Il y a un mois, j’avais failli écrire un article avec comme titre : si j’étais présidente de la république, et puis je m’étais dit qu’il fallait laisser du temps au temps, que les réformes étaient en projet, qu’elles ne demandaient plus qu’à s’ordonner.
Je m’étais dit que je laisserai du temps au nouveau Président de la république avant de venir ici faire la critique facile d’une action publique qui a besoin de temps justement pour avancer.
Sur le style de la nouvelle présidence, j’étais assez rassurée : moins de gesticulations, moins d’interventions inappropriées, un gouvernement pas trop mal goupillé même si je m’étais inquiétée de la cohérence des périmètres ministériels et du nombre de ministres.
http://lexilousarko.blog.fr/2012/06/18/ces-quelques-lecons-post-legislatives-13897588/
Et puis quelques grains de sables sont venus grippés un souhait de réformes qui nécessitait un autre tempo. Les attentes étaient immenses, peut-être trop exigeantes, mais les dix années d’opposition suffisaient à mon sens pour construire un calendrier, dresser des priorités, réformer en profondeur un Etat laissé en jachère.
Comme un sentiment de lassitude, je me suis d’abord interrogée il y a une semaine sur l’intervention télévisuelle de François Hollande.
Les éléments de diagnostic des réformes à faire sont connus : les placards des ministères sont remplis de rapports d’experts et pourtant il semble que le Président de la République ne cesse d’agir à contre-temps : comme s’il attendait l’évènement pour légitimer une action, comme s’il ne croyait pas à son cap ou à sa vision, comme si l’exercice de l’Etat avait paralysé sa capacité à décider et à trancher.
Et si l’on peut exonérer le Président de la république pour cause de mondialisation, et d’internalisation des politiques publiques , on ne peut pas excuser le manque de rythme qu’il fait peser sur certains choix politiques . Et là non plus il ne s’agit pas forcement de vitesse, mais au moins de projection, de clarification et d’ambition et de volonté dans les réformes.
Alors, naïvement peut-être, je me lance :
Moi présidente de la république, j’aurais d’abord fait voter dans les 3 mois de ma présidence une loi sur une réforme de la vie politique. Je n’aurais pas attendu ni l’affaire Cahuzac pour faire voter l’ inéligibilité des hommes politiques coupables de fraude fiscale ou de détournements de fonds publics ni l’approbation de députés ou de sénateurs sur la question des cumuls des mandats. J’aurai inclus comme l’avait fait le Canada dans cette loi programme une évaluation systématique des politiques publiques avec pour chacune d’entre elle un prévisionnel chiffré de chaque objectif ministériel.
Moi présidente de la république, dans les 6 mois de mon mandat, j’aurai réformé la fonction publique en supprimant l’ENA, remis en question le pantouflage pour éviter les conflits d’intérêts, et j’aurai fusionné les corps de même catégorie histoire de faciliter la mobilité entre les 3 fonctions publiques et une gestion moins coûteuse des carrières des fonctionnaires.
J’aurai créé une DRH interministérielle pour une meilleure gestion des recrutements et des carrières. Enfin pour mettre fin aux dépenses astronomique de la RGPP, et à l’engraissement des cabinets d’audits qui viennent aider les structures étatiques dans leur réforme respective, j’aurai créé une cellule d’appui et d’évaluation interministérielle me semble bien plus adaptée et surtout bien moins coûteuse pour les contribuables.
Sur cette question lire l’article du monde diplomatique « Quand les avocats d’affaires écrivent les lois"
http://www.monde-diplomatique.fr/2013/01/GOANEC/48589
Moi Présidente de la République, sur les réformes structurelles, plutôt qu’un choc de simplification qui est nécessaire mais qui n’est pas prioritaire, j’aurai commencé par une clarification des compétences entre collectivités et l’Etat et entre les collectivités elle-même.
La notion de service public, notion contingente, doit être interrogée au regard des besoins des citoyens, autrement elle n’a pas de sens.
Sur ces questions de la réforme territoriale, j’aurai notamment mis fin au grand Paris pour en finir avec une centralisation qui coûte trop chère à la France et qui ne profite qu’à une élite susceptible d’intégrer les grandes écoles parisiennes.
Sur la question des prestations universelles, j’aurai instauré le principe de l’équité contre celui de l’égalité. Contrairement à Jean-Luc Mélenchon qui revendique le même traitement pour tout le monde, je ne trouve pas normal que les allocations familiales, la prime de naissance ou les allocations chômages ne soient pas plafonnées en fonction des revenus des ménages.
La question de l’exemplarité n’est donc pas seulement comportementale et elle aussi politique : Chirac a longtemps joué au président absent, Sarkozy au Président trop présent, il faut que Hollande cesse d’agir rapidement à contre-temps.