Jacques Ancet présente Béatrice Bonhomme
Un événement organisé dans le cadre du Printemps
des poètes par la Maison de la poésie d’Annecy et la bibliothèque
d’agglomération Bonlieu, en partenariat avec les Musées de l’agglomération
d’Annecy.
Les rencontres sont animées par Jacques Ancet et Michel Dunand.
Jacques Ancet poète, écrivain et traducteur. Il réside près d’Annecy. Michel
Dunand poète, dirige la maison de la poésie et anime, depuis 1984, la revue
«Coup de Soleil» (poésie et art).
Présentation : Jacques Ancet, le vendredi 15 mars, lors d’un récital a
présenté l’œuvre de Béatrice Bonhomme :
C’est comme si la mer
s’était posée
un instant
sur tes yeux
Il semble que de cet instant dépende toute l’aventure d’écriture de Béatrice
Bonhomme.
Bien sûr, Béatrice Bonhomme vit à Nice entre montagne et mer, et elle est née à
Alger d’un père peintre qui lui donne le goût de la lumière, des couleurs, de
la beauté des paysages qui l’entourent et d’une mère conteuse qui, elle, lui
donne le goût des mots. Mais ces éléments biographiques s’ils éclairent en
partie sa poésie ne suffisent pas à l’expliquer. « Devant le papier
l’artiste se fait », disait Mallarmé, et Béatrice Bonhomme s’est faite
dans ses livres, une quinzaine à ce jour, poèmes surtout mais aussi récits
théâtre et journaux. Sans parler d’un abondant travail d’essayiste (elle
enseigne la littérature à l’université de Nice) et the last but not the least son activité de directrice de revue, la
revue NU(e) fondée avec Hervé Bosio
en 1994 et qui, à chacune de ses livraisons qui sont au nombre de 52 à ce jour,
présente un poète contemporain.
C’est dire l’importance de la présence de Béatrice Bonhomme dans l’espace de la
poésie contemporaine d’aujourd’hui et c’est pourquoi nous sommes heureux de
l’accueillir ce soir.
Tout commence donc par la mer et les paysages qui lui sont associés. Mais on
pourrait dire aussi bien que tout commence par le bleu : celui de la mer
et du ciel, de la terre, de la lumière et des corps. Et avec ce bleu
originaire, la nudité — le « nu » comme dit Béatrice, ce Nu qui donne
son nom à sa revue. Face aux poètes du noir, Béatrice Bonhomme choisit les
poètes du bleu : « je choisis le nu bleu, dit-elle — et je ne sais si
dans ce choix joue en moi une réminiscence d’un tableau de Matisse — pour moi
le nu est bleu et au matin souvent tout bleu, l’azur demeure ».
On comprend, dès lors, que la poésie de Béatrice Bonhomme soit une poésie
« amoureuse ». Je veux dire par là que l’amour sous toutes ses formes
la traverse : amour du ciel et de la mer, amour d’une terre lumineuse et
charnelle, amour des corps, amour du langage. Amour, désir de coïncidence. Et
le poème, parce qu’il est recherche de cette coïncidence, est aussi
inévitablement rencontre du manque, du dessaisissement, comme l’énonce le beau
titre d’un petit livre de Béatrice, Le
dessaisissement des fleurs.
D’où la passion, l’intensité érotique de cette poésie. D’où sa sensualité
violente parce que toujours menacée qui parfois s’inscrit dans la lignée de la
mystique érotique de Pierre Jean-Jouve sur lequel Béatrice a écrit sa
thèse :
la mer crie dans ta bouche, sur les
pierres plates, les rochers et l’aller-retour, le va-et-vient de toi dans le
hurlement silencieux de nos corps
la mer est pleine, bleue d’odeurs
amour acidulé de cerise et de pêche
Amour, désir de réparer notre blessure fondamentale. Celle de naître et de
mourir. Et c’est sur cet affrontement à la mort qu’il faut terminer. Mort du
père bien aimé, l’initiateur aux arts et à la lumière, Mario Villani, à qui Béatrice
Bonhomme écrit un émouvant hommage sous le beau titre de Passant de la lumière :
A Pompéi, tu t’assois sur la pierre des
années. Les enfants jouent à la marelle. Le ciel est bleu d’éternité. Je sais
que tu vas mourir.
À suivre, par un dialogue entre James Sacré et
Béatrice Bonhomme