Projetez vos envies, elles glissent entre mes doigts, murmurez-les, mes lèvres s'entr'ouvrent,
aspirer votre air, goûter votre langue, vous embrasser goulûment, et déjà nos hanches,
et votre désir sous la toile, et mes cuisses autour de votre taille, et vos mains
sur mes fesses, et puis l'instant fragile, votre sexe dans le mien.
Mais nous resterons loin, et quand nous nous croiserons, à l'occasion,
si je garde les yeux baissés, n'allez point croire que je vous méprise.
C'est de l'impudeur de mon regard dont je me protège, de cette impatience
à vous toucher, de cette urgence de baiser qui embrase chaque instant partagé.
Mais regardez mes lèvres. Regardez mes doigts. Ils dessinent sur ma bouche
le tracé de votre langue, ma main qui serre mon bras ou enlace mon cou,
comme si c'était vous. Quand je serai seule, peut-être mes doigts mimeront
vos gestes, illusoire apaisement.
Après toutes les impudeurs, malgré tous les mots,
les soupirs et l'émoi, je reste cette femme qui rougit.
Nora Gaspard