L’éthique de réciprocité

Par Helmous

L’éthique de réciprocité, que l’on a coutume d’appeler « la Règle d’or » , désigne une morale dont le principe fondamental est énoncé dans pratiquement toutes les grandes religions et cultures (orales et écrites) : « traite les autres comme tu voudrais être traité » ou « ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse ».
Cette règle est le socle universel de la morale. C’est l’un des fondements essentiels de la vie de toutes les sociétés humaines, une sorte de loi naturelle élaborée au fil ses siècles, par l’humanité depuis ses origines.
La Règle d’Or,  basée sur la réciprocité, est pleine de simplicité et de bon sens. Elle ne fait aucune référence à Dieu, à aucune divinité. Elle a donc un caractère universel et parfaitement laïque.
Elle est ainsi le fondement éthique et le point de convergence de toutes les cultures et religions et aussi des droits humains. C’est une barrière que la morale dresse contre l’égoïsme et contre ceux qui pensent ne pouvoir réaliser pleinement leur liberté qu'en piétinant celle des autres.
Dénominateur commun à l’Humanité, il est frappant de constater qu'on la retrouve sous des formulations voisines dans la plupart des religions, philosophies ou cultures du monde : 
-1000 : Zoroastrisme : « Tout ce qui te répugne, ne le fais pas non plus aux autres. » (religion persane, Iran), Shayast-na-Shayast 13,29.
-700 : Zoroastrisme : « La nature (humaine) est bonne seulement quand elle ne fait pas aux autres quoi que ce soit qui n'est pas bon pour soi-même. » Règle d'or du Zoroastrisme (religion persane, Iran) Dadistan-i-Dinik, 94:5.
-640 /-546 : Philosophie grecque antique : « Ne fais pas à ton voisin ce que tu prendrais mal de lui » – Pittacos de Mytilène (-640/-568) et « Évite de faire ce que tu blâmerais les autres de faire » – Thalès (-624/-546)
-600 : Taoïsme : « Regarde le gain de ton voisin comme ton propre gain, et la perte de ton voisin comme ta propre perte » T'ai Shang Kan Ying P'ien, « Le sage n'a pas d'intérêt propre mais prend les intérêts de son peuple comme les siens. Il est bon avec le bon ; il est également bon avec le méchant, car la vertu est bonne. Il est croyant avec le croyant ; il est aussi croyant avec l'incroyant, car la vertu est croyante. » – Dao De Jing, chapitre 49.
-551 /-479 : Confucianisme : « Ce que tu ne souhaites pas pour toi, ne l'étends pas aux autres. » - Confucius. « On doit aimer son prochain comme soi-même, ne pas lui faire ce que nous voudrions pas qu'il nous fît. » Règle d'or du Confucianisme (Spiritualité de la Chine) Confucius, Analecta, 15:3, 15 :23. « « Un mot qui peut valoir de règle de conduite pour la vie est « réciprocité ». N’inflige pas aux autres ce à quoi tu n’aspires pas toi-même. » (Enseignement de la Voie du Milieu 13, 3).
-538 /-332: Judaïsme :  « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Règle d'or du Judaïsme  Torah, Lévitique 19:18, dicté à Moïse durant l'Exode, après la sortie d'Egypte (-1200 /-1280). Mis par écrit vers -500-580 durant l'Exil à Babylone, selon une majorité de scientifiques.
-500 /-580 : Jaïnisme : « Juste  comme le désespoir et la douleur ne sont pas désirables pour vous, il  en est de même pour tout ce qui respire, ou existe, vit ou a l'essence  de la vie. Pour vous et pour tous, ceci n'est pas désirable, et  douloureux, et répugnant. ». Règle d'or du Jaïnisme (religion de l'Inde, et notamment de la mère de Gandhi, et une des plus anciennes religions du monde).« L’homme devrait cheminer d’une manière indifférente face aux choses terrestres et traiter toutes les créatures de ce monde comme il aimerait être traité lui-même. » Sutrakritanga I.11.33.
-500 : Hindouisme : « Ceci est la somme du devoir; ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'ils te fassent. Ne blesse pas les autres de manières que tu trouverais toi-même blessante. Ne faites rien à votre prochain que vous ne voudriez qu'il vous fasse plus tard » Règle d'or de l'Hindouïsme (religion de l'Inde), Epopée du Mahâbharata, 5:15:17.« On ne doit pas se comporter envers les autres d’une manière qui nous répugne nous-mêmes. Ceci est le cœur de toute morale. Tout le reste résulte d’une avidité intéressée. ». Epopée du Mahâbharata, 114, 8.
-500 : Hindouïsme : « L'on devrait toujours traiter les autres comme l'on souhaite être traité soi-même. » Règle d'or de l'Hindouïsme (religion de l'Inde).Hitopadesa -  Le livre du bon conseil. D'autres estimations trouvées varient de  - 3200 à + 850, date à laquelle il fut traduit en  arabe. Ce texte est considéré comme le plus ancien recueil de fables, inspirant les textes qui ont suivi dans les différentes régions du  monde, et notamment les fables d'Esope.
-500 : Bouddhisme : « Ne blesse pas les autres de manière que tu trouverais toi-même blessante. N'offensez pas les autres, de sorte que vous ne soyez pas offensés. » Règle d'or du Bouddhisme (Inde, puis Chine, Japon, Indochine, Indonésie, ...) Udana-Varga 5:18.
-395 /-353: Philosophie grecque antique : « Ce qui vous irrite dans la conduite des autres à votre égard, ne le faites pas à autrui. ».  Niroclès, roi de la ville de Salamine, à Chypre, dont deux discours nous sont parvenus.
 
-384 /-322: Philosophie grecque antique : «Il faut se comporter avec ses amis comme nous souhaiterions qu’ils se comportent avec nous». Aristote, disciple de Platon.

-30 /10 : Judaïsme : « Ce qui est détestable pour toi, ne le fais pas à ton prochain. C'est là toute la loi. Le reste n'est que commentaire. ». Règle d'or du Judaïsme Hillel, Talmud de Babylone, Shabbat 31a.

-4 /65: Philosophie romaine antique : «Distribuez vos bienfaits au peuple de la manière dont vous voudriez les recevoir». Sénèque, philosophe de l'école stoïcienne, qui fut le précepteur de Néron.

-5 /32 : Christianisme : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » Jésus de Nazareth (Mt 22. 36-40), « Toutes les choses donc que vous voulez que les hommes vous fassent, faites-les-leur, vous aussi, de même ; car c’est là la loi et les prophètes. ». Règle d'or du Christianisme Bible, Nouveau Testament - Jésus, Sermon du Mont 22:36-40, Mathieu 7:12, 22:39, Luc 6:31, Luc 10:27, textes relatant les paroles de Jésus (écrits approximativement entre 80 et 90 de notre ère).
213 /218 : Taoïsme : « Considère que ton voisin gagne ton pain, et que ton voisin perd ce que tu perds. Pour être bon l’homme doit avoir pitié des tendances malignes des autres; considérer leurs avantages comme si c’étaient les siens, et leurs pertes de la même manière.»  Lao Tseu, T’ai shang Kan Ying Pien.

570 /632 : Islam : « Comme vous voulez que les gens agissent envers vous, agissez de même avec eux. Aucun d'entre vous ne croit vraiment tant qu'il n'aime pas pour son frère ce qu'il aime pour lui-même. Règle d'or de l'Islam Hadith 13 de Al-Nawawi, dans Les 40 Hadiths d'Al-Nawawi (en 1269), Compilation de 43 paroles de Mahomet.

1870 : Bahaïsme : « Ne souhaitez pas aux autres ce que vous ne souhaitez pas à vous-mêmes. » Règle d'or du Bahaïsme (Religion originaire de Perse, puis communautés sur plusieurs continents). Baha'ullah, Kitab iq Aqdas, 148. Foi bahá'íe : « Si tes yeux se tournent vers la justice alors choisis pour ton voisin ce que tu désirerais pour toi-même. » (Kalimát-i-Firdawsíyyih.)
La Règle d'or a été exprimée pour servir de guide pour vivre ensemble en harmonie au sein de la communauté - et avec tous autres individus, communautés et régions du monde. Elle peut se formuler de manière négative, passive, ce qui est le plus fréquent, mais aussi de manière active, positive. « Fais à autrui ce que tu aimerais que l’on te fasse. » Cet énoncé est plus constructif, il ne se limite pas à nous mettre en garde contre ce qu’il ne faut pas faire, mais il nous pousse à agir, de manière individuelle ou collective.
Passif : Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse.Actif : Fais à autrui ce que tu aimerais qu'on te fasse si tu étais dans le même cas que lui.Collectif  passif : Ne fais pas ce qui rendrait le monde invivable si tout le monde (ou beaucoup) faisait ce que tu as envie de faire.Collectif  actif : Fais ce qui rendrait le monde meilleur si tout le monde (ou beaucoup) le faisait.