Selon une étude menée sur des plantes dans un environnement simulant la microgravité, se reproduire dans l'espace ne serait pas une si bonne idée. Les conditions spatiales seraient capables de perturber les processus et les cellules nécessaires à la reproduction.
Si le sexe dans l'espace nourrit encore aujourd'hui de nombreux fantasmes, d'un point de vue pratique, ceci pourrait ne pas être une si bonne idée et ce, même pour les plantes ! C'est du moins ce que suggère une nouvelle étude menée par des chercheurs canadiens et publiée dans la revue PLOS One. En effet, au cours de plusieurs expériences, ces scientifiques ont observé la "sexualité" de plantes soumises à un environnement simulant différentes gravités.
Le but : observer les cellules végétales et leurs réponses face aux différents conditions. Pour cela, le professeur Anja Geitmann et ses collègues de l'Université de Montréal ont utilisé une centrifugeuse de 8 mètres appartenant à l'agence spatiale européenne (ESA) dans laquelle ils ont placé des tubes polliniques. Ces structures sont émises par des grains de pollen et servent à conduire les cellules mâles jusqu'à l'oeuf. Il s'agit ainsi de cellules qui grandissent à très grande vitesse. D'où le choix des scientifiques canadiens qui désiraient obtenir des réponses rapides.
Par ailleurs, les tubes polliniques sont de bons modèles pour étudier comment les transports intercellulaire fonctionnent car ceux-ci ne ressentent pas la gravité. Aussi, toute réponse observée ne peut être due qu'aux effets physiques de la force gravitationnelle, et non au fait que la cellule ait senti la gravité et ait changé son comportement en conséquences. En ce sens cette dernière fonctionne donc comme toute cellule simple dotée de noyau, et notamment comme les cellules animales.
Des cellules perturbées par la microgravité
Partis de là, les scientifiques ont donc soumis les tubes à différentes gravités allant d'une valeur quasi nulle à 20 fois celle présente sur Terre (1g). Ils ont également placé les tubes dans une machine qui a tourné les spécimens dans tous les sens à une vitesse particulière. Au cours des expériences, l'équipe a alors observé en temps réel les échantillons au microscope. Ceci leur a permis de constater que si le sens avait peu d'impact sur les tubes, la gravité en revanche en avait bien plus.
Les diamètres des tubes obtenus avec une microgravité simulée étaient 8% plus petits qu'avec la gravité 1g. Pour une gravité cinq fois supérieure à celle de la Terre, les tubes étaient 8% plus larges et pour une gravité 20 fois supérieure, 38% plus larges. Ajouté à cela, le rythme de croissance des tubes a chuté de 39% avec la microgravité simulée. Plus en profondeur, les chercheurs ont également constaté que la distribution de deux matériaux indispensables à la croissance, la cellulose et la callose, étaient grandement perturbés par l'hyper et la micro-gravité.
"Le trafic intercellulaire, qui se produit selon des processus très précisément définis dans ces cellules, était affecté", a confirmé à LiveScience Anja Geitmann dont les travaux sont publiés dans la revue PLOS One. Si les découvertes de cette équipe suggèrent que cultiver un jardin en orbite pourrait ne pas être si facile, elles conduisent nécessairement à se poser des questions sur la possibilité d'une reproduction humaine dans l'espace.
Des dommages semblables sur les cellules animales ?
"Comme durant la reproduction humaine, les gamètes mâles de plantes sont amenés à l'oeuf par des outils cylindriques. Mais contrairement à l'outil présent chez les animaux, celui utilisé par les plantes consiste en une cellule unique - et seulement deux cellules mâles sont apportés à chaque livraison", a commenté la biologiste. La reproduction animale n'est en effet pas assez similaire à celle des végétaux pour établir des conclusions précises.
Néanmoins, les chercheurs n'excluent pas que les cellules humaines puissent subir les mêmes dommages et ainsi perturber le développement d'un éventuel embryon. D'ailleurs, ces perturbations pourraient même ne pas apparaitre qu'au niveau sexuel. Comme l'ont souligné les scientifiques, nos neurones montrent également un transport intercellulaire qui est crucial pour leur bon fonctionnement.
En savoir plus avant de partir à l'aventure spatiale
Ce processus pourrait donc être comme les tubes polliniques, affecté par la microgravité, ce qui conduirait alors à l'apparition de maladies neuronales comme la maladie d'Alzheimer ou de Parkinson. D'après l'équipe d'Anja Geitmann, les effets de la microgravité pourraient peut-être jouer un rôle dans les déclins cognitifs observés chez certaines astronautes après des vols spatiaux.
Si ces observations restent à approfondir pour en savoir plus, ces découvertes témoignent une fois de plus des conséquences que peuvent avoir les conditions spatiales, microgravité mais aussi rayons cosmiques, sur les organismes vivants. Il faudra donc certainement attendre encore longtemps avant de pouvoir réaliser de très longs voyages spatiaux voire de coloniser une autre planète...