Et la suite de la réplique donne « Par de pareils objets les âmes sont blessées,et cela fait venir de coupables pensées ».
Le Tartuffe de Molière, acte III, Scène 2.
Je conseille à bon nombre de relire cette pièce du répertoire littéraire français, elle apprendrai beaucoup à tous les vieux réactionnaires obscurantistes auxquels je fais face bien trop souvent.
Pourtant, on est toujours au même stade, et cette phrase est d’une très grande actualité. Il n’y a qu’à voir tout ce que le mouvement FEMEN se prend sur la tête: Alain Soral parle même de « putes ukrainiennes ».
Que l’on remette bien les choses en place.
Lorsqu’il s’agit de parler de la matérialisation des femmes dans la publicité ou de leur hypersexualisation à des fins commerciales, on n’entend personne parler de nudité, cela ne choque absolument personne. Chose que nous avons eu l’occasion de dénoncer à plusieurs reprises. Mais lorsqu’il s’agit d’un mouvement politique contestataire, vous avez des voix qui s’élèvent de toute part et qui jouent les vierges effarouchées. « Mais depuis quand va-t-on acquérir sa liberté en montrant ses seins? » Preuve en est que la triste réalité c’est que les hommes ont main-mise sur le corps des femmes (et ce n’est pas un vulgaire jeu de mots), dès qu’il s’agit du corps qui ne sert pas à leur plaisir sexuel, là il faut le cacher, le dissimuler, il appartient au domaine du privé, au domaine de la chambre à coucher. Evidemment, les femmes à moitié nues dans le salon de l’automobile ou pour la dernière publicité du parfum BlackXS que monsieur déshabille d’un claquement de doigts ça ne dérange pas, car ça conforme monsieur dans sa vision et sa considération de le femme: elle doit se taire, être belle et répondre à ses plaisirs.
Sauf que malheureusement pour ces damoiseaux, les FEMEN ne sont pas de cette graine là. Dès qu’une femme a le culot d’assumer sa sexualité, de se réapproprier son corps en montrant qu’elle est libre de faire le choix de l’exhiber ou pas, mais surtout de montrer qu’il n’est l’objet d’honneur, de morale ou de fierté de personne, alors là, ça crée un tollé général, tout le monde s’en offusque.
Quant à l’appellation de « pute ukrainienne », je ne peux que faire le constat du manque d’arguments et de pertinence de Monsieur Soral à ce sujet. Il est bien trop facile de conclure qu’une femme est « une pute », dès lors qu’elle fait le choix de prendre en main son destin et d’avoir conscience de sa liberté humaine. Je vous pose la question, depuis quand montrer ses seins est-il synonyme de manque de dignité. Je vous rappelle seulement que vous avez presque toutes et tous été nourri-e-s par ces seins et qu’ils ne sont en rien un objet d’un quelconque honneur, fierté ou je ne sais quelle autre supercherie machiste.
Le problème est que les attributs féminins ont été sacralisés, mais par qui? Les hommes évidemment, on en revient à ce que je disais tout à l’heure, ils s’illustrent à nouveau dans leur magnifique capacité à tout confisquer: y compris le corps des femmes. Car c’est bien de cela dont il s’agit, en acceptant que, oui effectivement, ce n’est pas très bien de montrer ses seins pour dénoncer le patriarcat, le sexisme, la misogynie, les viols, l’esclavage moderne par la prostitution, c’est non seulement fermer les yeux sur des problèmes graves qui touchent absolument toutes les sociétés, mais c’est de surcroît à nouveau un gain de cause pour les hommes qui s’érigent en propriétaires du corps de la femme en acceptant de ne le montrer que quand cela plait à ces messieurs.
Une hypocrisie dominante qui vise d’un côté à aduler le corps érotique des femmes mais seulement lorsqu’elles servent le plaisir masculin et de l’autre à vouloir le camoufler dès lors qu’il se retourne contre son manque d’éthique. Mais justement, comme le suggère la suite de la réplique du Tartuffe de Molière, n’est-ce pas qu’effectivement, il est indéniable de noter que quoi que l’on dise, les hommes sont animés par un désir sexuel qui les dépasse et qui fait qu’ils veulent à tout prix être maîtres du corps de la femme. En effet, dès lors qu’ils ne sont plus propriétaires de ce corps, il ne peuvent plus se satisfaire à leur guise. Or, ce que les gens ont du mal à comprendre, c’est que le corps des femmes est confisqué par les hommes dans cette optique là, et faire le choix de le montrer ou pas et d’en faire ce que bon lui semble c’est ne plus en être dépossédée comme ça l’est depuis bien trop longtemps.
Une femme qui réfléchit et qui a conscience d’elle même fait peur aux hommes. Mais il faut comprendre que le féminisme ce n’est pas de la vulgarité, ce n’est pas une lubie, ce n’est pas la haine de l’homme, non en soi les féministes ne sont pas des amazones: messieurs je vous aime quand même, il s’agit simplement d’une lutte intégrée à la lutte des classes. Une lutte des opprimé-e-s contre les oppresseurs.
Je termine en envoyant mon plus grand soutien à toutes me femmes à travers la planète qui se battent pour leur droits ou qui ne peuvent le faire, à toutes les femmes otages de la tradition et de la religion, à toutes les femmes en général en particulier à Amina, actuellement séquestrée par sa famille « pour les avoir déshonnorés » en ayant eu le tort de réaffirmer que son coprs n’était la moral de personne et à toutes les autres victimes de ce genre d’horreurs. Le 4 avril prochain d’ailleurs, les femmes du monde entier manifesteront leur colère en soutien à Amina et à toutes ces autres femmes, seins nus, ou pas. Libres à elles, à nous.
Révolutionnairement vôtre.
Amina alias La Robe Rouge.