures déjà supérieures à 35°. Peu de répit pourtant sur le Marathon des Sables.
Si les premiers, avec comme la veille les victoires de Mohamad Ahansal et Laurence Klein, auront mis moins de trois heures pour boucler l’étape, derrière, certains auront besoin de plus de 8 heures pour rejoindre leur tente et goûter un indispensable repos.
Cette quatrième étape du Marathon des Sables est souvent le moment de vérité. Un voyage d’à peine sept heures pour les premiers, de plus de 30 heures pour les derniers (34h temps maximum autorisé). Voyage physique, voyage intérieur aussi où la réflexion sur soi, sur la vie, est souvent la plus fidèle compagne au fil des kilomètres.
Mercredi, à 8h30 (11h30 pour les 50 premiers hommes et les 5 premières femmes), sous un soleil déjà très généreux, 991 coureurs se sont élancés de Taourirt Mouchanne, direction le djebel El Mraïer. Ils ont d’abord franchi un petit col, traversé à nouveau l’oued Rhéris avant d’affronter pour la première fois depuis le départ, de grands cordons de dunes sur plusieurs kilomètres. Ces dunes qu’ils ont vues dans les magazines ou dans les reportages, ses dunes qui les ont fait rêver depuis des mois, des années. Les premiers arriveront en fin de journée mais beaucoup poursuivront leur route toute la nuit, guidés par leur lampe frontale et surtout éclairés par les étoiles. Suivre sa bonne étoile, une philosophie à appliquer à chacun de ses pas sur la caravane du Marathon des Sables. Ce soir, ou demain, quand ils franchiront la ligne d’arrivée, ils seront fiers, d’entrer à leur tour dans la grande histoire du MARATHON DES SABLES.
Au fil des heures, le bivouac a fini de se remplir au cœur de la nuit puis de la journée de jeudi. Les derniers n’arriveront qu’en fin d’après-midi, plus de 30 heures après s’être lancé dans cette grande étape. Des heures dont ils se souviendront tous toute leur vie. Des heures qui pour certains changeront même peut-être le fil de leur vie. Sous les tentes, des coureurs usés, soulagés mais avant tout heureux. Il ne leur reste plus « que » le marathon de vendredi, dernier tronçon chronométré, pour recevoir des mains de Patrick Bauer la médaille de finisher. Pour écrire l’histoire du MDS. Ou plutôt, pour écrire leur histoire.
Quelle que soit leur performance, à l’instant de franchir la ligne d’arrivée, beaucoup auront conscience d’avoir repoussé ce qu’ils pensaient être leur limite. Beaucoup se seront découverts des forces et des ressources insoupçonnées.
Pour aller chercher cette médaille dans cette étape marathon entre le djebel El Mraïer et Merdani, ils ont d’abord traversé l’oued Ziz, avant d’enchaîner sur un long plateau caillouteux. Après les oueds Moha Fighnas, près du village de Taouz, ils sont entrés dans un nouveau champ de dunettes, hors d’œuvre avant les grandes dunes de l’erg Znaïgui. A la sortie du djebel Debpuhaa, ils ont traversé l’ancien village de M’Fis aujourd’hui en ruine mais qui il y a encore une cinquantaine d’années grouillait d’ouvriers des mines de plomb voisines. Images étonnantes de ces coureurs en train d’écrire leur histoire personnelle dans un décor où l’on ressent l’histoire d’un pays. A l’horizon, ils ont enfin aperçu la si désirée banderole d’arrivée, plantée là, sur une sol de cailloux noirs, au pied des dunes de Merzouga, les plus hautes du Maroc. Sur la ligne, beaucoup de larmes, de cris de délivrance, des scènes de joie, des moments intenses d’émotion au moment de recevoir la médaille des mains de Patrick Bauer, le directeur de course, comme le veut la tradition.
Même si elle n’est pas chronométrée, la dernière étape, samedi, parrainée par l’UNICEF, reste obligatoire. L’occasion pour tous d’écrire à travers les dunes de Merzouga, le point final de leur aventure. L’occasion de méditer sur leur expérience, pour certains, de partager ces instants avec leur famille et leurs amis. Partage, maître mot du Marathon des Sables.