Belle performance de langue de bois le 16 avril au journal de 2O heures de la deuxième chaîne. David Pujadas avait invité Nadine Morano, secrétaire d’Etat à la famille, pour l’interroger sur les modifications envisagées pour les Allocations familiales. Au cours de cet entretien, il s’est révélé pour une fois particulièrement pugnace.
Il attaque bille en tête : «Pourquoi le gouvernement souhaite-t-il diminuer le montant des AF ? ». Mme Morano rétorque immédiatement par un mensonge éhonté : «Non, le gouvernement ne diminue pas le montant des AF». Il ressort pourtant des données avancées que, actuellement, les parents perçoivent une majoration mensuelle de 33€ quand l’enfant atteint 11ans et une de 60€ lorsqu’il a 16 ans. Dans la nouvelle formule : il n’y a plus de majoration à 11 ans et la majoration de 60€ est attribuée dès 14 ans. N’importe quel élève de sixième est à même de se livrer au calcul suivant :
-- Majorations perçues aujourd’hui : 33 x 5 + 60 x 4 = 405€
-- Majorations perçues à partir du 1° mai : 60 x 6 = 360€
Donc, n’en déplaise à Mme Morano, il y a bien là une diminution de 10%.
Mme Morano passe alors à un second argument : «un débat a eu lieu au cours du projet de loi de Finances sur le budget de la Sécurité Sociale à l’automne dernier, au mois d‘octobre et ça a fait l’objet d’un débat parlementaire. » David Pujadas lui objecte que les administrateurs de l’UNAF ont rejeté ce projet. Mme Morano a cette réponse superbe : «j’ai reçu le Président de l’UNAF dans mon bureau» (quelle bonté !), «nous en avons discuté, il n’était pas favorable à la mesure mais il n’y avait pas de position de blocage (!)». Ceci ne l’empêchera pas d’ailleurs de réutiliser cet argument imparable presque à l’identique dans la suite de l’entretien.
Cette mesure, qui devrait coûter selon les estimations de l’UNAF 138 millions d’euros, permettra d’octroyer aux parents qui font appel à des assistantes maternelles «un complément de mode de garde» de 50€ par mois pour un coût estimé à 40 millions d’euros. Curieux, lorsqu’on répète à satiété rééquilibrage, de générer de tels déséquilibres.
Interrogée sur les déclarations de Luc Chatel : «Il n’y a rien de prévu en ce sens de baisse des AF», elle répond : «c’est la question dont nous avons discuté tous les deux en aparté au Conseil des ministres». Tiens, tiens, on se permet des messes basses au lieu de suivre ce qui se dit au Conseil ? Ils n’ont donc pas d’autre moment pour se parler ? Voilà sans doute l’origine des couacs et des fausses notes de tous ces ministres.
Mme Morano parle abondamment de rééquilibrage, de redéploiement. Avec des gens qui qualifient de rééquilibrage la gifle reçue par l’UMP lors des municipales, nous sommes en droit de nous demander si nous parlons bien la même langue. A propos de ce redéploiement, compère et commère parlaient au Conseil de la RGPP «qui n’interviendra qu’au mois de juin et là, rien n’est tranché». Si l’on comprend bien, pour cette baisse des AF, tout était joué en octobre dernier et les consultations de l’UNAF avant l’application au 1° mai n’étaient précisément que des consultations (les ministres sont par essence et grâce du Président plus savants que les Caisses sur ces sujets). Par contre, pour ce qui doit sortir en juin, rien n’est joué.