Auteur : Elif Shafak
Editeur : Phébus
Littérature turque
Traduit par : Dominique Letellier
Nombre de pages : 410
Date de parution : mars 2013
Auteur :
Fille de diplomate, Elif Shafak est née en 1971 à Strasbourg. Elle a passé son adolescence à Madrid avant de s'établir en Turquie. Après des études en Gender and Women's Studies et un doctorat en sciences politiques, elle a un temps enseigné aux États-Unis. Elle vit aujourd'hui à Istanbul.
Internationalement reconnue, elle est notamment l'auteur de La Bâtarde d'Istanbul (Phébus, 2007) vendu à plus de 110 000 exemplaires depuis sa sortie en France, Bonbon Palace (Phébus, 2008), Lait noir (Phébus, 2009) et Soufi, mon amour (Phébus, 2010) qui est le plus grand succès de librairie des dernières décennies en Turquie. Forte de ce succès, son oeuvre est aujourd'hui publiée dans plus de 30 langues différentes.
Présentation de l'éditeur :
« Ma mère est morte deux fois. » C'est par ces mots qu'Esma, jeune femme kurde, commence le récit de l'histoire de sa famille née sur les rives de l'Euphrate et émigrée à Londres en 1970.
L'histoire, d'abord, de sa grand-mère dans le village de Mala Çar Bayan, désespérée de ne mettre au monde que des filles, elle qui sait combien la vie ne les épargnera pas. L'histoire de sa mère, Pembe la superstitieuse, et de sa tante, Jamila la guérisseuse, soeurs jumelles aux destins très différents. L'histoire des hommes aussi, celle de son père, tour à tour aimant, violent, fuyant, et celle de ses frères, Yunus le rêveur, et Iskender. Iskender, l'enfant chéri de sa mère, la « prunelle de ses yeux », son sultan. Son meurtrier.
Enfin, l'histoire de ces immigrés qui ont choisi l'exil pour vivre de miracles et croire aux mirages, qui ont choisi la liberté et l'amour quand d'autres restent ancrés dans les traditions et portent au pinacle l'honneur d'une famille.
Mon avis :
Fille de diplomate, élevée par sa mère, Elif Shafak est profondément enracinée dans la culture turque mais s'enrichit d'autres univers. Ainsi, on retrouve souvent dans ses romans les superstitions et les coutumes orientales mais aussi la défense de la femme et surtout le lien très riche de la mère à l'enfant.
L'auteur dit " J'aime me perdre quand j'écris, me trouver au niveau de mes personnages...". Effectivement, Crime d'honneur nous perd dans les différentes générations pour mieux comprendre le destin d'Iskender, fils chéri de Pembe.
Pembe et Adem quittent Istambul pour l'Angleterre avec leurs deux enfants Iskender et Esma. Yunus, le troisième enfant naîtra ensuite.
L'auteur nous dévoile les sombres histoires des familles d'Adem et de Pembe. Adem a vécu la déchéance de son père dans l'alcool et la fuite de sa mère. La mère de Pembe est morte en couches, espérant enfin mettre au monde un fils après la naissance de huit filles, dont les dernières jumelles, Pembe et Jamila.
Dans chaque famille, il y a la honte de la femme salie que ce soit avec Aïsha, la mère d'Adem ou avec Hediye, la soeur aînée de Pembe. Si la femme est salie, le mari ou à défaut le fils aîné doit défendre l'honneur de la famille.
Lorsqu'Adem se perd dans le jeu et s'installe avec une danseuse, Pembe se retrouve seule avec ses enfants. Si l'homme peut tromper ou mettre enceinte une anglaise, la femme doit rester fidèle et droite.
Dans ce mélange de cultures, ces familles turques ou immigrées, le poids des traditions se trouve confronté à une Angleterre où les extrêmes (punks, immigrés...) cohabitent. Si la jeune génération comme Yunus s'adapte facilement, les mentalités des pères, oncles et même fils aînés évoluent peu. Le devoir d'aînesse se jouera mais Elif Shafak qui mêle habilement les histoires des uns et des autres réserve un dénouement inattendu.
Avec une construction originale, l'auteur nous plonge au coeur de liens familiaux troublés par le poids ancestral d'une société patriarcale, enrichis des superstitions orientales. Mais c'est toujours la force du lien entre la mère et ses enfants, les liens familiaux quelquefois renforcés par la gémellité qui sauve les destinées.