La cinémathèque : les cours de Jean Douchet, nous les avons suivi durant une année, avec mon amie... c'est cela qui m'a rendu le cinéma plus proche et plus indispansable. Un objet qui nous rend sujet contrairement au travail, la plupart du temps aujourd'hui. A cette époque c'était au Max Linder sur les grands boulevards.
Le film après une très brève présentation et après un ciné-débat, avec quelques uns de ses étudiants dans le public, comment, de mèche, de connivence.
« UNE CERTAINE TENDANCE DE LA MODERNITÉ : ROSSELLINI, BERGMAN, GODARD… ET LES AUTRES »
Même si certains éléments de la modernité cinématographique se manifestent dès avant la Seconde Guerre mondiale, en particulier dans La Règle du jeu (1939), chef-d’œuvre que les circonstances et la radicalité stylistique occultèrent pendant plus d’une décennie, il est vrai que c’est à partir de la fin de la guerre, avec le néo-réalisme italien, qu’une nouvelle histoire, donc une autre vision, du cinéma se fait jour.
Comme toujours, en pareilles circonstances, les raisons matérielles et économiques commandent. Mais le génie de Rossellini ne vient pas du fait que le désastre de la guerre l’obligeait comme ses confrères à quitter les studios détruits et tourner directement dans la « vraie » rue mais à penser, d’une manière radicale, ce retour involontaire au cinéma originel des frères Lumiere. Soudain, Rossellini évacue cinquante ans de récit cinématographique, il en tue la dramaturgie théâtrale de la durée pour obéir aux lois de l’instant qui caractérisent la vie. Il filme donc l’Histoire, et les histoires qu’elle draine, comme un opérateur d’actualités. Il perturbe l’ordre classique de la dramaturgie : celle d’un passé qui bloque un temps le présent et le met en crise pour qu’il fabrique un futur (le fameux happy end) qui résout le problème. Tel était, en ce temps-là, le sens de l’action, moteur et raison des films.
Avec Rome ville ouverte (1945) et surtout Paisa (1946), Rossellini perturbe cet ordre que même les documentaristes n’osaient troubler. Ce n’est plus le présent qui va vers le futur, mais une sorte d’inverse : un présent bloqué. La marche inéluctable de l’événement fait loi. Les personnages sont pris au piège de l’accident et n’ont aucune prise sur l’avenir. Ils en sont prisonniers et l’action, dès lors, réside dans le froid regard du spectateur-caméra enregistrant leur peur perpétuelle, leur tressaillement animal. Plus tard, lorsque la technologie apportera le zoom, le même cinéaste aura vite fait de l’utiliser pour visualiser, concrétiser la quête fiévreuse d’une stabilité qui n’est plus donnée à l’homme et moins encore à la femme.
À partir du moment où est mise en question la suprématie d’une dramaturgie théâtrale millénaire dont le cinematographe eut besoin pour soutenir la découverte de son propre langage, le théâtre lui-même est interrogé : quid de son spectateur ? Et voilà qu’un homme de théâtre par excellence, Ingmar Bergman, établit par et avec le cinéma un rapport nouveau qui n’existait pas jusque-là. Certes, on connaît les multiples artifices pour feindre de faire participer le public à ce qui se joue sur scène, mais le célèbre regard que pose Monika sur le spectateur, et qui le fixe, perturbera à jamais les règles du jeu (Monika, 1953). Fini ce droit à une position de voyant omniscient et intouchable ; le spectateur sera traité à égalité avec le personnage qui peut, desormais, venir le chercher jusqu’à sa place.
Et d’autant plus qu’un nouvel âge de la modernité d’après-guerre s’impose avec l’œil ouvert d’une télévision de plus en plus omnisciente. Et qui mieux que l’auteur de Mabuse pouvait témoigner, avec une préscience confondante du présent, de ce renversement qui fait de celui qui regarde, non le spectateur de sa propre vision, mais bien le spectacle à voir (Le Diabolique docteur Mabuse, 1960) ?
D’autres évolutions, certaines dérivant d’avancées technologiques et beaucoup d’autres provoquées par la « marche du monde », influent directement sur ce qu’on appelle la modernité cinematographique.
C’est ce que cette serie de films et de cineastes tentera de révéler et de définir.
Jean Douchet
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Je ne sais pas si Xavier Leherpeur est allé aux cours de Jean Douchet mais c'est le mème calme que j'imagine après les plongées en apné, quand nous sortons de ses séances ciné-débats au Lucernaire, en plus il continue à discuter en remontant l'escalier... Chez Jean, plus nous y allions plus on appréciait les films tout en sachant petit à petit, démêler, en gros, les ficelles, regarder à lécran, séparer au moins la musique des paroles...
au Lucernaire
HERCULE À LA CONQUÊTE DE L'ATLANTIDE (V.O.) / Jeudi 11 avril à 20h30: signature (dès 19h) + débat
Séance suivie d'un débat avec Xavier Leherpeur (critique cinéma) et Florent Fourcart (auteur de « Le Péplum italien, Grandeur et décadence d'une antiquité populaire ». Signature de l'auteur dès 19h.
Epris de justice et défenseur des opprimés, le fils de Zeus décide de traverser les océans afin d’affronter la cruelle Antinéa, reine de l’Atlantide qui menace la Grèce et dirige d’une main de fer un royaume dont la technologie avancée a été détournée pour assouvir ses penchants conquérants et destructeurs. Au cours de son périple, il devra faire face à de multiples dangers, combattre des monstres reptiliens, se battre contre une armée de clones et se défendre contre des lasers futuristes.
Réalisé par Vittorio Cottafavi, l’un des grands maîtres du Cinéma d’Aventure transalpin, ce célèbre épisode des aventures du héros musclé est l’un des chef-d’œuvres du genre. Si la tonalité délicieusement « kitsch » du scénario lui confère un aspect souvent décalé, le film évoque en sous-texte de nombreuses préoccupations de l’Italie des années 50-60 (luttes des classes, peur de l’apocalypse nucléaire et des dérives de la science, émancipation féminine, généralisation des congés payés, etc…). A noter également une apparition étonnante de Gian Maria Volontè en diplomate grec !