On n’est pas chez Marivaux... Le jeu ne dévoile pas les secrets du cœur. Mirandoline se plaît simplement à déployer le large éventail de ses charmes, à se « mirer » dans les miroirs de sa locanda. Elle y prend certes plaisir, mais cela ne va pas au-delà du divertissement. Bonne hôtesse, elle commence par « accrocher l’attention de l’homme à abattre » d’abord par la qualité du linge qu’elle prend elle-même le soin de laver. Puis, cordon bleu à ses heures, elle mitonne un bon petit plat en sauce dont le Chevalier se régale, enfin elle accompagne le déjeuner de saillies spirituelles, signes d’intelligence et surtout de bon sens. Le Chevalier n’est pas si coriace qu’il en a l’air, et, en l’espace de deux rencontres, il tombe à ses genoux. La belle n’a plus alors qu’à abandonner la partie et à savourer l’ampleur de la victoire.
Mais elle a déclenché la sauvagerie dans son auberge. Comme une meute de loups, les mâles frustrés hurlent dans les murs de la locanda et mettent la réputation de la « locandiera » en danger. Dans la mise en scène de Jean-Marc Paquien, le chevalier déçu est tonitruant et le marquis, particulièrement veule et venteux, ne cesse de souffler le chaud et le froid et de courir dans tous les sens pour sauver sa peau.
Cette fois, Mirandoline comprend que la récréation est terminée et qu’elle doit définitivement rentrer dans le rang en épousant l’homme qui va jouer le rôle du mari, du gardien, du mirador de la prison dorée.