Dans un débit de tabac. A une vente aux enchères.
Tu cherchais quelque chose. Tu déplaces
quelque chose. Je m’enfuirais. Je reste.
J’allume une cigarette. Tu t’éloignes.
Tu descends et tu montes.
Je monte et tu descends.
Cigarette. Tu marches. Je marche.
Nous marchons sur place ; tel un assassin,
je te suis à la trace.
Pépiement d’oiseau quand
tu me reproches ma naissance.
Que nous soyons là debout. Puis dans un bras mort
de la route, mon bredouillement
commence à rouler, roule en bas
de tes membres immenses
et de ce quelque chose
de victorieux et d’aveuglant,
qui n’est plus toi.
Ton refus, ce cinglement lascif,
inscrit dans la pierre me touche
au point que, mon regard – deux cailloux -
ne fait que rouler, rouler depuis
dans un cratère d’un blanc immaculé.
Mes deux yeux crépitent : mon salut.
***
János Pilinszky (1931-1981) – Cratère (Kráter, 1976) – Traduit du hongrois par Lorand Gaspar et Sarah Clair