Loin des experts, des tueurs psychopathes modernes, nous voici à l’époque d’Arsène Lupin, de Belphégor et de ces criminels charmeurs aux grands idéaux, aux nobles intentions et aux mille tours. Une introduction aussi ironique qu’enjouée nous raconte l’enfance de Lanyard, un enfant sans passé, sans identité, dont le vol est une éducation tout autant que des valeurs: on ne dénonce pas les collègues! Une belle ellipse narrative nous permet de découvrir un Loup Solitaire dont la réputation n’est plus à faire, connu dans toute l’Europe, qui alimente les ragots des salons parisiens les plus chics tel un véritable objet de mode. Le personnage n’a rien à envier à son médiatique avatar de Maurice Leblanc en matière de déguisement: le Loup Solitaire ne cesse de changer d’identité, passant de gentleman à une table de restaurant à chauffeur de fiacre. Il se faufile sur les toits, se glisse dans des appartements où on lui laisse des messages dans les double-fonds de ses tiroirs et donne une superbe démonstration de décryptage de code d’un coffre-fort. Un monte-en-l’air qui se joue des forces de l’ordre avec malice et facétie, et dont on découvre les multiples facettes au fil de ses aventures.
A personnage plein de surprise, intrigue pleine de rebondissements. L’ensemble du livre se déroule sur à peine quelques jours, ou devrais-je dire quelques nuits, pendants lesquelles le Loup Solitaire va rencontre l’amour, la perdre, la retrouver, refourguer l’objet d’un vol, en restituer un autre, être accusé de meurtre, échapper à un incendie, semer des poursuivants en voiture et même se sortir d’une fusillade en avion! Autant vous dire qu’il ne chôme pas et qu’on a à peine le temps de reprendre son souffle. Il vaut mieux être habitués aux intrigues qui partent dans plusieurs directions, aux personnages qui disparaissent et réapparaissent là où on ne les attend pas et ne pas attendre d’explication, on n’a vraiment pas le temps! Sauf quand le Loup Solitaire est rejoint par ses idées noires.
Car si le Loup Solitaire est à classer parmi les bandits héros, il est plus complexe. S’il est prêt à envisager de se ranger par amour, il est aussi prêt à replonger à la première occasion. Peut-on vraiment renoncer à la richesse facile, à l’opulence, à la tentation de se servir, lorsqu’on a toute sa vie connu le confort par ce bais-là et qu’on est soumis à ce monde superficiel dans lequel tant de voleurs vivent à l’air libre? L’introspection est fréquente et la rédemption ne va pas de soi, d’autant plus que si le Loup Solitaire tient à une identité secrète, autour de lui, nombre de notables, nobles, star des salons parisiens sont soumis au crime organisé, membre de la Meute, et qu’un simple masque n’empêche pas de reconnaître. Qui est le plus à blâmer entre le criminel isolé et la bande organisée qui vole au grand jour? Malgré ses valeurs et ses intentions louables, le héros inspire aussi de la méfiance et le monde dans lequel il évolue semble plus corrompu que jamais.
La note de Mélu:
Des rebondissements pendant lesquels il faut s’accrocher, mais un très bon moment de lecture! Un grand merci à Louve et au forum Mort-Sure pour ce partenariat !
Un mot sur l’auteur: Louis Joseph Vance (1879-1933) est un romancier américain. Ses aventures du Loup Solitaire ont plusieurs fois été portées à l’écran, mais peu traduites.
Titre original: The Lone Wolf (traduit de l'Anglais)
catégorie “animal”