Chronique ontarienne, par Jean-François Tremblay…

Publié le 24 mars 2013 par Chatquilouche @chatquilouche

Bill Withers

« Lean on me, when you’re not strong
And I’ll be your friend
I’ll help you carry on
 » – Bill Withers

J’ai toujours été en accord avec l’expression : « On choisit ses amis, on ne choisit pas sa famille. » Et je ne veux surtout pas commencer à parler ici de la famille.  Celle-ci peut être source d’une multitude de peines et de joies sur lesquelles il serait trop long — et parfois douloureux — d’élaborer. Par contre, cette chose que l’on appelle l’amitié fut, en général, très bonne avec moi au fil du temps.  J’ai su accumuler les camarades de classe,  les copains de jeux, les collègues de travail et, merci aux technologies récentes, j’ai également pu garder le contact avec la plupart d’entre eux, notamment sur Facebook. Mais les vrais bons amis, ceux à qui on peut exposer le contenu de son âme à 3 h du matin, ceux à qui on remettrait sa vie entre leurs mains, ils sont peu nombreux.  Et j’en ai des comme ça.

J’ai une poignée de bons amis, de vieux amis, qui font partie de ma vie depuis environ vingt ans.  Je les ai connus quand j’étais jeune, naïf, et un peu con (quoique ce point est discutable, à savoir si mon niveau de connerie a diminué ou augmenté au cours des années).

Ensemble, nous avons traversé le temps et ses épreuves, nous avons vécu mille et une choses.  La plupart du temps, ce fut chacun de notre côté, mais notre évolution s’est faite en parallèle et nous n’avons jamais cessé de communiquer.

Sauf que ces amitiés, dont je croyais le statut immuable, deviennent de plus en plus difficiles à entretenir.  Ce n’est pas tant par manque de volonté que par manque d’affinités.  Le temps nous change et, telles les voies d’une autoroute, nous prenons des directions différentes.  Ensuite, il en revient à nous de garder le contact ou non, de garder ces relations vivantes.  Et lorsque la chose devient un effort qu’il nous coûte de faire, on doit se poser des questions.

Depuis quelques années, je ressens une fatigue dont je n’arrive pas à me débarrasser.  Téléphoner devient une corvée, les conservations sont remplies de malaises, et les goûts – influencés par les sources extérieures, telles que les collègues de travail, copines, etc. – deviennent de plus en plus incompatibles.

Oui, quand nous sommes ensemble – les rares fois où cela se produit –, les choses vont bien, mais ce n’est pas le grand bonheur, la grande fête.  Est-ce que ça devrait l’être à chaque fois ?  Non.  Mais j’aimerais « connecter » avec ces personnes qui ont toujours été mes amis et qui deviennent des étrangers avec les années.  Moi aussi, à leurs yeux, je deviens un étranger.

J’ai secrètement toujours rêvé d’une amitié « de gars » où je pourrais partager des références culturelles en sachant que l’autre saisirait, d’une compréhension immédiate en se regardant, d’une camaraderie fraternelle.  La défunte télésérie américaine Scrubs a visé en plein dans le mille en développant, sur huit saisons, une amitié entre deux super amis, qui est comiquement résumée dans cet extrait d’un épisode musical de la saison 7 :

http://www.wat.tv/video/scrubs-mon-musical-guy-love-z9xw_2h2x1_.html

C’est de ça que j’ai toujours rêvé.

Mais je suis conscient que mon rêve est une sorte d’idéal irréaliste et juvénile, nourri par la télévision et le cinéma.

Dans la vraie vie, on n’a pas le temps de se voir quand on veut, on ne peut pas tout partager, on n’a pas les mêmes références.  Dans la vraie vie, on choisit effectivement ses amis, mais on ne peut choisir quel genre de personne ils deviendront au fil du temps.  On ne peut décider ni prévoir ce qui va arriver, ce qui nous séparera, ce qui nous rapprochera.  Peu à peu, il est possible de perdre de vue les raisons pour lesquelles on est devenus amis en premier lieu. Il y a des côtes à monter, des trous à éviter sur cette autoroute longue et imprévisible.  Ce n’est pas toujours facile ni plaisant, mais je suppose qu’à long terme, ça en vaut la peine.

Cet amour inébranlable

Stella et Dottie vivent ensemble depuis 31 ans dans leur charmante petite maison du Maine.

Dottie est aveugle.  Stella lui apporte le soutien et les soins quotidiens nécessaires.  Les deux femmes, au tournant de la quatre-vingtaine, ont traversé maintes épreuves ensemble.

Les deux femmes sont amoureuses.

Leur existence paisible, jusque-là sans histoires, sera chamboulée lorsque la petite fille de Dottie usera d’un stratagème pour forcer sa grand-mère à signer les papiers nécessaires à son admission dans une maison de retraite.

Acculée au pied du mur, les mains liées par la loi, Stella aidera Dottie à s’évader de sa nouvelle demeure et, ensemble, elles prendront la route dans leur vieux camion pour se rendre en Nouvelle-Écosse où elles pourront se marier légalement.

En chemin, elles prendront un autostoppeur, Prentice, jeune danseur qui désire retrouver sa mère malade dans son village natal.

Le trio disparate vivra plusieurs aventures au cours du voyage et sera, du même coup, transformé à jamais.

J’ai eu la chance d’assister récemment à une projection spéciale du film indépendant Cloudburst, du réalisateur Thom Fitzgerald, dont je viens de vous résumer le récit.

Gagnant de nombreux prix dans des festivals du monde entier, le film est présentement en tournée dans une poignée de villes canadiennes.  Il est passé par chez moi, à Peterborough, dernièrement, et continuera de se promener jusqu’en avril (malheureusement, aucune projection ne semble prévue au Québec).

Le film met en vedette les actrices oscarisées Olympia Dukakis dans le rôle de Stella et Brenda Fricker dans le rôle de Dottie.  Le nouveau venu, Ryan Doucette, interprète Prentice.

Dukakis et Fricker sont tout à fait resplendissantes.  On croit immédiatement à leur relation, à la sincérité de leurs sentiments.  Fricker fait ressortir la perspicacité et la bonté de Dottie, tandis que Dukakis est tout à fait majestueuse dans le rôle dur et déchiré de Stella.

Le film est une comédie ; parfois c’est caricatural, souvent c’est grossier, l’ensemble est jubilatoire.  On rit, on pleure, on tombe amoureux de ces deux femmes magnifiques et on en redemande.  Ce long-métrage est une célébration de la vie et de l’amour !

Cliquez ici pour accéder au site web et visionner la bande-annonce

Cette chronique fut écrite en écoutant le premier album des Sœurs Boulay, Le Poids des Confettis, en écoute intégrale sur Espace.mu jusqu’à sa sortie en magasins, le 26 mars.

Notice biographique

Jean-François Tremblay est un passionné de musique et de cinéma.  Il a fait ses études collégiales en Lettres, pour se diriger par la suite vers lesArts à l’université, premièrement en théâtre (en tant que comédien), et plus tard en cinéma.  Au cours de son Bac. en cinéma, Il découvre la photographie de plateau et le montage, deux occupations qui le passionnent.  Blogueur à ses heures, il devient en 2010 critique pour Sorstu.ca, un jeune et dynamique site web consacré à l’actualité musicale montréalaise.  Jean-François habite maintenant Peterborough.   Il tient une chronique bimensuelle au Chat Qui Louche.

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)

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