Nicolas Sarkozy est politiquement mort jeudi 22 mars 2013 un peu avant 22 heures trente. En ressortant du bureau du juge Gentil, après 8 heures d'audition tendue, muni d'une mise en examen pour abus de faiblesse à l'encontre de Liliane Bettencourt. Il s'est engouffré dans un jet privé pour quitter Bordeaux au plus vite.
Nous conserverons le souci de la présomption d'innocence le temps qu'il faudra. Mais il sera difficile ou impossible à l'ancien monarque de revenir séduire son électorat âgé avec ce soupçon d'avoir extorqué quelques fonds à une vieille dame milliardaire.
Assez rapidement, le journaliste Edwy Plenel s'est fendu d'un tweet victorieux - il a raison tant son site a contribué à la publication des différents volets de l'affaire - et commercial, un appel aux abonnements. Cette dernière démarche nous était vendue comme une sorte d'appel téléthonesque aux dons et aux soutiens du journalisme indépendant.
Il fut drôle et souvent inquiétant de lire, entendre et voir les anciens supporteurs de l'ancien Monarque venir à son soutien. Du "Je vous emmerde" glissé puis démenti par Patrick Balkany à l'outrance d'Henri Guaino qui exigeait du juge Gentil qu'il "s'exprime devant les Français", Christiane Taubira s'interpose. L'avalanche de cris et de pleurs fut aussi importante qu'influente. Pétitions, indignations, protestations. Les braillards étaient sortis, et ils braillaient d'autant plus fort qu'ils espéraient le retour politique de leur mentor.
Le récit de l'audition, qui dura 8 heures, fut éloquent. Sarkozy était en rage sourde, jusqu'à menacer le juge en fin de soirée. Pourtant, qui pouvait croire que Nicolas sarkozy serait in fine confronté à un procès ? Notre seul espoir était son relatif jeune âge.
Certains, surtout à gauche, avaient voulu comparer cette "Mediapartie" sarkofrançaise avec une autre dont l'un des épisodes se termina également cette semaine: l'affaire Cahuzac. Cet homme était encore ministre du Budget lundi dernier. Le lendemain, François Hollande le démissionna - reprenons cette faute de grammaire sur-utilisée toute la semaine. Dans la presse et ailleurs, il est condamné avant son procès et même sa mise en examen.
Le parquet de Paris venait d'ouvrir une instruction officielle pour blanchiment, accompagnée d'un communiqué de presse explicite contre le ministre, mais flou sur l'identité des témoins qui l'accusaient. Cahuzac ne pouvait que quitter le gouvernement, personne n'en contesta la conclusion. Personne, non plus, n'accusa le procureur, un ancien sarkozyste passé par le cabinet de Michèle Alliot-Marie, d'avoir su faire preuve d'indépendance. Tout le monde se réjouissait que deux juges réputés - Roger Le Loire et Renaud van Ruymbeke - furent nommés pour traiter l'affaire. Bref, tout allait presque dans le meilleur des mondes. Ou presque. A droite, la retenue fut de mise. A gauche, les socialistes exprimèrent leur solidarité. Plus à gauche, Mélenchon moqua le remplaçant de Cahuzac, Bernard Cazeneuve. Sur les réseaux sociaux, il ne fallait pas s'interroger sur la mission politique que le site d'information s'était donnée. Mediapart était canonisé Il ne fallait pas critiquer les Webocrates. Vous risquiez la mise à mort.
Plus grave que les pérégrinations judiciaires de deux anciens espoirs de la vie politique, l'île de Chypre fit parler d'elle. Elle s'était vue proposer un prêt européen d'une dizaine de milliards d'euros pour renflouer ses banques sous réserves que ces dernières prélèvent 6 milliards d'euros de taxe. Lundi, l'eurogroup proposait d'en exonérer les dépôts inférieurs à 20 ou 30.000 euros. Le Parlement local refusa la mesure, la BCE boycotte. On accuse à juste titre l'Union européenne d'avoir laissé la situation se dégrader, d'avoir insuffisamment tenu les banques. Mais en France, cette séquence suscita une certaine stupéfaction: la droite comme la gauche de la gauche dénonçait la spoliation. A lire ces commentaires, on oubliait que l'île était un paradis fiscal, noyauté par des fonds russes douteux; on faisait semblant de ne pas voir que l'autocrate Poutine voulait mettre la main sur le gaz récemment découvert.
En France, Michel Sapin a déçu. Le ministre du Travail a opposé une fin de recevoir aux organisations de chômeurs venues le rencontrer en urgence. Les agences de Pôle Emploi ont reçu en un mois une cinquantaine de menaces d'immolations. D'immolations ! Mais le ministre n'avait rien à dire sauf à proposer une autre rencontre... en juillet. Plus heureux, le plan logement - 20 mesures - est annoncé jeudi: subvention des travaux de rénovation énergétique, moratoire de deux ans sur l'instauration de nouvelles normes, lutte contre les recours abusifs contre les permis de construire, etc. On critique son insuffisance. Le gouvernement aurait promis des milliards qu'on aurait fustigé son irresponsabilité.
Au Mali, la guerre sera bientôt terminée, a promis Hollande. Un cinquième soldat français est mort, tout comme l'un des leaders des rebelles islamistes.
Sa compagne se montre au Grand Journal de CANAL+. Certains shows médiatiques ne s'arrêtent jamais.
Ami sarkozyste, tu es donc encore là.
Ami gauchiste, reste encore un peu.