Résistance
« À l’heure actuelle, les troupes africaines déployées au Mali par la CEDEAO (communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest – NDLR) constituent une force totalement incapable », a déclaré Michael Sheehan, le conseiller du secrétaire à la défense pour les opérations spéciales et les conflits de basse intensité. Ces propos ont été tenus le 9 avril devant la sous-commission du Sénat pour les forces armées.
Quelque 4.300 soldats, en provenance de pays membres de la CEDAO (Nigéria, Togo, Niger, Sénégal, Bénin, Burkina Faso, etc.), sont aujourd’hui déployés au Mali. Même le Tchad, qui n’est pas membre de la communauté, a envoyé 2.000 hommes pour combattre aux côtés des troupes maliennes et françaises. En comptant les troupes françaises (4.000 hommes), ce sont donc près de 10.000 soldats qui appuient les troupes maliennes.
Michael Sheehan a tenu malgré tout à remercier la France pour l’opération menée de façon « absolument excellente ». « Les Français ont réagi très vite et ont repoussé Aqmi au-delà du fleuve Niger. Ils ont repris le contrôle des villes du Nord ». Le responsable du Pentagone reconnaît que « nombre de leaders d’Aqmi n’ont pas été capturés ou tués, mais la France a démantelé leurs sanctuaires ». Toutefois, les rebelles islamistes, qui se sont réfugiés dans l’Adrar des Ifoghas, sont en train de donner du fil à retordre aux soldats français.
Le responsable étasunien a également abordé la question des casques bleus. Pour le moment, une des deux options envisagées par Ban Ki-moon impliquerait une mission de stabilisation « en complément d’une force parallèle qui serait autorisée à utiliser tous les moyens nécessaires pour contrer les menaces susceptibles d’entraver son mandat ». Autrement dit, traquer les militants islamistes. Pour ce qui est du contingent onusien, pas moins de 11.500 casques bleus devraient être engagés dès le mois de juillet dans l’opération de maintien de la paix au Mali. Parmi eux, 150 seront français, À ce sujet, Washington a les idées claires. Selon Sheehan, les casques bleus devraient se cantonner à des missions de sécurisation : « ce type de forces devrait être en mesure de contrôler les villes et de permettre aux Français de concentrer son effectif réduit sur des objectifs ciblés ». « Il incombera à la France de faire la chasse aux rebelles, peut-être avec notre soutien », a ajouté le responsable étasunien.
L’Algérie, quant à elle, s’est toujours montrée réticente à intervenir directement au Mali, visiblement consciente que cela pourrait réveiller de vieux démons chez les militants islamistes. Elle a seulement autorisé le survol de son territoire aux avions français tout en refusant de faire intervenir ses troupes. Hollande, Clinton et beaucoup d’autres s’étaient rendu à Alger pour convaincre Abdelaziz Bouteflika d’intervenir. Mais le président algérien a toujours soutenu la voie du dialogue sur la question malienne, et chacun d’entre eux était rentré bredouille dans son pays d’origine.
Sur le scénario qui devrait se jouer prochainement au Mali, Michael Sheehan a estimé que « la Somalie est un bon exemple de ce qu’il faut faire : déployée une force de l’ONU chargée d’une mission raisonnable. Débusquer Aqmi des montagnes et attaquer leur leadership est un boulot pour une force bien plus capable. L’ONU ne peut pas faire cela et nous ne devons pas attendre d’elle qu’elle le fasse. Ce sera aux Français, peut-être avec notre soutien, de s’en occuper ».
La comparaison avec la Somalie est décidément très maladroite. Ce pays est en guerre depuis plus de vingt ans, et malgré le ton triomphal tenu par la communauté internationale, qui parle de la défaite d’al-Shabaab, les militants islamistes continuent de contrôler certaines parties du territoire tout en menant des attaques sporadiques contre le gouvernement fantoche imposé par les États-Unis.
Le discours de Michael Sheehan a été tenu le lendemain du retrait d’une centaine de soldats français, ce qui porte aujourd’hui à 3.900 le nombre de militaires français encore projetés au Mali. C’est donc un retrait bien symbolique. Paris exprime son intention de partir… mais reste militairement pour combattre. Dans le même temps, la presse locale malienne critique la décision de l’ONU justifiant la création d’une force parallèle dont la mission sera purement offensive. Soulignons que ladite force sera composée de mille hommes et que le projet de résolution autorisant son déploiement à partir de juillet prochain est actuellement en discussion à New-York. Mille hommes… C’est exactement le nombre de militaires que la France entend maintenir au Mali. En clair, l’ONU autorise la France à occuper le Mali pendant un certain temps.
Capitaine Martin
Source: Résistance