13 avril 2013
...pour rester convenable !
Ce matin, grand soleil : les premiers marronniers déploient leurs petites feuilles vertes, les fleurs jusqu’ici rabougries soigneusement plantées par les jardiniers municipaux éclosent …. Et les piétons font n’importe quoi. Pas moyen de franchir au feu vert la rue de Rennes, les passants vous regardent droit dans les yeux et traversent au raz de votre calandre en souriant béatement… serait-ce un effet Cahuzac ?
Après tout, quand on constate qu’au plus haut niveau, ceux qui nous représentent font n’importe quoi, pourquoi se priver ?
Un ministre chargé de traquer l’évasion fiscale et d’équilibrer les finances publiques fraude le fisc et la sécurité sociale, un président de la République installe dans un appartement de l’Etat une famille cachée, un grand rabbin se targue d’un diplôme universitaire qu’il n’a pas, un médicament mis sur le marché après autorisation cause des milliers de morts pour avoir été prescrit pour une affection différente de celle pour laquelle il avait été conçu ?
Pendant ce temps-là, nos parlementaires de tous bords s’étripent pour savoir s’il convient ou non de mettre sur la place publique la composition de leur patrimoine. Ne sont-ils pas des citoyens comme tout le monde ? Il existe pourtant un seuil* au-delà duquel tout ménage français doit établir chaque année une évaluation précise de ses avoirs : depuis ses propriétés immobilières jusqu’à la valeur à l’Argus des véhicules qu’il possède … et ces déclarations sont soigneusement vérifiées par l’administration fiscale. Si celle-ci constate que vous avez omis de déclarer alors que vous l’auriez dû, elle revient 10 années en arrière et vous contraint à reconstituer 10 déclarations et vous taxe sur les 10 années non déclarées, sans oublier une sérieuse amende. Si vous avez sous-estimé de bonne foi votre patrimoine, elle vous taxera sur 3 années seulement. Et le seuil n’est pas si élevé que ça : à moins de planquer des avoirs dans un paradis fiscal, si on possède un appartement à Paris et une résidence secondaire, on est dedans.
Ainsi, un contribuable qui a bénéficié d’un bon salaire toute sa vie professionnelle, comme les parlementaires ou les ministres, est le plus souvent, comme Marisol Touraine, soumis à l’ISF. C’est vérifiable et cela n’a rien de choquant. C’est la vraie solidarité, n’est-ce pas ….
Alors, nous, qui avons travaillé toute notre vie, qui avons passé nos examens dans l’angoisse de l’échec, qui avons scrupuleusement déclaré l’intégralité de nos revenus, cotisé à la sécurité sociale pour nous constituer une juste retraite, payé des droits de succession conséquents lors des décès successifs de nos parents, qui déclarons à l’URSSAF la totalité des heures de ménage de nos employés, qui n’avons ni compte en Suisse ni investissements dans des niches fiscales exotiques….nous nous sentons bien seuls et bien stupides.
Nous n’en avons rien à faire de savoir combien de petites cuillères en argent possèdent nos hommes et femmes politiques. Nous avons besoin de savoir sur quelles dépenses non indispensables le gouvernement va enfin se pencher pour rétablir l’équilibre des comptes publics et retrouver un peu de croissance économique, de telle façon que nos jeunes diplômés ne se sentent pas obligés d’aller trouver au bout du monde les emplois qui ont disparu chez nous du fait de notre manque de compétitivité.
*Seuil d’assujettissement à l’ISF pour 2013 : 1,31 millions d’€. Ce qui représente la valeur d’un appartement parisien de 100m² dans un quartier pas trop éloigné de l’Assemblée Nationale, plus une maison en province pour fortifier l’implantation locale.