La semaine prochaine, je commencerai donc mon cheminement sur le chemin des 88 Temples de Shikoku, le plus célèbre pélerinage japonais. Comme sur le Saint-Jacques un an plus tôt, je vais ainsi mettre mes pas dans ceux de milliers de marcheurs qui m'ont précédé.
Si bien sûr les cultures sont différentes, je vois a priori pas mal de points communs entre ces deux itinéraires; même quête religieuse au départ, devenues ensuite, plus ou moins, quête spirituelle ou individuelle. Car sur le chemin des 88 temples comme sur le Saint-Jacques, apparemment, chacun vient maintenant pour y trouver ce qu'il veut chercher.
Bien sûr, ce chemin reste très lié aux temples bouddhiste qui le parsèment, le constituent même. Historiquement, le pélerinage de Shikoku est pour la première fois mentionné au 12eme siècle, mais sans référence au circuit spécifique des 88 temples. Il semble que dans sa forme actuelle, le chemin se soit dessiné au 17eme siècle. Un peu comme sur le Saint-Jacques, ce sont les dernières décennies qui ont vu le nombre de pélerins à pied largement augmenter. Par ailleurs, nombreux sont les japonais qui l'effectuent aujourd'hui en bus ou en reliant les temples par les transports et la route.
L'origine symbolique du pélerinage remonte à une époque plus ancienne. Celle du fondateur du boudhisme Shingon au Japon, le saint Kobo Daishi, également appelé Kukai. Il est une figure majeure de l'histoire et de la culture japonaise. Kobo Daishi aurait passé une partie de sa vie sur Shikoku, et également une partie de son entraînement ascétique.
D'après ce que j'en sais, et en très gros résumé, le bouddhisme Shingon se caractérise par le fait de chercher à devenir Bouddha et connaître l'état de sérénité totale et d'illumination dans cette vie, sans attendre une réincarnation. « Le Shingon est l'enseignement le plus profond du Mahayana. Il se consacre à assurer la paix du pays par la prière, à sauver tous les êtres en chassant les malheurs et en apportant les bonheurs. Son idéal, c'est devenir Bouddha, dans cette vie, avec ce corps, ce qui signifie vivre dans la vérité.". Bien entendu, cela exige une quête très profonde et un entraînement très intense.
Je n'ai pas l'ambition d'atteindre cela. Mais en marchant sur ce chemin de spiritualité, aux cotés symbolique de Kobo Daishi (qui accompagne selon la tradition les pélerins dans leur marche circulaire, on retrouve là l'idée du Mandala, à la différence du pélerinage chrétien qui va vers un endroit, une arrivée- même si au départ il fallait bien rentrer. Les deux me vont quant à moi, tant que le cercle n'est pas trop petit et que l'itinérance est là; plus de mal sur une boucle autour d'un stade comme vous l'avez compris...), je chercherai sans doute une forme de sérénité, de plénitude de l'instant présent. Sans oublier pourquoi je parcours ainsi les chemins, sans renoncer à chercher un sens à ma vie.
Ce chemin, outre la splendide découverte qu'il m'offrira sans doute, sera donc aussi l'occasion d'un exercice. Me concentrer sur le moment présent, être vraiment là, sans toutefois oublier les personnes qui m'ont permis d'y marcher, et en faisant par contre un certain travail pour mettre de côté les choses plus négatives, notamment les tromperies et les trahisons amicales, sentimentales et professionnelles qui m'ont vraiment affectés dans les mois précédents. Ainsi va sans doute la vie mais j'essaie toujours de ne pas la voir comme ça. Et de tracer mon chemin, en cercle ou en ligne droite.