Chaque révolution technologique engendre les mêmes craintes. Internet n'a pas échappé à la règle, et beaucoup se posent la question cruciale de savoir si les jeunes, tous des geek, ne risqueraient pas de devenir totalement acculturés. Prothésés et intubés de partout, se remplissent-ils le cerveau à tout va sans penser à rien ?
Et, de ci-de-là, on entend dire :
« Ils ne lisent plus de livres »
« Ils font des copier-coller sans réfléchir »
« Ils surfent sur Internet de manière superficielle dans le grand bric à brac»
« Ils développent des addictions aux jeux, vidéos, films. »
« Ils sont submergés par des informations de tous ordres et sont peu préparés à se méfier de celles qui sont fausses ou erronées ou orientées, et qu'ils ne savent pas mettre en perspective
« Ils se trouvent confrontés à la pornographie, à la violence et risquent de mauvaises rencontres »
Ainsi a débuté un réquisitoire qui devait répondre à la question suivante : le numérique acculture-t-il les jeunes, et réunissait, il y a quelques semaines à Grenoble, quelques acteurs-penseurs du sujet. Synthèse :
la teneur de la révolution internet a été mal prise, en la plaçant dans la prolongation des écrans de télévision et en l'assimilant à la culture de masse déversée de manière unilatérale depuis les mass média vers les utilisateurs, ce qui qui n'est pas du tout le cas. Si la télévision enfermait les jeunes chez eux, on aurait tort de penser que le web en fait autant, bien au contraire, Internet ouvre vers l'extérieur.
Internet est tout à la fois un apprentissage et la construction d'une culture propre à chaque individu. Ainsi se forment des petites communautés qu'il peut être difficile parfois d'appréhender. Il n'y a pas un changement dans la culture mais un changement dans le rapport à la culture qui a fait passer le spectateur de la télévision au rôle d'acteur qui participe à des communautés, pratique différents médias et partage son travail. La pratique culturelle s'est beaucoup développé sur Internet. Images, sons, textes, séparés ou mêlés, les passions se médiatisent, s'échangent, se discutent. Les plate formes de blog le démontrent.
Le numérique abolit la géographie, le périmètre de notre culture et de notre patrimoine ainsi que la façon dont on l'acquiert. Du global au local, un va et vient s'installe, fait de partages, de pratiques que ce soit face à l'écran, dans la rue, le quartier, la ville il existe un fort désir de participer à la production de l'ordre symbolique du monde. Internet incite à la création, au partage, le contraire de l'individualisme en somme ce qui ne fait pas l'affaire du marché. Avec les applications, les marchands du web tentent une parade pour éviter la flânerie et se cantonner aux grands axes. Mais il n'est pas si simple de faire régner un ordre marchand lorsque sont ouverts une infinité de possibles et le désir de leur partage en toute liberté.