L'affiche de Microclimat, signée Fabrice Pellé (créateur, entre autres, des affiches du fameux Festival européen du film court de Brest), peut surprendre ou à tout le moins intriguer. "C'était le but recherché", soulignait, hier, Olivier Bourbeillon, le producteur ; "à l'heure où la grande majorité des films français ne proposent plus comme affiche qu'un collage des photos de vedettes qui y tournent, nous avons fait le pari de l'originalité". Et il est vrai que l'affiche donne le ton, car Microclimat s'apparente à un petit ovni au sein de la production cinématographique actuelle française.
Un dimanche en famille, comme nous en connaissons tous. Les belles nappes, l'argenterie et la porcelaine de Limoges sont de sortie tandis que papa débouche les bons crus à la cave. Chez les Lucas, ce dimanche n'est pas tout à fait comme les autres puisqu'on y célèbre les 20 ans de Juliette. Toute la famille se presse dans la petite maison bretonne : le papy marin-pêcheur, la marraine un rien déjantée, la soeurette (troublante Muriel Riou) venue de Paris avec son nouveau beau originaire de Nevers, qui souffre de ce que la réalisatrice qualifie, par dérision, de "complexe de Nevers", "le complexe des provinciaux montés à Paris et qui deviennent parfois plus Parisiens que les Parisiens et qui cherchent par dessus tout à faire oublier leurs origines provinciales" (*)... Un incident extérieur viendra faire éclater ce huis clos familial rendu parfois pesant par la présence du Monsieur Je-sais-tout. Au dehors, au pied même de la maison des Lucas, un couple se déchire. Jusqu'à la fin du film, les deux histoires n'auront de cesse de se court-circuiter mutuellement, pour notre plus grand bonheur...
les non-dits
Tourné à Douarnenez (ville natale de la réalisatrice) en seulement seize jours (contre sept semaines en moyenne), Microclimat ne manque pas d'humour et réunit un groupe d'acteurs qu'on sent totalement imprégnés de leur rôle. Mais derrière les éclats de rire se tisse une trame beaucoup plus subtile : peu à peu, le spectateur découvre les non-dits, comprend le traumatisme laissé par la mort de Nicolas, frère aîné de Juliette, qui aurait eu 23 ans. Bob (superbe Jean-Paul Bathany), n'a pas encore fait son deuil et refuse l'évocation de son fils. Est-ce pour protéger son épouse éplorée (également sublime Françoise Le Treut) ou par refus d'affronter l'absence du fiston ? La réunion de famille, qui servira de catalyseur, aura un effet libérateur sur l'ensemble des protagonistes.
Marie Hélia, qui s'était précédemment illustrée par son court-métrage "Les Princesses de la Piste", où Muriel Riou et Jean-Paul Bathany avaient déjà livré une esquisse de leur immense talent, récidive ici avec beaucoup d'intelligence. Les personnages paraissent plus vrais que nature, le scénario est dans la veine d'un Bacri-Jaoui du meilleur cru, et le montage rythmé et astucieux est particulièrement mis en relief par la musique impressionniste du compositeur japonais Susumu Yokota. Un "petit" film (petit par le budget uniquement, entendons nous bien !) qui laisse plutôt bien augurer de l'avenir de la production cinématographique en Bretagne.
(*) Marie Hélia oppose au complexe de Nevers celui "de Quimper", "dont souffriraient ceux qui, en Bretagne, ont toujours besoin d'obtenir l'assentiment des gens de la capitale avant de reconnaître que ce qui se fait en Bretagne est de qualité".
La bande annonce de Microclimat :
Tous les détails sur l'actualité du film :
Microclimat
Ce soir, à Tulle (Le Palace), séance à 21h, également en présence de la réalisatrice Marie Hélia. Et à Paris, à l'espace Saint-Michel et au Lucernaire. Rejoignez le cortège des spectateurs en encourageant une production indépendante qui mérite le détour !