Devezh mat, Metz, mont a ra ? L’un des faits les plus marquants, médiatiquement parlant, à avoir suivi la démission de Jérôme Cahuzac, aura été l’altercation entre Jean-Michel Apathie et Edwy Plenel ; voilà qui me donne l’occasion d’inaugurer cette galerie de portrait avec le premier d’entre eux, au risque de faire un peu dans le facile…
« Les journalistes n’arrêtent pas de présenter les manifestants comme des terroristes et ça vous étonne que les gens ne les aiment pas ? » « Concernant l’élection de Barack Obama, je me demande si on n’en fait pas un peu trop, en France, à propos d’une élection qui se déroule dans un pays situé à au moins de 7.000 kilomètres de chez nous ! » « Jean-Pierre Elkabbach et Bruce Toussaint des journalistes ? Il faut être complètement maboul pour croire ça ! » Ainsi les Guignols de l’info aiment-ils à faire parler leur voisin d’antenne Jean-Michel Apathie pour en faire leur porte-parole de leurs critiques des médias ; et ainsi vont certains commentaires, de plus en plus rares en tout cas, qui gratifient l’éditorialiste de RTL et de Canal+ de journaliste impertinent, pourfendeur de l’establishment politico-médiatique.
D’où lui vient exactement cette flatteuse réputation ? Sont-ce sa faconde et son accent typiques du sud-ouest, qui détonnent dans un paysage médiatique formaté et peuvent rassurer le public habitué à la froideur parisienne des autres éditorialistes ? Est-ce son physique assez ingrat, à mi-chemin entre Henri Krasucki et Jean-Claude Gaudin, qui le rend plus « vrai » par rapport à des playmobils comme Pujadas ou des play-boys comme Roselmack ? Est-ce sa jeunesse difficile (il a quitté l’école à 14 ans et a vécu de petits boulots avant de reprendre ses études pour décrocher son bac à 24 ans) qui plaide en sa faveur, indiquant qu’il n’est pas un aparatchik ? Ou, plus simplement, sont-ce ses employeurs qui ont développé cette image à des fins plus ou moins promotionnelles ?
Une chose est certaine : de même que Jesse James ne méritait pas la réputation de Robin des Bois américain que la chanson a contribué à établir, Jean-Michel Apathie est à des lieues de mériter d’être classé ailleurs que parmi tous les autres chiens de garde de l’establishment politico-médiatique : il a déjà été pris en flagrant délit de connivence avec le pouvoir politique en recevant un SMS de François Fillon, alors premier ministre, sur le plateau du Grand journal de Canal+. Je me souviendrai longtemps aussi de son analyse d’une interview de Valéry Giscard d’Estaing au cours de laquelle celui-ci a avoué qu’il n’aurait pas aboli la peine de mort s’il avait été réélu en 1981 : malgré l’importance de cet aveu du point de vue de l’Histoire, Apathie n’avait retenu de cette interview de l’ancien président que l’évocation de ses aventures sexuelles clandestines, trahissant du même coup un état d’esprit qui s’intéresse davantage aux cancans de cour qu’aux vrais problèmes de société, soit par incompétence soit par souci de protéger les puissants.
« Faible avec les forts, fort avec les faibles », cette périphrase qui qualifiait les personnages joués par Louis de Funès ainsi que l’ancien président Sarkozy, voilà une expression qui sied à ravir au sieur Apathie, dont la vacuité des analyses, qui brillent par leur manque total d’imagination et leur fidélité indéfectible aux dogmes néolibéraux, n’a d’égale que la disproportion de son ego qui le conduit à couper presque systématiquement la parole à tout interlocuteur qui aurait le malheur de commencer à le contredire ; pour les mêmes raisons, il ne manque pas de fustiger les journalistes qui font un vrai travail d’investigation au lieu de se contenter de poser des questions comme on pose les plats, comme Edwy Plenel en a fait l’expérience quand Médiapart a commencé à faire part d’indices accusant Jérôme Cahuzac ; le choc récent des deux personnalités nous a donné l’occasion de voir quelle agressivité est capable de déployer un orgueil démesuré aux abois quand il est pris au piège de ses propres erreurs. S’il est vrai, comme l’affirmait Desproges commentant l’entartage de BHL, que c’est en mettant un cuistre en difficulté qu’on a l’assurance de le voir montrer sa vraie nature de cuistre, alors Apathie le faux trublion remporte haut la main de titre de vrai cuistre… Kenavo, les aminches !
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