2 avril Improbable instant Le moment qui m'intrigue le plus est celui où je vais m'endormir. Personne ne peut se vanter de le saisir, comme personne ne vit l'instant où il va mourir. Tout du moins personne n'a jamais été en état de le raconter. Le voisin du dessous est un peu bruyant, tous les jeudis il fait la bringue avec les potes. Ce n'est pas la musique de lobotomisés qui me dérange, mais j'attends avec angoisse l'instant où tout va basculer. Vers l'horreur. L'alcool. L'agressivité les coups de poing les coups de gueule. Quoi faire de rationnel à cet instant ? descendre en pyjama calmer le jeu et me prendre une poire, appeler la Police, avec laquelle je n'ai pas de rapport particulièrement amoureux pour me faire mal voir par toute la cage d'escalier. Non. Je m'enfonce plus avant dans ma couette. J'attends ce moment avec une angoisse moite et il m'empêche de m'endormir, même lorsqu'il n'est pas précédé par cette musique de sauvage. Cette attente se mue en peur, en peur Pavlovienne, vers deux heures du matin, je salive de peur, même lorsqu'il n'y a pas de lumière sous la porte du voisin, témoin de son absence...
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