Mais Marie-Bernadette n'avait pas le corps ni le cœur pour affronter la houle, les raz-de-marée, elle n'était habituée qu'aux croisières organisées, aux déjeuners sur péniche, aux tranquilles traversées sans remous.
"- Vous vous souvenez, Henri-Paul, le tour du lac en barque, sur les traces de ce poète que vous aimez tant, comment s'appelait-il déjà ?
- ...
- Ce n'est pas grave... oh regardez, le lac est presque fini, il manque une p..
- Mais ferme-la..., marmonna-t-il
- Vous l'avez trouvée ?
- FERME-LA !
Ah ! tout le long du coeur
Un vieil ennui m'effleure...
M'est avis qu'il est l'heure
De renaître moqueur.
- Mais.. mais.. que.. que.. vous..
- Eh bien ? je t'ai blessée ?
Ai-je eu le sanglot faux,
Que tu prends cet air sot
De La Cruche cassée ?
- …. (Marie-Bernadette avait le souffle coupé par la douche froide)
- Tout divague d'amour ;
Tout, du cèdre à l'hysope,
Sirote sa syncope ;
J'ai fait un joli four.(*)
T'auras qu'à t'cuisiner une nouvelle vie !"
Henri-Paul est parti, son radeau sous le bras, laissant Marie-Bernadette médusée sur le plancher. Dans sa chute elle avait accroché la nappe et coulait maintenant à pic dans un lac en cinq mille morceaux.
La croisière, ça use..
(* : Locutions des Pierrots, VIII)