Les victimes d’Apollonia ont donné des procurations à des notaires, qui ne les ont annexées à leur acte d’achat. Une pratique irrégulière… et un revirement de la Cour de Cassation.
Un huissier de justice
Au bout de cinq années de procédure, le scandale Apollonia poursuit son cours. D’ailleurs le nouveau juge d’instruction reprendra les confrontations des différents antagonistes dans les prochaines semaines. En attendant, après avoir examiné le rôle des banques, on peut s’interroger sur celui des cinq notaires mis en examen, dans cette affaire.
Des procurations à la va vite
« Le principe était de nous faire signer des procurations qui permettaient au notaire de signer tous les actes à notre place avec les notaires choisis par Apollonia. Les commerciaux nous avaient bien expliqué auparavant qu’il était inutile d’en parler à notre notaire ou à notre banquier qui de toutes manières ne comprendrait rien au montage » me rappelle une victime.
« Une fois donc, la procuration signée, nous n’avions plus le contrôle de rien du tout. Le notaire signait pour nous et pour la banque, l’acte de prêt et l’acte de vente. Comme nous n’avons jamais reçu ces actes, il a fallu les réclamer auprès des notaires, lorsqu’on s’est rendu compte du problème ».
La plupart du temps, les signatures avaient lieu dans des hôtels, chez les clients ou sur leur lieu de travail, histoire que les clients n’aient pas vraiment le temps de réfléchir. Si la signature se déroulait chez le notaire, il ne restait pas plus de 10 minutes avec les clients et ne donnait aucune explication. Parfois le notaire n’était pas présent en personne. Et ce, même si la signature sur la procuration portait son nom, sans aucune référence à une délégation quelconque.
- Des épargnants dépouillés
Dans la mesure où les victimes d’Apollonia ne peuvent plus rembourser leurs emprunts, certaines banques les attaquent pour saisir des biens financés, mais aussi leurs comptes bancaires, leurs comptes professionnels, et même leurs meubles ! Quitte à prendre une hypothèque sur la résidence principale des investisseurs.
“ Pour ce faire, ces banques saisissent la justice en faisant usage de faux, d’actes rédigés par des notaires mis en examen pour faux en écritures publiques, escroquerie en bande organisée alors que les victimes ne peuvent pas utiliser pour leur défense le contenu du dossier pénal accablant pour les banquiers et les banques ” m’explique un proche du dossier.
Pour tenter de bloquer ces actions de saisie, les investisseurs ont démontré devant le tribunal, l’irrégularité des actes notariés. Raisons invoquées : l’absence d’annexion des procurations à l’acte de prêt et la signature de nombreux actes par des secrétaires alors qu’une procuration avait été donnée à un notaire ou à un clerc de notaire.
Une procédure en Cassation en 2 temps
Conformément à l’article 8 de la loi, 5 arrêts de la 2eme chambre de la Cour de Cassation du 7 juin 2012 confirment qu’en cas de procuration, elle doit être annexée à l’acte ou qu’il doit en être fait état dans l’acte. Si tel n’est pas le cas, l’acte perd son authenticité et son pouvoir exécutoire. Par conséquent, les banques ne peuvent plus saisir les investisseurs.
Mais le 21 Décembre 2012, la chambre mixte de la Cour de Cassation désavoue l’avocat général de la Cour de Cassation, et la 2eme chambre de cette même Cour, en cassant ces 5 arrêts. « Surprenante, cette décision autorise en fait les banques à contourner la loi, les actes invalides retrouvant leur authenticité et leur pouvoir exécutoire, les banques peuvent saisir. Il semble que cette décision impacte des milliers d’actes : les enjeux sont donc très importants » constate Claude Michel, Président de l’Asdevilm.
Je m’explique difficilement ce revirement de la Haute juridiction, dans ce dossier qui frôle le milliard d’euros de préjudice. Quant aux victimes, elles souhaitent comprendre, pourquoi ce revirement et pour qui ?
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