Sur le terrain, le terrain, le projet de loi inquiète vivement les travailleurs sociaux et les associations
Le Sénat vient d'adopter à la quasi unanimité un projet de loi visant à supprimer l'allocation de rentrée scolaire et suspendre la majeure partie des allocations familiales aux familles qui ont perdu la garde de leurs enfant sur décision de justice. Sur le terrain, ceux qui connaissent bien ces familles s'inscrivent en faux.
Plus d'allocation de rentrée scolaire et des allocations familiales réduites à 35% de leur montant
Ce mercredi, le Sénat a adopté à la quasi-unanimité une proposition de loi UMP qui prévoit de supprimer l'allocation de rentrée scolaire et la suspension d'une majeure partie des allocations familiales aux familles qui ont perdu la garde de leurs enfants sur décision de justice.
En l'état actuel des choses, le code de la sécurité sociale prévoit déjà que les allocations familiales soient versées à l'aide sociale à l'enfance dans le cas où un enfant est retiré à ses parents. Le maintien éventuel de l'allocation peut toutefois être décidé par le juge si les familles « participent à la prise en charge morale ou matérielle de l'enfant, ou en vue de faciliter son retour dans son foyer ». C'est écrit et c'est généralement la décision qui est prise par les juges.
Avec la proposition de loi adoptée ce mercredi, le juge ne pourra plus maintenir le versement de la totalité des allocations, mais uniquement 35% de celles-ci. Un amendement a été déposé qui prévoit une période transitoire de 3 mois après la décision de justice, soit un délai de carence, avant de mettre en oeuvre la suppression partielle des allocations. Cet amendement vise à «éviter un choc, d'autant que l'enfant peut, dans ce délai, retourner dans sa famille » précise Yves Daudigny, sénateur PS à l'origine de du texte.
La ministre de la famille, les associations et les travailleurs sociaux sont opposés à ce projet de loi
De son côté, la ministre déléguée à la Famille Dominique Bertinotti était opposée à ce texte, appuyée dans cette prise de position par plusieurs associations de protection de l'enfance, les travailleurs sociaux et les professionnels de santé, réunis dans un collectif pour un communiqué de presse commun.
On y trouve : ATD Quart Monde, l'Association nationale des assistants de service social (ANAS), les Apprentis d'Auteuil, la DEI (Défense des Enfants International, le Secours Catholique, le Syndicat National des Médecins de Protection Maternelle Infantile et l'Union nationale des associations familiales (UNAF).
"Seuls 20% des enfants confiés à l'ASE le sont pour cause de mauvais traitements"
Tous s'inscrivent en faux face à ce projet de loi. Ils évoquent une mise en péril du retour des enfants confiés aux services d'aide à l'enfance. Le collectif rappelle notamment qu'actuellement, le Code de l'Action sociale et des familles maintient aux parents l'obligation d'entretien de leurs enfants, même confiés aux services de l'aide sociale à l'enfance.
De plus, « seuls 20% des enfants confiés à l'ASE le sont pour cause de mauvais traitements. » Or, le texte voté par le Sénat prévoit que toute mesure de placement, quelles que soient les causes et même si les parents souhaitent contribuer à l'entretien et à l'éducation de leurs enfants, entraîne automatiquement la suppression des allocations familiales, sauf avis contraire du président du Conseil Général qui saisit alors le juge.
"Confisquer les allocations c'est fragiliser la famille"
Pour le collectif, « confisquer les allocations c'est fragiliser la famille : confisquer leur statut aux parents, compromettre parfois le paiement du loyer, le transport pour leur rendre visite, la possibilité de nourrir leurs enfants quand ils les reçoivent le week-end, le maintien du lien par l'achat du cartable de rentrée, etc.
Une grande partie des enfants « placés » vient en effet de familles en grande précarité économique. Selon les différentes associations signataires du communiqué, « c'est en aidant les parents et non en les sanctionnant, que l'on rend possible le retour de l'enfant chez lui dans de bonnes conditions ».
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