L'auto-édition est un procédé qui consiste pour l'auteur à prendre en charge le travail éditorial et la diffusion de son ouvrage. Un modèle viable sur le long terme ? Car pour le moment, elle ne permet pas d'en vivre.
A l'occasion du 33e Salon du Livre qui se tient du 20 au 25 mars 2013 à Paris, rencontre avec Jean-Claude Dunyach, l'un des premiers auteurs à s'être intéressé à l'auto-édition.
L'Atelier : L'auto-édition est-elle l'avenir des maisons d'édition ?
J.C. Dunyach : Pour avoir travaillé comme éditeur, certains manuscrits reçus nécessitent un gros travail éditorial, et l'inconvénient majeur de l'auto-édition provient du fait que n'importe qui peut publier n'importe quoi : extraits de blogs, correspondance... Tout est potentiellement publiable. Ma propre expérience diffère néanmoins de l'auto-édition traditionnelle. Etant informaticien de formation, je me suis servi de l'outil informatique non pas pour éditer de nouveaux livres mais pour rééditer des titres devenus indisponibles. Par ailleurs, la curiosité a aussi joué un rôle dans ce processus, car les outils, comme l'ouverture d'Amazon aux vendeurs de livres numériques, sont enfin apparus, mais personne ne les avaient expérimentés. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai bâti un tutoriel à destination d'autres auteurs qui souhaiteraient franchir le cap de l'auto-édition, et l'ai mis à disposition sur mon site Internet. Il fallait se documenter sur cette expérience.
L'Atelier : Pensez-vous qu'à terme, l'auto-édition pourrait être un modèle pouvant se substituer à l'édition traditionnelle ?
J.C. Dunyach : Oui et non. Il me semble que la place du fabriquant sera nécessairement moindre. Il va falloir différencier, comme dans le monde anglo-saxon, les notions d'editing et de publishing. Le modèle du travail éditorial, l'editing, sera conservé car c'est de cela que les auteurs ont vraiment besoin. Néanmoins la part publishing d'une maison d'édition, ce qui touche à l'imprimerie et la diffusion d'un texte, sont amenés à se transformer. Pour bon nombre de personnes, l'auto-édition est plus abordable car les gens peuvent le faire depuis chez eux. Et il ne faut pas oublier que, pour l'instant, même s'il y a eu quelques titres qui fonctionnent bien, l'auto-édition ne permet pas d'en vivre. L'un des avantages majeurs, qui m'ont mené vers l'auto-réédition comme je le disais tout à l'heure, est de ne pas subir l'indisponibilité d'un titre. Il n'y a pas de rupture de stock.
L'Atelier : Voilà pour les avantages. Mais quels sont les inconvénients de l'auto-édition ?
J.C. Dunyach : Le défaut majeur vient du fait que n'importe qui peut publier. Si jusqu'ici on était en situation pléthorique quant au nombre de livres, ce facteur est en train d'être démultiplié par l'auto-édition. Le lecteur ne dispose d'aucun outil, comme le serait un travail éditorial, qui permettrait d'affirmer ce qui est lisible et ce qui ne l'est pas. Le public qui voudra un livre ne saura pas comment choisir parmi les innombrables choix, ce qui est un réel problème.
Le point de vue de l'éditeur : Maud Simonnot, directrice de collection chez Gallimard
Pour moi, l'auto-édition est une chance pour des milliers de personnes de pouvoir imprimer des textes (souvenirs familiaux, poèmes) qu'ils souhaitent diffuser par exemple à leurs proches. En revanche, il s'agit souvent d'une escroquerie lorsque les gens qui la promeuvent font croire à des écrivains en herbe qu'ils auront avec ce système un vrai livre comme s'ils le publiaient dans une maison d'édition classique. L'ouvrage ne bénéficie du soutien d'aucune distribution ou diffusion s'il est imprimé, et l'auteur se retrouve avec des ventes minuscules. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un péril pour l'édition traditionnelle pour ces raisons. Cela reste un phénomène encore marginal. Il faudrait une réglementation pour les gens qui ne comprennent pas ce que c'est afin d'éviter, entre autres, les arnaques et les faux agents qui écument Internet.