La phase du non

Publié le 09 avril 2013 par Dodo44

Elle était parfaite à en ulcérer d’envie les reines au foyer. Elle concoctait des plats à faire saliver d’appétit les plus fins palais. Elle gardait son intérieur d’une telle propreté que la poussière songeait à se faire cloîtrer. Disons, par ailleurs, qu’on la méprenait à l’occasion pour un vulgaire paillasson.

Tout tunnel mène à la lumière, quelle que soit la manière.

Ainsi arriva le jour où elle en eut vraiment, mais vraiment raz-le-pompon de son calvaire. C’est alors qu’elle considéra une nouvelle option. Une nouvelle réponse aux mêmes questions qui fusaient sans relâche dans sa direction. En l’occurrence… Le mot non!

Oh! mais quoi? Halte là! De quel droit nous refuse-t-elle son temps, son énergie, son argent? Son écoute, sa sueur, son sang?

Que s’est-il passé pour que cette bonne-à-tout-donner s’oppose ainsi à notre volonté? Serait-ce le résultat d’une maléfique domination? Serait-elle la victime d’une horrible conspiration? Ou pire encore… L’aurait-on kidnappée et remplacée par ce que vous savez?

Calmons-nous, mes amis! La cause de cette révolution n’est pas d’origine extraterrestre. Notre bénie-oui-oui avait simplement atteint la limite exceptionnelle de sa marge de crédit émotionnelle.

Pendant que les brièvement-livrés-à-eux-mêmes obtenaient consolation auprès d’autres modèles de compassion, elle remarqua un étrange rayon percer l’épaisse enveloppe de son cocon. Qu’était-ce donc?

Vous avez raison, c’était le mot non.

Ce gros méchant non qui lui avait si souvent servi d’enclos pour mâter ses désirs-trop. Trop beaux. Trop fous. Trop merveilleux. Trop… tout! Et les garder au petit-trot. Alors qu’elle aurait tant voulu les chevaucher au grand-galop!

Réjouissons-nous! Un soleil radieux illuminait sa destinée. À ses chaînes imaginaires, elle apprit à dire adieu. Devant ses mignons tortionnaires, elle accepta d’assumer l’odieux. Fini l’enfer, merci ô Dieu!

Ravigotée par sa témérité, elle osa dès lors se dire oui, à elle plutôt qu’à autrui. Bien sûr, elle comprit que les non venaient maintenant de prendre une autre direction. Et qu’ils lui serviraient de moments de réflexion. D’espaces de liberté pour sentir sa véritable motivation. Sans la distraction de ses ex-nourrissons.