Le Loup Solitaire - Louis Joseph Vance

Par Melusine1701

Dans un hôtel parisien, un jeune orphelin rencontre un cabrioleur irlandais. Il le prend sous son aile. Des années et quelques changements de nom plus tard, c’est un célèbre voleur qui sévit dans toute l’Europe. Il fait notamment tourner en bourrique les policiers de Scotland Yard depuis quelques temps. Le voici d’ailleurs de retour à Paris, et il le sait, un des meilleurs limiers anglais est sur ses traces. Mais Michael Lanyard, connu sous le nom du Loup Solitaire, a une longueur d’avance et surveille lui-même ce policier si près de lui, jusque dans la salle du restaurant de ce même hôtel où il a lui-même débuté. C’est là qu’il aperçoit aussi à une table un notable du moment, un escroc notoire très populaire dans les salons parisiens, annoncer à son compagnon américain qu’il sait qui est le Loup Solitaire et comment l’attraper! Les oreilles du Loup se dressent, tout comme celle du policier… La nuit venue, Michael tend une embuscade pour vérifier si son identité a été percée à jour. Dans l’une de ses planques, un message l’attend: une organisation criminelle, appelée la Meute, cherche à le compter parmi ses membres, bien décidé à éliminer ce rival gênant s’il ne décide pas à rentrer dans le rang. Mais on ne dompte pas le Loup… Il refuse donc. Les choses seraient moins complexes si, en rentrant dans sa chambre d’hôtel, il ne trouvait une drôle de surprise dans le piège tendu à son policier: la jolie Lucia Bannon, la fille de l’américain qui le recherche, pressée de fausser compagnie à son père! Le coeur du Loup se laisse attendrir… Le voici décidé à raccrocher, à cesser cette vie de larcins, à la fois pour échapper à la Meute et pour les beaux yeux de Lucia.

Loin des experts, des tueurs psychopathes modernes, nous voici à l’époque d’Arsène Lupin, de Belphégor et de ces criminels charmeurs aux grands idéaux, aux nobles intentions et aux mille tours. Une introduction aussi ironique qu’enjouée nous raconte l’enfance de Lanyard, un enfant sans passé, sans identité, dont le vol est une éducation tout autant que des valeurs: on ne dénonce pas les collègues! Une belle ellipse narrative nous permet de découvrir un Loup Solitaire dont la réputation n’est plus à faire, connu dans toute l’Europe, qui alimente les ragots des salons parisiens les plus chics tel un véritable objet de mode. Le personnage n’a rien à envier à son médiatique avatar de Maurice Leblanc en matière de déguisement: le Loup Solitaire ne cesse de changer d’identité, passant de gentleman à une table de restaurant à chauffeur de fiacre. Il se faufile sur les toits, se glisse dans des appartements où on lui laisse des messages dans les double-fonds de ses tiroirs et donne une superbe démonstration de décryptage de code d’un coffre-fort. Un monte-en-l’air qui se joue des forces de l’ordre avec malice et facétie, et dont on découvre les multiples facettes au fil de ses aventures.
A personnage plein de surprise, intrigue pleine de rebondissements. L’ensemble du livre se déroule sur à peine quelques jours, ou devrais-je dire quelques nuits, pendants lesquelles le Loup Solitaire va rencontre l’amour, la perdre, la retrouver, refourguer l’objet d’un vol, en restituer un autre, être accusé de meurtre, échapper à un incendie, semer des poursuivants en voiture et même se sortir d’une fusillade en avion! Autant vous dire qu’il ne chôme pas et qu’on a à peine le temps de reprendre son souffle. Il vaut mieux être habitués aux intrigues qui partent dans plusieurs directions, aux personnages qui disparaissent et réapparaissent là où on ne les attend pas et ne pas attendre d’explication, on n’a vraiment pas le temps! Sauf quand le Loup Solitaire est rejoint par ses idées noires.
Car si le Loup Solitaire est à classer parmi les bandits héros, il est plus complexe. S’il est prêt à envisager de se ranger par amour, il est aussi prêt à replonger à la première occasion. Peut-on vraiment renoncer à la richesse facile, à l’opulence, à la tentation de se servir, lorsqu’on a toute sa vie connu le confort par ce bais-là et qu’on est soumis à ce monde superficiel dans lequel tant de voleurs vivent à l’air libre? L’introspection est fréquente et la rédemption ne va pas de soi, d’autant plus que si le Loup Solitaire tient à une identité secrète, autour de lui, nombre de notables, nobles, star des salons parisiens sont soumis au crime organisé, membre de la Meute, et qu’un simple masque n’empêche pas de reconnaître. Qui est le plus à blâmer entre le criminel isolé et la bande organisée qui vole au grand jour? Malgré ses valeurs et ses intentions louables, le héros inspire aussi de la méfiance et le monde dans lequel il évolue semble plus corrompu que jamais.

La note de Mélu:


Des rebondissements pendant lesquels il faut s’accrocher, mais un très bon moment de lecture! Un grand merci à Louve et au forum Mort-Sure pour ce partenariat !

Un mot sur l’auteur: Louis Joseph Vance (1879-1933) est un romancier américain. Ses aventures du Loup Solitaire ont plusieurs fois été portées à l’écran, mais peu traduites.

Titre original: The Lone Wolf (traduit de l'Anglais)

catégorie “animal”