LAPALUX
Nostalchic
Brainfeeder (2013)
Autre Petit Prince de la musique électronique, Lapalux aka Stuart Howard aurait pu n’être qu’un bidouilleur de plus, seulement voilà, comme certains alchimistes de sa génération, il a trouvé ce subtil mélange, cet équilibre si rare qui fait d’un disque une pierre philosophale.
Le jeune anglais publie son premier opus intitulé « Nostalchic » signé sur le label de Flying Lotus : Brainfeeder, basé à Los Angeles. D’autres choisissent le craquement du vinyle comme toile de fond pour leur tissu sonore, mais Lapalux lui, a préféré le souffle et les irrégularités de la cassette. Cette fragilité du son enregistré sur bande magnétique, ce côté éphémère presque volatile, permet au producteur de manipuler les textures et de dompter à souhait les sonorités qu’il emprunte à la black music et aux musiques électroniques de pointe (IDM). Tout y passe, de la house down tempo sur « Swallowing Smoke », au glitch-hop de « IAMSYS », en passant par la soul sensuelle et adipeuse de « One Thing » ou au post dubstep de « Flower ». La patte du patron FlyLo est présente bien sûr, mais on devine aussi l’influence des maîtres du genre Glitch, Machinedrum ou Prefuse 73.
Et dans ce dédale de beats et de samples, de clic et de clac, d’expérimentations en tout genre et de voix déformées par un dictaphone torturé, se distinguent trois titres essentiels, « Guuurl », «Without You » et « Walking Words ».
« Guuurl » s’ouvre avec une petite ritournelle enivrante plaquée sur un synthé épuisé, puis vient une voix auto-tunée façon r&b, un loop discret de Darbuka et enfin une explosion subaquatique de beats sensuels qui nous éloignent du dancefloor en nous accompagnant jusqu’au pied du lit. « Without You », quant à lui, nous transporte dans un univers proche de celui de James Blake dans son album éponyme de 2011, où mélancolie, douceur et chaleur d’une soul mis au ralenti se marient à l’implacable rigueur synthétique et inquiétante de la machine. Ressemblant à un vieil enregistrement ayant pris l’eau, le titre met l’auditeur en apesanteur, bercé par la voix d’ange de la moitié du duo folk Peter & Kerry, la belle Kerry Leatham. Enfin « Walking Words » nous replonge dans la riche tradition broken beat de la scène anglaise, Stuart y pousse la chansonnette de sa voix fragile et délicate, nous rendant nostalgique de la fin des années 90, quand la jungle faisait encore vibrer nos tweeters.
Bref, « Nostalchic » est une véritable réussite et un premier essai au long format plutôt concluant pour Lapalux.