Avoir le goût de lire un livre parce qu’il est beau, que je suis superficielle ! C'est vrai, l’esthétisme de cet objet est venu me chercher et, à mon avis, il le fallait puisque les chroniques de Stéphane Dompierre se nichent en quelque part sur la Toile.
Les choix graphiques de Fâché noir démontrent qu’il n’y a pas de plaisant que ce qu’on lit (le fond). Tourner les pages, la typographie agréable à l’œil, l’équilibre entre le blanc et le noir, entre le silence et les mots, permettant au lecteur de reprendre sa respiration avant de replonger dans une autre donnent du plaisir. En fait, Fâché noir, sous forme de recueil de chroniques renferme tout ce qu’on ne retrouve pas sur le net. J’aime son « tout de noir vêtu » avec ses titres de chroniques en lettres gigantesques (majuscules) qui suggèrent le cri. Quand on est fâché, on crie !
Ce qui ne veut pas dire que Stéphane Dompierre crie fort. S’il y a quelque chose qu’il ferait fort, ce serait rire. Ce qui reste une manière de parler puisqu’il rit en douce. Comme il ne porte pas la barbe assez longue pour rire dedans, il camoufle son rire en se pinçant. Vous avez tout compris, c’est un pince-sans-rire !
Prière, donc, de ne pas prendre ses chroniques au premier degré, sinon, c’est vous qui sortirez de votre lecture fâché noir. Je compare Dompierre à Louis-José Houde pour sa perspicacité à percevoir le détail qui cloche, qu'il aborde ensuite sous un angle jamais abordé encore. Un angle drôle pour un humoriste, et drôlement fâché pour l’auteur qu’est Stéphane Dompierre.
Pas moins de 53 chroniques en 165 pages aux titres gigantesques ; vous pouvez donc en apprendre quelques une par cœur. Exemple de sujets : Le paranormal, le métro, les guichets automatiques, les statistiques, le gars qui klaxonne, le point d’exclamation, les heures d’ouverture, les compliments, le vin, les Salons du livre, etc ... Mon sourire est resté accroché dans le coin de ma bouche à la majeure partie des chroniques. Il y en a des savoureuses, des ordinaires, des surprenantes, des drôles, des choquantes, des lucides, des géniales. Quelques plates, mais peu.
Déguisées en grimace se cachent quelques perles de lucidité que l'on pourrait développer en thèses critiques sur la société québécoise moderne. On va laisser cette activité à Catherine Voyer-Léger.
Ceci dit, Dompierre a le sens du punch, comme n’importe quel bon humoriste. J’ai admiré les boucles finales qui ferment joliment presque chaque chronique.
Lecture assurément distrayante faisant sourire malgré soi, et réfléchir, si on se donne la peine d'en gratter la surface.