David Cameron, Bruxelles 8 décembre 2011
Source photo : The Gardian UK, Olivier Hoslet/EPA
La crise de l’Euro fait naître un euroscepticisme gagnant du terrain au sein du vieux continent. L’instabilité monétaire de la zone crée des clivages entre les pays scandinaves, qui s’en sortent très bien, face à une Europe du Sud en déclin économique. Bruxelles table sur une politique d’austérité et un marché de libre-échange, qui ne relancent pas la croissance au sein de l’Union devenue un terrain de jeu pour les spéculateurs financiers. Certains parlent d’une Europe gouvernée par l’Allemagne et les technocrates de Bruxelles influencés par les lobbys internationaux. Oui, la domination a changé de visage. L’invasion des territoires à coup de barbaries sanglantes n’est plus de mise en Europe occidentale, place à l’hégémonie financière sans espoir de solutions alternatives.
Croisée des chemins
Bien que les états membres aient jusqu’à présent réussi à maintenir la Grèce au sein de la zone monétaire, l’Union européenne n’est pas à l’abri d’une rechute. Entre récession de fait et obligation de croissance, l’Europe cherche à maintenir un équilibre économique encore incertain. Dans ce cas de figure, La France et la Grande-Bretagne sont aujourd’hui à la croisée des chemins. L’une cherche à retrouver un semblant de souveraineté en engageant des réformes pour réduire sa dette abyssale, et l’autre doit clarifier ses intentions avec l’Europe. En effet, David Cameron souhaite renégocier les traités qui lient la Grande-Bretagne à l’UE dans le but de se détacher un peu plus de la zone. Les esprits s’échauffent autour du premier ministre britannique, dont le discours est très attendu ce vendredi 18 janvier à Amsterdam aux Pays-Bas (1). Selon les sondages, 60 % des Anglais sont pour la sortie du Royaume-Uni de l’UE. Cependant, le parti conservateur de David Cameron reste divisé sur la question, se plaignant constamment des inconvénients d’être membre de l’UE sans vouloir la quitter.
En France, le ministre délégué du Budget, Jérôme Cahuzac a déclaré lors d’un débat télévisé avoir voté « contre le traité de Maastricht » rendant la Banque Centrale européenne (BCE) totalement indépendante des États membres. Cela dans une joute verbale où Jean-Luc Mélenchon, ex-candidat à l’élection présidentielle du front de gauche, propose qu’il faille payer la dette d’environ 1800 milliards d’euros « quand on pourra » et imposer à la BCE, qui a le droit de créer de la monnaie, à faire fonctionner la planche à billets. Un scénario techniquement impossible pour Jérôme Cahuzac, car l’institution bancaire européenne n’est pas soumise aux États membres, comme peut l’être la banque centrale américaine à l’État fédéral. La BCE ne se pliera jamais à une France en défaut de paiement, au risque de créer un effet d’aubaine. Contrairement à la Grande-Bretagne, pour la France la ligne est claire, il faut rembourser.
Euroscepticisme
Quoi de mieux que la Grande-Bretagne pour parler d’euroscepticisme ? Un divorce à l’amiable réclame l’UKIP « United Kingdom Independence Party » (Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni), nouvelle troisième force politique de l’Angleterre. Le parti réclame un référendum pour la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne. Piéter Hitchens, célèbre écrivain et journaliste anglais, critique l’emprise de l’Europe sur la souveraineté britannique : « l’Europe a réduit le parlement britannique au rang d’un petit parlement de province acceptant toutes les lois venues de Bruxelles (…) l’Europe est en train de devenir pacifiquement, sans brutalité, ni barbarie, un empire allemand ».
Selon Hitchens, les Allemands appliquent une théorie bismarckienne qui selon laquelle : l’Allemagne peut réussir à faire quelque chose de « spectaculairement égoïste », qu’en ne le faisant au nom de l’Europe, et c’est ce qui se passe aujourd’hui. Tant que l’on véhicule une image policé d’un pays sympathique, sans ambition particulière, ne cherchant pas à étendre son pouvoir économique, politique et diplomatique sur tout le continent, les autres pays n’y verront que du feu. L’interview de Pieter Hitchens se trouve dans un documentaire de la chaîne allemande ZDF diffusé sur Arte, faisant le tour d’horizon de personnalités anglaises antieuropéennes. Ce qui est intéressant dans ce reportage c’est la cohérence des arguments sur cette question, qui ne sont pas forcément du populisme. Toutefois, le paradoxe des Anglais envers la communauté européenne est un fait. Ce royaume qui n’a pas voulu de la monnaie unique, reste l’endroit où l’on spécule le plus en Euros via sa place boursière, La City.
L’intégralité de « l’Europe ? Non merci ! » de la ZDF, Ci-dessous :
(1) Mise à jour du 18/01/2013 : Selon l’AFP, le discours de David Cameron a été annulé à cause de la prise d’otages de ressortissants étrangers, notamment britanniques, par des terroristes religieux « islamistes » dans une centrale gazière en Algérie.