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« Et je l’ai vu, jeune peuple fantôme se redresser »

Publié le 11 avril 2013 par Tchekfou @Vivien_hoch

Tribune libre de Juliette Despréaux

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J’ai grandi avec eux. Avec eux j’ai grandi dans un monde un peu plus absurde, un peu plus odieux, un grandissant chaos où comme eux j’ai appris à survivre. Nous eûmes ensemble nos fièvres adolescentes d’indignation. Nous marchions, nous militions, au pire nous cantonnions notre mal à la France, à de naïves mais sincères envolées lyriques de noviciat du pavé.

Ensemble nous avons ensuite appris que ce pays n’était plus le nôtre, que la lutte avait, bien avant notre naissance, été perdue. Et que ce monde-ci et notre terre avaient été livrés à des marchands de mort et de lucre, d’insipides et remarquables fantoches que les pantalonnades de mai 68 avaient créés, avaient bâtis à grand coup de respect, de tolérance et d’égalité. Et cette égalité s’étalait désormais partout, des frontons d’écoles transformées à machines à tuer les âmes, aux trottoirs de rues devenues terrain de jeux mortels pour des gosses incapables de comprendre ce que des savants fous avaient faits d’eux.

Et le marteau s’abattait chaque jour, un peu plus doucement, marteau de caoutchouc, knout d’opérette festiviste, mais marteau tout de même. Et nous courbions la tête, votant et jurant de ne plus voter, mordillant nos chaînes devenues chaque jour un peu plus douces et plus insupportables. Et nous avons accepté la peur, et la mort de nos enfants, et nos familles pulvérisées par le consumérisme et la perte de Dieu, et le souverain règne de rats vautrés dans une bonne conscience de Kapos de soie, et ces nouvelles, chaque jour plus menaçantes, et nous chaque jour plus habitués, serrant les dents sous la menace des rapières médiatiques.

« Et je l’ai vu, jeune peuple fantôme se redresser, et talonner chaque ministre et chaque putois subventionné »

Et le jour est venu où ce qui subsistait encore sur le papier, dernière dignité et dernière évidence, cela même allait être attaqué. Et alors, alors seulement j’ai compris avec eux qu’il était temps. Et je l’ai vu, jeune peuple fantôme se redresser, et talonner chaque ministre et chaque putois subventionné, les talonner avec cette insouciance libre et orgueilleuse du jeune sang qui se découvre.

« Ils ont couru des risques, ils ont été paisiblement obéissants et bienheureusement insoumis. »

Ils ont couru des risques, ils ont été paisiblement obéissants et bienheureusement insoumis. Ils ont crié jusqu’à s’en faire péter une gorge qui avait contenu trop de larmes. Ils ont affronté les risques de la lettre de licenciement qui tombe, du patron qui vous reconnaît, du voisin qui se moque et de l’avocat à payer. Ils ont affronté cela, en des temps où l’on a peur de la wifi défectueuse et du métro en retard. Redécouvrant une liberté neuve, et la rédemption de l’inutile combat, ils se sont levés, fidèles, là. Pères, mères de famille, vieillards pour quelques uns, tout juste adolescents pour d’autres, ils avaient mille visages et n’en avaient plus qu’un : l’espérance. Petite sœur insouciante et farouche, elle était là, et elle était eux.

504427Ils sont mes frères et sœurs, mes camarades, amis chers et inconnus, longtemps je me suis tue devant le tombereau d’hérésies consternantes qui tombait sur vos épaules dans d’illégitimes conclaves associatifs et médiatiques présidés par une créature de notre temps. Je vous ai vus, je nous ai vus accepter, sur la promesse d’une bataille commune, des alliances inutiles ou déshonorantes, je vous ai vus encaisser la vindicte criarde d’une Indignée qui vous traitait d’extrémistes, de groupuscules et d’activiste,s et de tout ce que sa petite âme de chaisière XXIème siècle, ne pouvant comprendre et saluer, rejetait comme indigne de sa personne.

« Ce peuple-ci, madame, ce peuple-ci qui s’est levé derrière vous, ce peuple jeune de foi et de sacrifice, existait avant vous. »

Ce peuple-ci, madame, ce peuple-ci qui s’est levé derrière vous, ce peuple jeune de foi et de sacrifice, existait avant vous. Avant vous, bien à vous, il s’épuisait dans le mépris qu’on lui portait, il affrontait ricanements, insultes et exclusion. Il connut, bien avant vous, et les menaces et la souffrance de luttes idéologiques perdues d’avance dans une Europe pissant sa honte sur ses pieds manucurés, dans un pays défiguré par son relativisme et sa haine de lui-même. Avant vous, bien avant vous, ces jeunes travaillaient, aimaient, priaient, se battaient, en mâchant en jeunes vieux sages la tradition héritée d’ancêtres qui n’avaient pour tort que de ne pas connaître la France black-blanc-beur, et se contentaient d’inonder d’enfants, de sueur, de chants et de sang cette terre aimée jusqu’à la mort. Cette terre qui ne se bâtit pas sur des podiums de gigotant pantins méphitiques, mais sur des valeurs sacrées et verticales.

Vous détenez, par ce mystère de notre temps qui vomit les prophètes et élève les imbéciles, le pouvoir de vous pencher sur ces âmes de fer et de les faire connaître et de les faire entendre. De faire largement résonner leur cri de colère et d’amour. Vous avez fait le choix de les rejeter, vous avez fait le choix de ne pas vous taire, vous avez choisi, vous, madame, et personne d’autre, de trahir votre camp. Vous avez condamné la loi Taubira en servant la soupe, par chacun de vos mots chaque jour plus insanes et plus grotesques, à ce grand mouvement diabolique qui, précisément, permet aujourd’hui à ce projet de loi d’exister et hélas sans doute d’être validé.

« Vous avez commis, le 24 mars dernier, ce qui s’appelle une trahison. »

Parce que l’ego des gnous est le plus enflé et le plus propre à lui masquer son champ de vision, vous ne laissez plus passer un seul jour sans sacrifier, scrupuleusement, à un veau d’or de notre temps. Vous avez commis, le 24 mars dernier, ce qui s’appelle une trahison. Vous avez largué, comme un petit bidasse qui serre les fesses devant le possible mitard, les milliers de marcheurs présents sur les Champs, et, pour que le spectacle de votre lâcheté soit complet, vous l’avez fait devant les caméras. Vous avez ensuite roucoulé à l’UOIF, et, pour que l’indignité soit complète, pour que vraiment vos mains soient bien sales, vous avez annoncé vouloir porter plainte contre le Printemps français. Vous avez déclaré, en bonne petite esclave utile et sotte, que vous vous vautreriez dans cette envie du pénal qui est le sceau contemporain des âmes vaines.

« rappelez-vous que pour vous, le coq a déjà chanté plusieurs fois »

Vous prétendez être chrétienne, madame. Et sans nul doute, vous l’êtes. Alors, avant que de trancher l’oreille de Malchus, rappelez-vous que pour vous, le coq a déjà chanté plusieurs fois. Rappelez-vous que l’honneur vous commande de descendre de vos pupitres syphilitiques de paillettes, et de vous mettre à genoux, madame, et de vous mettre au service, et de servir, madame, et pas de vous servir. De servir ce combat, et de regarder, avec émerveillement et humilité, ce jeune peuple que vous avez insulté, ces familles anonymes qui, le 24 mars dernier, ont pris les Champs d’une main souveraine, non pour eux et non pour la gloire, non pour l’image et non pour le geste, mais pour la seule chose encore qui puisse sauver notre peuple. La famille.


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