Il se disait autrefois à la gauche de la gauche qu’un ministre communiste n’était pas nécessairement un communiste ministre. A fortiori François Hollande, président de la République aujourd’hui mais social-bureaucrate bon teint depuis des décennies, devrait pouvoir, sans se faire houspiller, déclarer comme il l’a fait hier soir sur France 2 qu’il « n’est plus un président socialiste ». D’ailleurs, l’usage de « pas » eût été préférable à celui de « plus » qui suppose qu’il le fut un temps.
Les procès en déviance idéologique instruits sur Libé ou Médiapart et repris par Liennemann ou Mélenchon sont donc conduits sur de fausses bases, ce qui n’a rien d’étonnant s’agissant d’instructions menées par une procurature d’essence stalinienne.
Reprocher à Mou-Président d’endiguer la hausse des impôts et les dépenses publiques est d’abord une erreur factuelle puisque les derniers chiffres de l’Insee démontrent que ni les uns ni les autres n’ont cessé d’augmenter. Les économies budgétaires réellement décidées par Hollande sont bien faibles et bien floues.
Jamais les gardiens sourcilleux du temple post-marxiste, qui n’ont que l’expression « casse des services publics » à la bouche, n’expliquent d’ailleurs comment ils s’y prendraient pour financer une aggravation du grand gaspillage clientéliste qu’ils confondent avec la gauche, gangrenés qu’ils sont par les intérêts syndicaux dans la fonction publique. Iront-ils solliciter les marchés financiers en brandissant le statut de la fonction publique et les pensées de Stéphane Hessel en guise de bibles progressistes pour les convertir ? Se saisir des assurances-vie des Français ? Poster des gardes-rouges aux frontières pour tirer à vue sur les passeurs de capitaux ?
Hollande n’est ni vraiment de droite ni vraiment de gauche, c’est un manipulateur en pharmacie dans le laboratoire de l’énorme bureaucratie qui régit la France dans les moindres aspects de la vie de ses habitants. Il dose au mieux, change le moins possible pour que tout change encore moins, évite de chatouiller le monstre qui nous gouverne et dont il a peur. Il prie pour que le peuple continue de supporter son sort sans ruer.
Ses détracteurs ne lui en veulent qu’à proportion de leur naïveté affichée. Croire qu’on pourrait taxer des revenus à 75 % dans une économie ouverte est une aberration, penser qu’un système de retraite par répartition peut se protéger de la dégradation du rapport entre le nombre de cotisants et de pensionnés est une imbécillité mathématique.
Bien sûr, chers révolutionnaires orthodoxes, qu’Hollande ne fait guère différemment de Sarkozy, qu’il se contente de débloquer les fonds de participation, d’augmenter la TVA, de geler le barème de l’impôt sur le revenu. L’un comme l’autre sont dépendants d’une Europe berlinoise et d’un système corporatiste qu’ils n’ont pas eu le courage d’affronter, la première étant en accord avec le dogme de la droite et le second avec celui de la gauche. Mais que pouviez vous croire ?
Lancer une vraie réforme de la France, ce serait affronter les milieux les plus pugnaces de la politique professionnelle et de l’administration d’un côté et de l’establishment financier de l’autre. C’est à dire se mettre les plus puissants à dos pendant un certain temps.
Espérer qu’Hollande ait eu le moindre projet d’engager pareil bras-de-fer est une triste plaisanterie. Dans ces conditions, qu’il enterre la PMA ou s’en tienne à l’accord entre le Medef et la CFDT en matière de flexibilité du code du travail relève de l’épaisseur du trait. Tout son dessin est tracé dans le cadre de la pensée dominante qui nous embrasse pour mieux nous étouffer.
Ainsi, le grand paradoxe des anathèmes lancés par la « gauche de la gauche » tient-il au fait que, dépendante d’intérêts qu’il faudrait pourtant combattre pour que la France aille mieux, à savoir l’énorme bureaucratie enkystée dans les collectivités locales, l’Etat et les entreprises publiques, cette arrière-garde révolutionnaire est nécessairement conduite à tenir un discours incohérent, formuler des propositions inachevées, se borner à des incantations anti-riches et, en définitive, renforcer le mollusque social-démocrate posé sur son rocher. Elle n’en est qu’un pseudopode.
Les dénonciations de Libération et des autres ne servent à rien. Elles sont un bruit de fond, la grosse caisse de l’orchestre du Titanic-Pédalo qui tonitrue d’autant plus que le cri des soutiers commence à monter.
Nous lire sur Atlantico ICI.