Seulement quelques mois après avoir adoubé le financement participatif, les autorités britanniques poursuivent leur travail de sape d'un secteur bancaire qui a trop longtemps ronronné sans jamais être inquiété. Ainsi, à partir du 1er avril 2013, il devient infiniment plus facile de créer un établissement bancaire au Royaume-Uni. Vive la concurrence !
C'est à l'issue d'une revue formelle des barrières existantes pour les nouveaux entrants que la Banque d'Angleterre et la "Financial Services Authority" (FSA, "Autorité des Services Financiers") ont décidé une réorganisation en profondeur des structures en place, ainsi que des exigences et des processus d'autorisation. L'objectif est tout simplement de favoriser la concurrence face aux institutions financières historiques, en facilitant la création de startups dans le secteur.
Outre la séparation de la FSA en deux organismes séparés, les changements apportés à la réglementation actuelle portent sur deux points fondamentaux : la réduction des exigences de capital et l'accélération du traitement des demandes d'agrément.
Dans un contexte de renforcement général des règles prudentielles, en particulier avec le cadre de Bâle III, le premier axe d'évolution peut surprendre. L'explication est pourtant simple : les autorités britanniques adoptent un nouveau point de vue, en considérant que les défaillances des banques sont acceptables (elles voulaient peut-être dire inévitables ?) et que la priorité est donc de mettre en place les mécanismes qui évitent des conséquences dramatiques dans ces cas-là.
Pour les jeunes pousses de la finance, dont le risque qu'elles portent est considéré comme limité (en volume, sinon en probabilité), cette approche conduit à non seulement supprimer les exigences de capital exceptionnelles (supérieures à celles des banques historiques) auxquelles elles devaient se plier jusqu'à maintenant, mais également à leur appliquer le "Core Tier 1" minimal prévu par le régime Bâle III (4,5% contre 7,5% à 9% pour les établissements en place). En parallèle, les exigences de liquidité seront également réduites.
En ce qui concerne le processus d'autorisation, plusieurs améliorations sont prévues. Tout d'abord, la constitution du dossier de demande sera simplifiée et un support actif sera fourni aux candidats dans les phases préliminaires (avec, par exemple, une session de "challenge" du projet). Plus important, pour les entreprises prêtes à démarrer (disposant du capital et des infrastructures – notamment informatiques – requis), la décision sera rendue sous 6 mois.
Autre cas prévu, de manière très pragmatique, les startups qui n'ont pas encore mobilisé toutes les ressources nécessaires peuvent aussi obtenir une autorisation dans le même délai, sur la base de leur modèle d'affaire et de l'identification de leurs principaux dirigeants. Cette autorisation sera assortie d'une réserve mais permettra néanmoins aux entrepreneurs de procéder à une levée de fonds ou à la mise en œuvre d'un système informatique avec une certaine confiance en l'avenir du projet.
La démarche du gouvernement britannique est extraordinairement audacieuse mais aussi diablement intelligente, si elle suscite des vocations. Car, plutôt que de continuer à accroître la pression règlementaire sur les banques existantes, au risque de les mettre artificiellement en difficulté, l'allègement des contraintes sur les nouveaux entrants va à la fois introduire de nouveaux modèles dont on espère qu'ils soient plus vertueux que les précédents, mais également inciter tout le secteur à évoluer... Une pression constructive, en quelque sorte.
En arrière-plan, il est aussi possible d'imaginer une vision stratégique à l'œuvre en prolongement de cette initiative. Si Londres veut rester une place financière de premier plan (au moins en Europe), quoi de plus naturel que de stimuler l'émergence de nouveaux acteurs et une (saine) émulation entre "anciens et modernes" ?