The Strokes – Comedown Machine

Publié le 06 avril 2013 par Hartzine

Pour ne rien cacher, l’objet initial de cette chronique n’était non pas de parler de Comedown Machine, mais plutôt de l’acclamé Delta Machine des increvables Depeche Mode. Seulement, à l’heure qu’il est, le nouvel opus de la bande de Basildon n’a franchement pas besoin de compliments supplémentaires. Tout comme l’album des Strokes pourrait d’ailleurs survivre à notre avis quel qu’il soit. Mais s’il n’en a effectivement pas besoin, il mérite tout de même qu’on s’y attarde, surtout au vu du lynchage quasi général dont il fait l’objet par une presse aux allures de charognards. Car ainsi, les Strokes seraient morts, mais malheureusement pas enterrés, les New-Yorkais s’échinant à donner en spectacle leurs carcasses désincarnées. Et Comedown Machine ne serait même pas leur testament : non, non, un album aussi affligeant serait plutôt le témoignage d’un décès artistique intervenu avant même son écriture. Car on lui trouve tous les défauts, du chant de Casablancas subitement devenu inaudible aux insupportables synthés eighties en passant, bien sûr, par l’absence de compositions dignes de ce nom. Foutaises. Ou mauvaise foi de la part des mêmes qui se répandront bientôt en louanges sur le vomitif retour de Phoenix et ses claviers dignes d’un film de Belmondo de la même époque. Comedown Machine est un très bon album. Tout comme Angles, qui annonçait la couleur à venir, l’était d’ailleurs lui aussi. Les Strokes sont bien vivants, et cela s’entend plus que jamais ici, que cela soit à travers l’envie – si décriée – de Casablancas de jouer avec sa voix défaillante, ou au regard de la capacité des Américains à faire muter leur ADN pour se réinventer là où beaucoup leur demandent de se contenter de bien vieillir, en restant dans les clous (notamment ceux qu’ils devraient, d’après certains, encore arborer sur leurs blousons). Oui, le quintette sait encore s’amuser, notamment en jouant avec ses propres codes. Et c’est plutôt une bonne nouvelle. Il n’y a ici ni odeur de mort, ni même crise d’identité. Le groupe a seulement pris de la bouteille, et alors que tout le monde les croyait fâchés tout rouge, les cinq garçons semblent au contraire simplement avoir appris à collaborer. Les frictions durant le processus d’écriture, c’était au début. Aujourd’hui, ces gars-là s’amusent, et s’ouvrent par là même de nouvelles voies d’exploration sonore, quand bien même mèneraient-elles trente ans en arrière. Et ce, sans pour autant avoir perdu leurs qualités originelles, comme All the Time, étendard pop digne de leurs débuts, le prouve : la guitare de Valensi est intacte, le sens du refrain aussi. Et le shoot 50/50, s’il ne révolutionnera pas le punk, prouve au moins à ses détracteurs que Casablancas peut encore pousser une gueulante sans titiller les ultrasons. Si les Strokes ne font plus du Strokes, c’est parce qu’ils l’ont décidé, pas parce qu’ils ont perdu la recette. Et dans leur cuisine flambant neuve, ça groove parfois sévère, comme avec Tap Out, sur laquelle Michael Jackson aurait pu faire de jolis pas de danse, ou avec Welcome to Japan et son refrain catchy à souhait. Et lorsque le tempo ralentit, cela nous donne le petit bijou extatique qu’est Chances. Alors que beaucoup reprochent aux Strokes de lorgner sur le pire des 80′s, on aurait plutôt tendance à les remercier, quitte à nous rappeler cette douloureuse période, d’y injecter, comme sur Happy Ending, de la classe. Un élément qui aura cruellement manqué aux années 80, mais dont les New-Yorkais ne se seront jamais départi au cours de leur discographie.

Audio

Tracklist

The Strokes – Comedown Machine (RCA/Jive Epic, 2013)

1. Tap Out
2. All the Time
3. One Way Trigger
4. Welcome to Japan
5. 80s Comedown Machine
6. 50/50
7. Slow Animals
8. Partners in Crime
9. Chances
10. Happy Ending
11. Call it Fate, Call it Karma