Humour : La cuisine de Fellag samedi soir au Comœdia

L’humoriste kabyle a mitonné un spectacle intelligent, drôle et (im)pertinent (photo : Sylvain Bocquet)

Dans le « Petit Choc des Civilisations », son nouveau spectacle, l’humoriste surfe joyeusement sur les graves sujets de notre temps

Selon un sondage, le couscous serait le plat préféré des Français. « Faut-il y voir l’aveu détourné d’une affection toute nouvelle des Français envers les Maghrébins ? » s’interroge Fellag dans son nouveau spectacle. Dans ce Petit Choc des Civilisations, le comédien, humoriste et écrivain kabyle coiffe une toque et transforme l’espace en « cooking show », une cuisine gigantesque, pour livrer aux Français les secrets de la préparation du couscous afin de sceller « la fraternité retrouvée ». Tout en mitonnant ce fameux couscous, le comédien-humoriste kabyle stigmatise « les grands riens et les petits touts » qui sèment la zizanie entre les hommes.

C’est l’appel à un apéro géant saucisson et pinard lancé en 2010 pour contrer les prières des musulmans dans les rues de La Goutte d’Or à Paris qui lui a inspiré ce spectacle. En riposte, des gens de l’autre bord avaient proposé d’organiser un apéro géant hallal et thé à la menthe. « Je m’étais dit à l’époque, se souvient le comédien, que ce genre d’événements pourrait conduire à de graves conséquences… comme il pourrait se transformer en une immense farce moyenâgeuse digne de Dari Fo. Vous imaginez les uns et les autres cachés derrière des tranchées et se balançant des merguez et des andouillettes… Ce serait formidable. Ça remettrait les choses à leurs justes proportions ».

En installant sur scène le décor d’une terrasse ensoleillée à Alger et en jouant avec une partenaire dans Tous les Algériens sont des mécaniciens, Fellag s’était déjà ouvert une voie nouvelle pour inscrire ses spectacles dans une forme plus théâtrale. Dans le Petit Choc des Civilisations, Fellag mime encore mais il doit se coltiner cette fois avec tout ce que propose et impose la manipulation des objets. Dans cette cuisine qui constitue le décor, Marianne Epin a mis à la disposition du comédien un plan de travail sur lequel, elle explique, il pourra jouer tous les airs, s’amuser avec les légumes, jongler avec les marmites et faire dégager odeurs et vapeurs. Les légumes du couscous sont tous différents – qu’ont de commun une carotte, un navet ou une courgette ? – et pourtant, tous ensemble, unis dans la même marmite, quel mets savoureux et unique ils concoctent! Métaphore d’une humanité en devenir qui doit apprendre à pratiquer le monde par l’expérience de la différence et cheminer vers une confiance réciproque… C’est cela, l’amour. Le théâtre de Fellag ne cesse de nous le rappeler.

Théâtre Comœdia, samedi 6 avril à 21h. Réservation-location au 04 42 18 19 88.