En France, on a tout compris : ce que le peuple veut, ce sont des déclarations de patrimoine des ministres et l’autorisation pour les homosexuels de se marier. Le reste, l’économie, le chômage, les impôts, les banques en faillite, tout ça, le peuple n’en veut pas. Il a la téléréalité et Nabila pour l’occuper, alors pas question de se prendre la tête sur ce que fabriquent la Chine ou les marchés boursiers. Conséquence logique mais dommage pour vous : ce billet ne parlera pas de la fortune de la ministre Delaunay.
Que voulez-vous, savoir que la brave ministre qui s’ennuyait est multimillionnaire est, finalement, sans intérêt. Qu’il y ait des contribuables qui, fort naïfs, découvrent ébahis qu’elle a tant gagné d’argent que ça alors qu’elle a toujours largement pioché dans leurs poches, c’est quelque chose qui ne surprend pas lorsqu’on la met en rapport avec l’état dans lequel est le pays.
Soyons clair : c’est la catastrophe. Je l’indiquais dans un précédent billet, la faillite est autant morale que financière, et les chocs soubresauts de moralisation ridicules qu’impulse mollement Hollande à coup de déclarations télévisuelles ternes n’y changeront absolument rien. D’ailleurs, le prochain fusible probable de ce gouvernement de clowns, Moscovici, a dû reconnaître du bout des lèvres que les impôts et prélèvements allaient encore augmenter un tantinet : eh oui, à cause de toute cette tempête d’ultra-libéralisme qui décime des familles et tue des petits chevaux, l’État va encore accroître sa pression fiscale. Il était temps : à 56.9% du PIB de dépense publique et à 46.5% de prélèvements, on a frôlé la surchauffe capitaliste libre-échangiste et l’étiolement de l’État. L’Austérité Qui N’Existe Pas va donc encore s’abattre sur le peuple pendant que l’élite s’occupera de produire des papiers amusants sur son patrimoine (un unique âne ici, quelques sous-bocks et un paquet de clopes là).
La France est très clairement partie en sucette. Les ministres ont abandonné toute prétention à la compétence et la ligne politique de Hollande et de son gouvernement, si tant est qu’il y en ait encore une, ressemble plus à une nouille aux flasques enroulés décroissants qu’à une quelconque direction ferme empruntée vaille que vaille et par conviction. Le pari est lancé sur le nombre de mois qui s’écouleront avant l’explosion finale, caractérisée par une série de mesures chypriotes (saisie sur les comptes, fermetures bancaires, blocage des capitaux, …).
Et pendant que les médias sont tous, gros micros mous tendus aux quatre vents, occupés par de palpitantes questions sociétales, les gouvernements qui ont un peu de bon sens continuent de placer leurs pions pour les prochains événements mondiaux. Au premier rang de ceux-ci, on retrouve bien évidemment la Chine dont j’avais déjà évoqué les manœuvres sur l’or. Pour rappel, je notais que l’Empire du Milieu était lancé (ainsi que, dans une moindre mesure, la Russie et l’Inde) dans un achat d’or tous azimuts. Son appétit n’a pas changé, les positions de sa banque centrale restant définitivement à l’achat. Parallèlement, on se souvient que le pays avait ouvert des lignes de swap direct avec, notamment, le Japon, lui permettant d’échanger des biens et services sans plus passer par le dollar.
Il semble que les Chinois continuent donc d’assoir, tranquillement mais sûrement, leur monnaie comme remplaçant possible du dollar américain ; non seulement, la quantité d’or dans les coffres de la Banque Centrale chinoise augmente drastiquement, mais en plus, le pays entend ouvrir une ligne de swap directe avec … l’Australie, éliminant le dollar américain du commerce entre les deux nations. De façon étonnante et en opposition diamétrale avec l’incompétence assez compacte qui caractérise le gouvernement français, la Banque de France a d’ailleurs décidé, devant ces opportunités, de tenter, elle aussi, d’avoir une telle ligne avec la Chine : ici, il s’agit essentiellement de damer le pion à la rivale anglaise dont on comprend qu’elle pourrait offrir à terme cette facilité à l’Empire du Milieu, mais que son allégeance aux États-Unis empêche pour le moment de concrétiser.
Que se passe-t-il ? Et surtout, pourquoi cela n’est pas du tout bon signe ?
Eh bien comme l’indique assez clairement Charles Gave dans son dernier édito, la baisse subite des cours de l’or indique d’abord … une évaporation de la liquidité monétaire. En substance, ce qu’on observe ici, c’est une véritable fuite des dépôts et une destruction du crédit. La monnaie s’enfuit de la zone euro, à grandes enjambées. Et le mouvement que l’on voit sur l’or est la démonstration d’une vente massive … de certificats divers et variés sur l’or, autrement dit, de l’or papier (ETF) : à l’évidence, on assiste ici à un véritable lessivage des mains faibles (tous les spéculateurs rentrés sur le marché pour bénéficier de la tendance, mais dont les positions sont de court ou très court terme). S’ajoute à ce mouvement qu’une partie de plus en plus importante des acheteurs d’or est en train de réclamer la livraison physique de l’or ou, lorsqu’il faut aller vite, de revendre leurs ETF.
Parce que, pour ce qui est de la livraison, on sait tous qu’il va y avoir un problème : il n’y a pas assez d’or physique pour répondre à la demande correspondante à l’or-papier. Et pour ceux qui avaient de l’or en dépôt physique, il semble que la nervosité soit au rendez-vous puisque des retraits massifs (et records) ont actuellement lieu dans les entrepôts du Comex.
Autrement dit, si l’on s’en tient à l’actuelle dégringolade des cours de l’or, la relique barbare n’est plus fashion, ni trendy et plus personne n’en veut. Vendez. Et si vous comprenez vraiment ce qui se passe sur les marchés actuellement, profitez de l’aubaine. Achetez. En effet, si l’on s’en tient aux remarques avisées d’analystes qui ont un peu plus de flair que nos ministres et les habituels commentateurs sur les médias mainstream, la chute actuelle démontre surtout une crispation très importante des marchés, et une perte de crédibilité des trackers sur l’or (l’or-papier). En revanche, l’or physique, lui, continue d’attirer tant les banques centrales des pays émergents qui cherchent à s’affranchir des monnaies occidentales de plus en plus pourries que les investisseurs soucieux d’échapper aux rabotages de plus en plus douloureux que les autorités leur font subir (par l’impôt, l’inflation ou la ponction directe sur les comptes).
Soyons bien clair : l’ensemble de ces éléments ne peut guère être interprété en faveur d’un avenir radieux. Il faudrait être désespéré ou stupide (ou les deux) pour continuer à clamer que la France pourra, d’ici à la fin de l’année, faire baisser sensiblement son chômage et enregistrer une croissance quelconque. De la même façon, il faudrait être complètement déconnecté de toute réalité pour croire qu’on ne va pas au devant d’un grain majeur ; agiter la presse sur des sujets de seconde importance et ne rien faire pour préparer le peuple au déluge qui s’annonce relève quasiment d’un comportement criminel.
En tout état de cause, ce pays est foutu.