02 avril 2013
Fils de marin à l’allure hirsute d’un loup de mer blond, Eugène Boudin (1824 – 1898) est le « Roi des ciels » pour ses pairs.
Autodidacte, il commence sa carrière comme papetier, puis abandonne cette première activité pour se consacrer pleinement à la peinture. Il a pour amis Constant Troyon, Jean-François Millet, Thomas Couture, Eugène Isabey, Gustave Courbet, Jongkind, Charles Baudelaire et surtout Claude Monet, son cadet de quinze années, qui dira « Je dois tout à Boudin ».
N'est-il pas, avec Saint-Vulfran d'Abbeville, celui qui donne à Monet l'idée des "séries" ?
Voici donc la première rétrospective à Paris depuis 1899 de ce peintre de plein vent précurseur de l’impressionnisme (il participera à leur première exposition en 1874) qui ne se veut appartenir à aucun courant. Il peint inlassablement sur le motif, commence à gagner sa vie en répondant à des commandes de marines à la manière des flamands, peintures très demandées par la clientèle.
Deauville et Trouville viennent d’être créées de toutes pièces. Les groupes de belles dames y viennent en crinolines, agglutinées bien emmitouflées sur la plage de Trouville à marée basse, en plein soleil ou au soir couchant, papotant sur des chaises paillées … Des toilettes somptueuses lors de l’inauguration du casino de Deauville, à la marquise de fonte délicatement posée sur de minces colonnes, des vues du port d’Honfleur en fête, de navires à demi échoués, de l’église Sainte Catherine où se pressent pour moi bien des souvenirs de famille.
Car Honfleur et son musée constituent aussi pour nous un ancrage familial et nous sommes particulièrement heureux de retrouver à Paris les peintures d’Eugène Boudin, dont un certain nombre prêtées par de grands musées étrangers et jamais vues en France : Toronto, Québec, Madrid … ont participé à cette belle exposition qu’il faut aller voir, malgré la foule qui s’y presse.
Des paysages de la Normandie à la Bretagne, de la côte flamande (la plage de Berck, Anvers) à la côte d’Azur (Antibes, Villefranche), sans oublier le trépidant port de Bordeaux et la langueur du quai des esclavons à Venise : la lumière changeante et les ciels immenses sont les marques de fabrique de ce peintre tout en sensibilité et modestie.
Un maître du rivage – sa dernière image de la pointe du Raz est d’une extraordinaire modernité - du vent dans les mousselines et des successions de nuages à ne manquer sous aucun prétexte !
Au musée Jacquemart –André, 156 boulevard Haussmann, jusqu’au 22 juillet, 11€.