Cette étude américaine repose la question du bénéfice d’une vaccination universelle des enfants contre la varicelle. Car étant recommandée en routine aux Etats-Unis, l’expérience américaine est source d’enseignements pour la France où la vaccination des enfants en routine n’est pas recommandée. Si 2 vaccins monovalents contre la varicelle sont actuellement disponibles en France, si 2 vaccins combinés rougeole-oreillons-rubéole-varicelle ont eu leur AMM pour l’UE, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a en effet confirmé la non-recommandation de la vaccination universelle des enfants contre la varicelle. Ces nouvelles données américaines, publiées dans Pediatrics, sont plutôt en faveur de la vaccination, à condition d’atteindre un taux de couverture d’au moins 90%.
La varicelle est une maladie infantile fréquente liée à la primo-infection par le virus varicelle-zona. Le plus souvent bégnine et guérie en 1 ou 2 semaines, la varicelle peut cependant entraîner chez certains groupes de personnes plus vulnérables, des complications telles que des surinfections cutanées, des infections pulmonaires ou des atteintes neurologiques. C’est ici que la vaccination peut trouver son « intérêt ». Enfin, chez la femme enceinte, le risque est de contaminer le fœtus qui peut développer une infection néonatale sévère.
En France, 2 vaccins monovalents contre la varicelle sont actuellement disponibles (Varivax® et Varilrix®) mais la vaccination n’est pas recommandée en routine, à la fois en raison du caractère généralement bénin de la maladie, de l’avantage d’avoir eu la maladie avant la grossesse et surtout du taux de couverture vaccinale (au moins 90 %) qui serait nécessaire pour éviter des résurgences de la maladie à l’âge adulte. De plus, en France, l’incidence de la varicelle n’augmente pas (Voir courbe ci-contre). Les Etats-Unis nous ont plus ou moins inspiré cette politique vaccinale : En effet, aux États-Unis, lieu de l’étude, le vaccin a été introduit en 1995, puis recommandé en routine pour les enfants. Avant cela, l’incidence de la varicelle était à plus de 90% chez les enfants et jeunes jusqu’à l’âge de 20 ans. Mais si cette incidence a bien diminué jusqu’en 2000, en revanche, à partir de 2004, l’incidence de la varicelle a recommencé à augmenter et en particulier, chez les enfants vaccinés, environ 8 ans après la vaccination. Cette nouvelle étude américaine suggère néanmoins, avec un recul de quelques années supplémentaires, le bénéfice de la vaccination en routine aux US et même du schéma (actuel) à double dose.
L’étude américaine, de 14 ans, a suivi 7.585 enfants vaccinés en 1995, âgés alors d’1 à 2 ans, pour évaluer l’efficacité à long terme du vaccin et son impact sur l’épidémiologie de la varicelle et l’herpès zoster (zona). Les chercheurs ont également observé l’impact de la deuxième dose du vaccin contre la varicelle, introduit en 2006 aux Etats-Unis.
· Un taux d’incidence de la varicelle réduit de 9 à 10 fois : Sur l’ensemble de la période de suivi, le taux d’incidence de la varicelle s’est avéré de 9 à 10 fois inférieur aux taux correspondants chez les enfants non vaccinés du même âge. Le taux d’efficacité vaccinale global s’élevait alors à 90%.
· Très peu de cas de résurgence sévères dans les 14 années ayant suivi la vaccination : Plus intéressant, 1.505 cas de « résurgence » de la varicelle ont été signalés chez ces 7.585 enfants au cours des 14 années qui ont suivi leur vaccination contre la varicelle. Très peu de cas ont été considérés comme sévères, soit avec plus de 300 « lésions » (28 sur les 7.585 enfants et les 1.505 cas) et l’évolution possible de la forme modérée à sévère de la maladie a été empêchée par une nouvelle dose de vaccin.
· L’efficacité d’un schéma à 2 doses : Aucun cas n’a été rapporté après la deuxième dose. Ensuite, le taux d’incidence de la varicelle a diminué progressivement au fil du temps sans aucune augmentation au cours des 14 années de suivi. L’augmentation de l’efficacité du vaccin avec le temps s’explique, selon l’auteur, par une bonne immunité collective. La baisse continue des cas de résurgence observée ensuite, en 2008 et 2009, pourrait être le résultat de la mise en routine de la deuxième dose en 2006, une seconde dose administrée entre 4 et 6 ans aux Etats-Unis. Enfin, le risque de zona n’a pas augmenté chez les enfants vaccinés.
Le Dr Randy Bergen, chef de clinique externe de pédiatrie au Kaiser Permanente revendique donc l’efficacité communautaire du vaccin contre la varicelle chez les jeunes, mais à condition, comme pour tout vaccin, que la couverture vaccinale soit élevée. En particulier, le dossier de santé électronique peut permettre d’identifier rapidement les enfants qui n’ont pas été vaccinés, et de faire le nécessaire.
Source : Pediatrics online April 1, 2013 doi: 10.1542/peds.2012-3303 Long-term Effectiveness of Varicella Vaccine: A 14-Year, Prospective Cohort Study (Vignette CDC varicella-zoster virus)et Avis du Haut Conseil de la santé publique du 5 juillet 2007 relatif aux recommandations de vaccination contre la varicelle, Calendrier vaccinal 2012