J’évite souvent de trop me plonger dans ces multiples témoignages sur les banlieues et les fantasmes sulfureux qui tournent autour, parce que j’ai bien du mal à me situer par rapport à de telles réalités. Mais quand j’ai lu les avis sur les différents blogs, je me suis laissée tenter. Et j’ai tout simplement adoré le ton de ce professeur. Loin de présenter ces élèves comme des brutes sans aucune considération pour le savoir que l’Education Nationale a la bonté de leur transmettre, il les montre dans toute leur intelligence. En effet, quoi de plus intelligent qu’un élève qui dit qu’il ne comprend pas? Que la langue n’est pas claire? Que les gens agissent étrangement? Ou que Maupassant a trop la classe? Parce que oui, il met aussi en avant toutes les fois où ils s’intéressent, avec leur mot, avec leur ressenti, à ce contenu désincarné qu’on leur propose. Toutes les fois où ils préfèrent défoncer une porte plutôt que de taper sur un camarade, quitte à y rester coincer, et le talent avec lequel il faut désamorcer la crise par l’humour en étant conscient qu’on vient d’éviter le pire. Le talent de ce livre, c’est de montrer que ces élèves ne sont pas juste des brutes sans cervelles irrécupérables, mais qu’il faut aussi essayer de comprendre leur système pour les inciter à en sortir.
Mais ce que j’ai surtout aimé, c’est qu’ici, le professeur face aux cancres ne joue pas les héros à la solution miracle. Il se fait insulter sur le parking. Il a du chahut, voire des violences pendant son cours (la porte défoncée s’en souvient encore). Il a des fortes têtes qui se moquent ouvertement de lui pour faire rire les copains. Il fait finalement peu cours, dans ses anecdotes. Il a des bagarres très violentes dans la cour. On est bien à Marseille-nord, pas Neuilly. Ne nous leurrons pas. Mais parfois il y a aussi des petites lueurs d’espoir qu’il consigne dans ce livre avec énormément d’humour et de situations cocasses. Le récit d’une bagarre ponctuée d’argot marseillais, incompréhensible, donne lieu à un “Très bien, merci de m’expliquer” hilarant. Ou les élèves qui se tassent au fond de la salle de projection cinéma, au désespoir de l’hôtesse qui ne comprend pas que pour eux, ce sont ces places-là, les meilleures! Je me suis même parfois reconnue dans son portrait du prof qui fait le show, le caïd, qui se la raconte, parce que, authentique: ça marche! Le prof est toujours en représentation et doit garder le staïle et ça passe autant par la tasse de café sur le bureau que par la poubelle atteinte du premier coup.
La note de Mélu:
Un livre attendrissant avec un regard original. Un grand merci à Liliba d’avoir fait voyager ce livre jusqu’à moi, livre qui a été un coup de coeur pour elle.
Un mot sur l’auteur: Dominique Resch est un auteur et professeur français, qui avait déjà sorti un premier livre consacré à son travail, Mots de Tête.
catégorie “prénom”