Quelques fantômes du paiement en ligne ont ressurgi le 25 mars dernier, lorsque EBA Clearing annonçait [PDF] le lancement de MyBank avec 28 établissements bancaires européens. Le paiement en ligne via les services internet des banques et basé sur les instruments SEPA rappellera en effet des souvenirs à certains... Plusieurs années après les promesses initiales, cette solution a-t-elle encore des atouts pour réussir ? Rien n'est moins sûr.
Mais, tout d'abord, comment fonctionne MyBank ? Du point de vue du consommateur, il s'agira d'une nouvelle option de paiement disponible sur les sites de e-commerce. Une fois celle-ci sélectionnée, l'internaute est redirigé vers les services en ligne de sa banque, où il va devoir s'identifier (comme pour consulter ses comptes) afin de confirmer le règlement. En arrière-plan, le transfert des fonds est réalisé (en temps réel) sous la forme d'un simple virement SEPA.
Pour son lancement officiel, MyBank compte 10 groupes bancaires participants, représentant 28 établissements. Parmi ceux-ci, 27 sont italiens, le dernier étant la BRED (Groupe Banque Populaire). Plusieurs dizaines d'autres auraient déjà annoncé leur soutien. Étonnamment, aucun autre français ne figure dans la liste alors même que tous les grands groupes de l'hexagone font partie des fondateurs de EBA Clearing.
Il faut encore noter que le système n'est pas opérationnel à ce jour, puisqu'il est actuellement en phase de recrutement de e-commerçants et de facturiers. Cette position émergente n'empêche pas les promesses (encore !) de futurs services complémentaires, de l'initiation de mandat électronique pour les prélèvements SEPA à la gestion des identités en ligne, en passant par les transferts d'argent entre particuliers.
Il était certainement temps pour les banques de tenter de reprendre une position dans les paiements en ligne, face aux réseaux de carte et à PayPal ! L'adoption des instruments SEPA leur permet de proposer une solution extrêmement économique, accessible à l'ensemble des consommateurs de la Communauté Européenne. Par ailleurs, la confiance des consommateurs dans les services internet des banques (et leur sécurité) constitue un autre atout, largement mis en avant.
Malheureusement, face à ces maigres avantages, les handicaps et limitations s'accumulent. A commencer par la prétendue simplicité d'utilisation : après avoir sélectionné MyBank pour payer, l'acheteur doit sélectionner sa banque (parmi toutes celles qui proposent l'option en Europe !), il lui faudra encore subir un transfert vers un site tiers, s'identifier, valider la transaction et, enfin, si tout s'est bien passé, patienter jusqu'au retour sur l'espace commerçant pour obtenir confirmation de sa commande. Ouf !
De nos jours, il est notoire que les systèmes de paiement imposant de quitter le site commerçant représentent un obstacle majeur à la fluidité des achats et génèrent des taux d'abandon de panier insupportables. Visiblement, EBA Clearing n'a pas entendu (ou compris) le message. Il aurait pourtant été possible d'envisager une solution à base d'APIs ("Application Progamming Interfaces") pour s'affranchir de ce problème.
Autre signe d'une approche datée, MyBank ne prend pas en compte les particularités du m-commerce qui est pourtant en passe d'exploser. Les seules mentions qui sont faites du mobile sont la possibilité d'intégrer l'accès aux services de banque en ligne à l'intérieur des apps. Non seulement cette approche est-elle peu ergonomique mais elle pourrait constituer une régression en termes de sécurité (les applications étant potentiellement mieux protégées que le web mobile).
En l'état actuel du projet, MyBank aurait peut-être eu une chance de s'imposer si nous étions toujours en 2005. Entre temps, le paiement en ligne et mobile a évolué : il est devenu plus transparent, plus ergonomique, mieux intégré... et les inquiétudes pour la sécurité ont commencé à disparaître parmi les consommateurs (notamment grâce à des protections renforcées). Il reste encore beaucoup de travail à EBA Clearing pour se hisser au niveau d'un PayPal et rien ne laisse hélas entrevoir que cet effort est sérieusement entamé.