Un homme sans histoire arrive du jour au lendemain dans une société de convoyeurs de fond. Il va apprendre le métier, mais son but est tout autre...
La critique de genre made in France de Borat
On regrette souvent le manque cruel de cinéma de genre français, mais il y a une quelconque proposition, rares sont les fois où cela marche au box office ou alors que ce soit bon (certains ont encore de très mauvais souvenirs de Promenons nous dans les bois). Les rares cas ayant brillé au niveau des spectateurs furent Le pacte des loups de Christophe Gans pour le fantastique et Ne le dis à personne de Guillaume Canet pour le thriller. Les aytres sont souvent des films uniquement vus par des cinéphiles ou fan de genre comme les films de Pascal Laugier ou Alexandre Aja. Le convoyeur de Nicolas Boukhrief (récemment juré à Gerardmer) est de ceux-là. Sorti en mars 2004, il passe inaperçu en salles et pourtant ce n'est pas faute de têtes d'affiche. Ainsi, on retrouve Albert Dupontel, Jean Dujardin (déjà soucieux de se distancer d'Un gars, une fille ou des rôles comiques), François Berléand, Julien Boisselier, Claude Perron, Philippe Laudenbach et Aure Atika. Il y a même cette trogne d'amour de Christophe Lemaire dans une courte apparition! On est loin du film avec rien devant et rien derrière. Dommage car s'il n'est pas parfait, Le convoyeur a le mérite de frapper fort dans le paysage français.
Comme pour l'Homme sans nom, le personnage de Dupontel débarque comme si de rien n'était. On ne sait rien de lui, il prend un appartement avec de l'argent sorti d'on ne sait où, il arrive dans une entreprise de convoyeurs qui ne cesse de se faire braquer, aux yeux de beaucoup il semble être un employé envoyé par les chefs de l'entreprise pour liquider définitivement l'entreprise locale... D'autant que l'aspect monolithique et les étranges photos et articles qui ornent sa chambre donnent une certain ambiguité du personnage. Quel est sa réelle intention? Boukhrief dévoile petit à petit les facettes d'un personnage moins enigmatique qu'il n'y paraît et finalement bien loin de l'Homme sans ombre. Plutôt des côtés de L'homme des hautes plaines. (attention spoilers) Car comme pour le film de Clint Eastwood, Le convoyeur est surtout une histoire de vengeance. On peut même dire qu'ils ont le même schéma. C'est seulement au milieu du film que l'on apprend réellement qui est le personnage de Dupontel. Il suffit d'un flashback (assez émouvant d'ailleurs) pour que le film prenne une autre dimension, notre perception du personnage aussi. Au départ, tant il est mystérieux, on irait presque jusqu'à croire que le personnage est le braqueur qui fait tant de tord à l'entreprise.
Ou alors à un psychopathe! Mais finalement, il veut juste retrouver les braqueurs qui ont tué son fils et ont brisé sa vie. Finalement, c'est surtout le plus sympathique en apparence qui est finalement le coupable. Ce qui donnera lieu à un huis clos final, où Boukhrief rend hommage à sa manière à John Carpenter. Déjà avec Assaut puisque les braqueurs affrontent les convoyeurs armés jusqu'aux dents. Un affrontement violent où à peu près tout le monde passe à la casserole dans un déluge gore bien senti et qui détonne dans un cinéma de genre français qui manque singulièrement de moment de ce genre. Ensuite on peut voir un clin d'oeil à la mythique affiche de The Thing avec ce braqueur se prenant une bombe flash en pleine tronche et dont l'explosion est montré en plan-séquence. (fin des spoilers) Si le personnage de Dupontel est aussi inquiétant qu'enigmatique, c'est surtout grâce à l'acteur qui s'est réellement donner corps et âme dans ce rôle sensible. Pas de dingo ravagé de la cafetière, mais un homme qui a tout perdu et qui va essayer de se retrouver. Quant au reste de la distribution, elle est plus que convaincante et notamment un certain Dujardin en parfait contre-emploi. Il est loin de Chouchou et Loulou!
Un superbe polar où Albert Dupontel casse la barraque dans un rôle bien plus profond qu'il n'y paraît.
Note: 17/20
Le Convoyeur