Voici quelques retours d'expériences des acteurs de la Filière Textile Alsace, ayant participé à l'opération.
Pourquoi un affichage environnemental ? Le contexte national
L’objectif de l’affichage environnemental est de permettre au consommateur d’intégrer des informations concernant les impacts environnementaux générés par un produit tout au long de son cycle de vie. Ce doit être un critère de décision dans son acte d’achat. Il doit permettre la comparaison entre produits d’une même catégorie et, lorsque cela s’avère pertinent, entre catégories de produits. L’objectif complémentaire est d’inciter les entreprises à améliorer la performance environnementale de leurs produits sur la base d’indicateurs précis.
Cette expérimentation est une première mondiale. L’affichage environnemental, au premier rang desquels figure le bilan carbone des produits, peut être un outil majeur de la transition écologique, pour améliorer l’information des consommateurs et ainsi orienter la consommation et la production. Il s’agit d’un levier au service de la compétitivité économique et écologique des entreprises.
Le bilan de l’expérimentation prévoyait trois rapports sur les retours d’expériences de tous les acteurs de l’affichage environnemental : le rapport des consommateurs a été rendu en décembre 2012. Celui sur l'expérimentation des entreprises a été remis en février 2013. Le rapport de la Direction Générale de Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) sera rendu prochainement. L’ensemble de ces documents figureront dans le rapport au Parlement prévu par l’expérimentation.
Le 18 février dernier, Delphine BATHO, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, a ouvert la perspective d’une généralisation de l’affichage environnemental, après une première phase durant laquelle il pourrait être d’abord volontaire. L’objectif est d’anticiper une généralisation européenne, et que la France soit un leader mondial dans ce domaine. Il faut au préalable lever les nombreux obstacles techniques, standardisation de l’affichage comme des référentiels, et définir des modalités adaptées pour chaque secteur en veillant à l’information claire et lisible du consommateur. Dans cette optique, un programme de travail a été présenté. Il associera au Commissariat Général du Développement Durable les parties prenantes du Conseil National de la Transition Écologique. Des propositions concrètes sont attendues pour l’automne.
Une mobilisation forte pour une 1ère mondiale
168 entreprises volontaires, de tous secteurs et de toutes tailles, se sont prêtées pendant un an à cet exercice ambitieux. La mobilisation de ces entreprises a dépassé les espérances, s’agissant d’un contexte très novateur et d’une première mondiale : 90% d’entre elles sont allées jusqu’au bout de la démarche et 60% se sont déclarées globalement satisfaites, le chiffre s’élevant à 80% pour les PME participantes. Pendant un an, ces entreprises ont mis en place un affichage environnemental à destination des consommateurs sur une sélection de 10 000 références. L’expérimentation s’est intéressée au contenu (pour mieux informer les consommateurs), aux formats et aux supports (pour mieux protéger l’environnement). Bénéfices de la démarche : compétitivité, innovation, dialogue
Delphine BATHO a précisé que « la conjoncture économique actuelle, les défis sociaux auxquels nous devons collectivement faire face, nous imposent de privilégier les dispositifs « gagnant/gagnant » à même de conjuguer performance économique et protection de l’environnement. » A cet égard l’expérimentation a démontré l’intérêt potentiel d’un affichage environnemental qui valoriserait les progrès environnementaux des entreprises. 73 % des participants considèrent que l’affichage pourrait être source de compétitivité à venir.
Deuxième phase du dialogue
Si les bénéfices de l’expérimentation sont réels, des adaptations sont à prévoir. Les entreprises demandent une maîtrise des coûts et un accompagnement humain et technique des pouvoirs publics pour envisager une plus large échelle de mise en oeuvre.
Toutes les parties prenantes s’accordent sur un besoin d’harmonisation des méthodologies de calcul des impacts environnementaux des produits, ainsi que des formats de restitution de ces impacts aux consommateurs. Pour ce faire, le socle technique élaboré par la plateforme ADEME‐AFNOR serait une base de départ.
La ministre a annoncé qu’une deuxième phase de dialogue allait s’ouvrir. Elle permettra de décider ensemble des modalités que devra prendre le déploiement de l’affichage à l’échelle nationale. A la lumière de l’expérimentation, toutes les pistes seront étudiées, en termes de modalités d’encadrement, de calendrier et de progressivité du déploiement.
LA FILIÈRE TEXTILE EN ALSACE
Le textile en Alsace emploie 11 700 personnes, soit 7,3% de l’emploi industriel alsacien et 5% des emplois textiles en France. L’ennoblissement en Alsace représente 26% de la production française en volume et 20% du chiffre d’affaires national. L’impression des produits en coton représente 32% de la production française en volume et 30% en chiffre d’affaires. L’Alsace est la 4ème région textile de France par son poids en emploi et comprend environ 120 établissements.
Les entreprises ayant participé au comité expérimental local et basées en Alsace sont les suivantes :
Alsatextiles – Impression numérique sur textile,
Corderie Meyer‐Sansboeuf – Fabrication de ficelles, cordes et tresses,
DHJ International – Transformation de supports textiles, DMC – Fabrication de fil pour la mercerie, Freundenberg Evolon – Fabrication de non‐tissés, Green Attitude Compagnie – Création et commercialisation d’articles textiles, Lingerie Wolf – Fabrication et commercialisation d’articles de lingerie, Scapalsace (Leclerc) – Distribution d’articles textiles, SDE SA – Textile de maison, Sogecoq – Conception et distribution de chaussures, textiles et articles de sport, Virtuose – Conception et réalisation de tissus pour chemises.
Le Pôle Textile Alsace a pour vocation de stimuler le travail en réseau entre les acteurs de l’industrie textile, les écoles et les centres de recherche présents sur le territoire. L’objectif est de faciliter le développement de compétences, les mutations et les diversifications des marchés de la filière. www.textile-alsace.com/
www.ifth.org/
Le déroulement de l’expérimentation
Zoom sur la formation collective
Une formation collective d’un jour financée par l’ADEME et animée par le cabinet RDC Environnement a permis aux entreprises d’acquérir les prérequis indispensables à une bonne appropriation des enjeux de l’affichage environnemental. Cette formation avait pour but de familiariser les participants au vocabulaire utilisé, aux principes et outils de l’évaluation environnementale des produits et aux différentes données à collecter
Gagner en notoriété - Rencontrer d'autres professionnels et établir des partenariats et/ou relations commerciales - Prendre conscience des impacts environnementaux de son produit et comment agir pour les réduire - Offrir une continuité à notre démarche d’éco‐conception - Nous différencier des importations et valoriser le circuit court - Renforcer notre argumentaire commercial - Défendre l’intérêt des industriels français - Prendre le temps de se poser et de sortir du quotidien - Fédérer les salariés autour des valeurs de l’entreprise - Bénéficier d’une aide technique et financière - Identifier les difficultés et coûts induits - Développer de nouvelles compétences - Valoriser la performance de notre outil de production, nos efforts environnementaux - Anticiper une future réglementation - Être au coeur des réflexions et de l’information Les difficultés
S’approprier l’ensemble des nouveaux concepts (vocabulaire, méthodologie…) - Identifier les données à collecter - Dégager les ressources pour la collecte des données, la communication, la formation - Collecter les données primaires - Collecter des données chez des fournisseurs (locaux ou basés à l’étranger) - Faire entendre la position des producteurs face aux distributeurs - Utiliser un référentiel non adapté au produit étudié (un seul cas particulier) - Obtenir des données semi‐spécifiques ou génériques en absence de base de données publique - Dépendre des experts pour le calcul des indicateurs.
RETOURS D'EXPERIENCES :
Les fiches de présentation des entreprises ayant participé à l’opération inter‐régionale
Extrait du guide « L’affichage environnemental des produits. Retour d’expériences sur la filière textile / chaussure en Alsace, Bourgogne et Lorraine ».
Nos motivations
« Notre objectif est d’orienter l’entreprise vers un développement économique basé sur un circuit court de distribution. Cette expérimentation a été l’occasion de valoriser notre démarche d’éco-conception et plus particulièrement notre procédé de fabrication. Grâce à l’affichage, le consommateur pourra comparer, de façon crédible, nos produits avec une fabrication plus éloignée, voire non respectueuse de l’environnement. Pour cela, il faut s’assurer de donner une information tangible. La démarche nous a également permis de participer à une émulation locale grâce au travail en réseau, de développer des relations commerciales, mais aussi de prendre tout simplement le temps de se poser et de sortir du quotidien. » Notre démarche
Unité fonctionnelle
Décorer 2 panneaux coulissants de placard pour 3 ans (2,5 m x 2 m). Méthodologie Calcul des impacts environnementaux selon les 4 indicateurs du référentiel chemise réalisé avec l’appui de l’IFTH. Le produit est composé d’un tissu 100 % polyester filé en Turquie, tricoté en maille bloquée en Allemagne et imprimé par jet d’encre avec un colorant à base aqueuse et des pigments naturels minéraux.
Nos motivations « L’affichage environnemental s’intégrait parfaitement à la démarche d’éco-conception de nos produits, avec une attention particulière sur la réduction de l’impact de nos procédés de fabrication. C’est un sujet qui concerne tous les acteurs de l'entreprise et qui contribue à fédérer les salariés autour des valeurs de DMC. C'est également l'occasion de nous différencier des importations et de valoriser le circuit court. Cette opération nous a conduits à réfléchir aux méthodes à mettre en oeuvre pour communiquer des éléments techniques et scientifiques à nos clients, tout en vulgarisant le message. Enfin, nous avons réussi à faire prendre en compte les spécificités du fil, et notamment celles des producteurs locaux, au groupe de travail national (GT5). » Notre démarche
Unité fonctionnelle
1 pull composé de 6 pelotes de 50 g porté 80 fois au cours de sa vie et lavé 40 fois. Méthodologie
Calcul de l’impact mené en partenariat avec l’IFTH selon les 4 indicateurs du référentiel chemise pour se différencier des fibres synthétiques. Mode de communication Un flyer à destination des consommateurs a été distribué dans des magasins cibles. Le logo du « caddie » du ministère en charge de l’Écologie et du Développement durable figure sur l’étiquette des pelotes. En complément, un questionnaire a été développé sur le site Internet pour recueillir l’avis des consommateurs. L’ensemble de la force commerciale France (soit 20 personnes) a été formé.
Nos motivations « Nous avions été sensibilisés à l’éventualité d’une nouvelle réglementation par l’Ademe et l’Afnor, ainsi que par la Fifas . Pour anticiper cette réglementation française, la Direction sourcing a choisi d'expérimenter l'affichage environnemental sur la collection chaussures hiver 2011. Nous avons assisté aux réunions et formations collectives Ademe/Afnor et échangé avec les entreprises présentes. Notre entreprise était la seule à représenter le secteur de la chaussure. » Notre démarche
Unité fonctionnelle
1 paire de chaussures taille 42 portée 1 an.
Méthodologie Étude conduite sur la base du référentiel chaussure (chaussure de ville) sur toute la collection chaussures hiver 2011, soit 90 modèles regroupés en 9 catégories. Les 3 indicateurs d’impact ont été calculés pour chaque catégorie sur la base de nos données spécifiques. La disponibilité de données génériques, par exemple pour la colle, a été vérifiée dans les bases de données commercialisées. Pour la durée de vie (donnée semi-spécifique), la valeur retenue par défaut a été de « 2 paires de chaussures par an ». Il nous a été proposé de travailler sur une autre durée de vie si nous le souhaitions, à condition de proposer une méthode de calcul adaptée à la chaussure de sport. Dans le cas de la chaussure de ville, il est possible de choisir une autre durée de vie en réalisant des essais de performance (prévus dans l’annexe A du BX30-323-1)
Nos motivations
« Suite à la sensibilisation reçue via le comité expérimental interrégional, nous avons décidé d’intégrer le GT5 au niveau national afin de défendre les intérêts des industriels vosgiens. Notre volonté a été d’être acteur plutôt que spectateur. Cela nous a permis de fédérer les industriels et de valoriser la performance de notre outil de production. Au-delà de cette motivation, c'est aussi l'occasion d'anticiper une future réglementation, de nous différencier et d'offrir une continuité à notre démarche d'éco-conception encadrée par le Pôle de Compétitivité Fibres (CIM-Éco®). » Notre démarche
Unité fonctionnelle
Produire 1 drap polyester/coton de 320 x 180 cm résistant à une centaine de lavages et apportant le confort nécessaire à un couchage de plusieurs nuits consécutives. Méthodologie Collecte des données réalisées en interne suivant les différentes étapes du cycle de vie. Pour la production, l’étude se base sur nos consommations en matières premières, eau, énergie… Pour la phase d’utilisation, les données correspondent à une estimation d’un entretien domestique (une durée de vie du drap de 100 lavages, un lavage en machine à 60°C, une charge de lavage à 5 kg pour 65 l d’eau utilisés). Pour la fin de vie du produit, il a été considéré que les draps usagés étaient, pour moitié d’entre eux, incinérés avec récupération de l’énergie thermique, et pour l’autre mis en décharge. Le calcul des impacts a été réalisé sous le logiciel TEAMTM par l’IFTH selon les 4 indicateurs du référentiel chemise.
Sur Internet. L’affichage est un moyen de valoriser notre politique environnementale aux yeux du consommateur. Cela permet de le sensibiliser à l’impact du produit lors de sa fabrication mais aussi lors de son utilisation, afin qu’il devienne un vrai «consom’acteur».
Nos difficultés Notre principale difficulté a été de faire entendre «la voix» des producteurs face aux distributeurs, peu sensibles aux conditions environnementales de production. La seconde difficulté a été de collecter les données primaires (données réelles de nos produits) sans utiliser les données secondaires afin de ne pas nous pénaliser et d’être le plus crédible dans notre démarche. Les apports Cette opération nous a permis de : - gagner en notoriété et compétences, au-delà d’un enrichissement personnel confié par le chef de projet ; - rencontrer d’autres professionnels et établir d’éventuelles relations commerciales avec les membres du GT5 ; - bénéficier d’une expertise technique. Les perspectives Nous pensons que l’affichage environnemental des produits doit être obligatoire du moment qu’il se base sur les données primaires. Pour ceux qui ne les possèdent pas, le résultat du calcul des indicateurs devrait être majoré. Cet affichage doit faire l’objet d’un contrôle par un organisme tierce partie indépendant. Nous attendons la poursuite de la valorisation de cette expérience et allons proposer au GT5 un référentiel dédié au linge plat.
Nos motivations « L’affichage est une continuité avec notre engagement en matière d’innovation et d’environnement. C'est aussi notre volonté de partager nos expériences avec les entreprises locales et de rester en veille. Nous participons au groupe de travail national pour représenter les industriels du textile et défendre nos positions face aux distributeurs. Nous participons également au programme CIM-ÉCO® pour l'Analyse du Cycle de Vie de nos produits. Pour l'expérimentation nationale sur l'affichage environnemental des produits, nous avons choisi la chemise FreshMax qui est notre seul produit fini commercialisé en direct. » Notre démarche
Unité fonctionnelle
1 chemise portée lavée une fois. Méthodologie Appui de l’IFTH pour la collecte des données et pour le calcul des 4 indicateurs d’impact du référentiel chemise (utilisation du logiciel TEAMTM). Choix de communiquer sur 3 des 4 indicateurs (émission de gaz à effet de serre, consommation d’eau et eutrophisation) parce qu’ils sont les plus représentatifs (selon le référentiel chemise).
http://affichageenvironnementaltextile.com
Des retours de clients qui achètent dans notre magasin d’usine montrent qu’ils ont vu et lu l’étiquette mais que la compréhension des indicateurs est difficile.
Nos difficultés Les difficultés que nous avons rencontrées sont de différents niveaux : - obtenir des informations de la part de nos fournisseurs de fil coton (70 % des achats par revendeur) : des données secondaires issues d’une base de données américaine ont été utilisées ; - identifier les données à collecter et dégager le temps pour le faire : des questionnaires types de collecte ont été établis avec l’IFTH et nous avons eu recours à une stagiaire ; - traduire les données en indicateurs (ex : GES et eutrophisation) : la solution a été de s’appuyer sur l’expertise de l’IFTH ; - trouver des ressources pour l’enquête consommateur. Les apports Ce travail a contribué à notre notoriété et créé un buzz national sur nos produits. Nous avons développé des partenariats avec des entreprises rencontrées lors des groupes de travail locaux, déployés de nouvelles compétences et une ouverture d’esprit sur de nouvelles thématiques. Cette opération a été l’occasion de se rendre compte des difficultés techniques – « quand on ouvre une porte, on en trouve 12 derrière à explorer » – et de mieux prendre conscience de nos impacts. Elle nous a permis de valoriser nos efforts et résultats environnementaux (diminution des rejets dans l’eau, recyclage des chutes de tissage, climatisation des ateliers…) et d’avoir une continuité par rapport à notre démarche d’éco-conception.
Nos motivations
« Travailler sur l’affichage environnemental de nos produits, c’est être dans la continuité de notre engagement pour l'innovation, le développement durable et le management participatif. Il est important d'être au coeur de l'information et des décisions vis-à-vis des évolutions réglementaires et normatives relatives à notre secteur d'activité. L'inscription au GT5 vise à comprendre les enjeux ainsi que les éventuelles difficultés à anticiper. Le second objectif est de déterminer si l'affichage environnemental permettra de valoriser nos actions en matière de développement durable. Nous avons engagé une démarche d'écoconception sur une de nos gammes de produits (ficelles pour particuliers) avec le Pôle de Compétitivité Fibres. Nous n'avons pas été retenus dans le cadre de l'expérimentation nationale car notre choix de produit (corde pour le monde du yachting) était trop spécifique. » Nos appréciations Nos attentes vis-à-vis de l’affichage environnemental sont très fortes : - valoriser nos efforts pour offrir des produits recyclables à forte valeur ajoutée technique sur une gamme très large ; - nous différencier de la concurrence asiatique (gamme limitée, transport, etc.). La principale difficulté réside dans le choix de critères qui permettront de différencier des produits fabriqués localement avec une forte valeur ajoutée technique, de ceux produits à l’étranger et ne respectant pas la réglementation sociale. Les méthodes de calcul sont complexes avec les outils actuels et demandent des compétences et des ressources nouvelles (exemple : collecte des données spécifiques). Proposer une méthode et des données moyennées constitue un risque.