Mes chaussettes circassiennes

Publié le 25 mars 2013 par Pimprenelle2

C’était un lundi étonnamment doux, après un week-end anormalement froid, une semaine de grands écarts thermiques, qui m’ont fait craindre un claquage des adducteurs saisonniers.

L’occasion était trop belle, il me fallait m’en saisir, sortir ma tenue chlorophylle pour faire du gringue au printemps. Mon cœur était en joie, mon humeur au beau fixe. C’était un lundi, ce jour pourri honni de tous mes congénères, y compris moi-même dans mon état ordinaire.

Mais une accalmie pareille se fête, en arborant un sourire, un peu niais j’en conviens … et des chaussettes neuves (American Apparel, si après mon récit cela peut encore en intéresser quelques unes), une folie multicolore dont un vert pile poil raccord avec mes New Balance que je ne vous présente plus.

J’étais bêtement heureuse, presque fière de mon inhabituelle mise en couleur, de ma tenue de veuve corse infidèle, et j’ai un instant craint que mes chaussettes ne restent dans l’anonymat, ne rencontrent pas leur public et le succès pour lequel elles ne peuvent qu’avoir été conçues.

Donc une fois assise, je me suis innocemment saisie de mon pied, et tournoyant sur mon siège, mon pied à la hauteur du visage (ben oui, moi aussi suis souple, tout est question de motivation !), genre oyez oyez braves gens ! Et j’ai récolté des wouha, des super, des où tu les as trouvées, et autres satisfecit enthousiastes  et sincères. Elles sont chouettes mes copines ! Et puis elles ont du goût, aiment l’originalité, et moi je les aime.

J’étais heureuse pour mes chaussettes, dont je ne peux qu’avoir conscience de la courte espérance de vie : quelques lavages, et seront séparées, veuves ou orphelines, mises au rencard à jamais.

Et puis soudain une petite voix ironique et futée a lancé, ah tiens, je n’avais pas remarqué qu’un cirque montait son chapiteau. Ma chaussure a rejoint le plancher des vaches qu’elle n’aurait jamais dû quitter, j’ai baissé la tête, les ai regardées, ai reconnu que ce n’étais pas faux, et je m’en suis allée, allée consoler mes chaussettes, leur apprendre ce que très tôt j’ai su : on ne peut pas plaire à tout le monde, une seule personne qui nous aime peut suffire à notre bonheur.


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