Baidu, l’émergence d’un nouveau géant du Web
Créé en 2000, le moteur de recherche chinois Baidu réalise chaque jour six milliards de clic. De bons résultats qui font de lui le site le plus fréquenté en Chine et le sixième à l’échelle du monde. Un leadership qui en 2010 a pris une nouvelle dimension avec le départ de Google à Hong-Kong pour cause de différents politiques. Dans cette situation favorable, Baidu a décidé de développer son assise sur son marché domestique. Pour se faire, Baidu n’hésite pas à s’inspirer directement des services proposés par Google. Ainsi, le moteur de recherche chinois développe un navigateur mobile sous Androïd et se lance dans le Big Data via le Cloud Computing. Après avoir importé une partie des concepts de Google, Baidu souhaite marquer sa différence en adaptant davantage son moteur de recherche aux particularités linguistiques du monde asiatique, une option que ne propose pas encore Google. La force de Google réside dans sa langue, l’anglais. Celle-ci lui permet de toucher un large public mais ne correspond pas à la culture asiatique, et chinoise en particulier. Conscient des limites de Google, Baidu a décidé d’adapter son moteur de recherche à ces différentes cultures, c’est ainsi qu’à Singapour, l’entreprise a installé un laboratoire de recherche qui se charge d’étudier les langues asiatiques. L’ambition de Baidu est, à terme, de pouvoir proposer un moteur de recherche qui prenne en compte les particularités culturelles liées à la langue.
Baidu ne cache plus sont ambition d’aller conquérir d’autres marchés, les pays émergents. En témoigne, son engagement dans la bataille du Big Data et le développement avec Orange d’un navigateur mobile (en arabe, en anglais et en français) dans les pays africains où le groupe français est présent. A cela s’ajoute les liens qu’entretiennent depuis 2006 Baidu et Bing (Microsoft). En 2006 déjà, un premier accord permettait aux liens sponsorisés de Baidu d'apparaître sur les déclinaisons chinoises de MSN et de Live Search. En 2011, les deux entreprises développent un nouvel accord permettant d’offrir des services de recherche en anglais aux internautes chinois. Cette alliance entre Baidu et Microsoft bénéficie aux deux acteurs : le premier développe une dimension internationale et le second prend un avantage significatif sur Google en s’alliant avec le leader du marché.
La contre-attaque de Google en Chine
Entraves à la liberté de l’information et autres attaques informatiques, les relations entre Google et les autorités chinoises sont conflictuelles. En 2010, cela conduit le géant américain à s’éloigner du marché chinois en prenant ses quartiers à Hong-Kong où les règles d'autocensure imposées par Pékin ne fonctionnent pas. Cependant, riche d’un premier échec, Google ne souhaite pas baisser les bras. Ainsi, depuis janvier, l’entreprise américaine entend réinvestir le marché chinois en rouvrant sa filiale. Par ailleurs, elle organise en coulisse une attaque contre Baidu. Associé à Soso et Qihoo 360, les challengers de Baidu, Google apporte à ces deux entreprises locales son soutient logistique et financier pour que ces derniers montent en puissance au détriment de Baidu. Une stratégie qui pourrait cependant bénéficier à Baidu, si celui-ci décidait de racheter ses concurrents.
Les moteurs de recherche alliés de circonstances contre le gouvernement chinois ?
Le conflit qui anime les différents moteurs de recherche américains et chinois pourrait prochainement prendre fin. En effet, une alliance de circonstance pourrait les conduire à réunir leur force pour mettre fin aux entraves politiques que mène le gouvernement chinois à leur encontre. Ce dernier conscient de l’érosion progressive de son pouvoir et de son influence conduit des campagnes visant à discréditer Google d’une part et Baidu d’autre part. Les attaques informationnelles sont très importantes à l’égard de Baidu notamment accusé de ne pas respecter le droit d’auteur des artistes. En outre, ne voulant pas laisser le monopole de la recherche sur Internet à Baidu, l’Etat s’est lui aussi lancé dans la bataille en créant deux moteurs via deux médias, « le Quotidien du Peuple » et « l'agence Chine Nouvelle ». Face à la montée en puissance du pouvoir chinois dans le monde d’Internet, les moteurs de recherche pourraient se mobiliser. Un choc de culture est à prévoir entre les dirigeants des moteurs de recherche – tous formés aux Etats-Unis – et le gouvernement chinois. Affaire à suivre.