Embarrassée, je rentre dans la pièce, je balaie rapidement l’endroit du regard et repère tout de suite plusieurs chaises vides.
La réunion est commencée depuis un petit moment déjà, je suis en retard, je me fais donc toute petite.
Je m’installe discrètement, je sors mes feuilles, mon stylo et me concentre pour prendre le fil de la discussion.
Il y a plusieurs membres de structures culturelles. L’ordre du jour est le suivant : l’utilisation d’outils concernant la diffusion de notre programmation de spectacles. Je pense assister à une réunion de travail sans avoir à parler.
Faux.
Un tour de table vient juste d’être entamé et chacun d’entre nous est invité à se présenter, à parler de la structure et de nos outils respectifs. Han, mais MERDE!!!!! zut, je m’étais pas préparée à ça. Je voulais écouter placidement, noter les éléments intéressants, en faire un compte rendu à mes responsables et puis c’est tout. Bon, bah j’ai plus qu’à réfléchir à ce que je vais dire…j’ai un…deux…8…15 personnes avant moi, ça me laisse du temps.
Ou pas.
Je réfléchis, je me dis qu’il me suffit juste de me concentrer sur ce que je vais dire, que je me prépare et puis cela ne durera que quelques instants…voilà…hein. Pendant que j’essaie de me rassurer (et toi même tu sais que j’ai HORREUR de parler en public), je commence à ressentir une sensation de gêne, une douleur qui grandit. Eh bah voilà ça y est j’ai mal aux dents. D’un seul côté en plus.
Ça ne m’étonne pas plus que ça parce que cela m’est déjà arrivée lorsque je suis vraiment très préoccupée par une situation et dans le meilleur des cas j’ai une petite douleur qui dure quelques heures, d’autres fois, ça dure plus longtemps. C’est un dentiste qui m’avait expliquée ce lien de cause à effet. A l’époque, j’étais à quelques semaines de la présentation de mon mémoire d’études de maîtrise et j’avais subitement eu une rage de dents, j’arrivais à peine à manger et à parler (le comble pour une bavarde comme moi). Je me souviens d’une douleur terrible. J’avais pris rendez-vous en urgences avec le dentiste. Après avoir fait des radios, il me confirma que mes dents de sagesse avaient largement la place pour pousser. Puis il s’était fait psychologue, il m’avait demandée si j’étais stressée, lui rapportant mon histoire de mémoire, il m’avait dit en riant qu’il fallait que j’apprenne à me détendre parce que manifestement mes douleurs très vives aux dents étaient proportionnelles à mon anxiété.
Donc voilà, je somatise. C’est pas nouveau, mais maintenant j’essaie vraiment de comprendre ce qu’il se passe
Bon et alors comment ça s’est passé ? Bah, j’ai commencé à parler, j’ai buté sur mes premiers mots, j’ai fait une boutade, passée complètement inaperçue (personne n’a rit quoi). Puis j’ai repris confiance, je me sentais bien, j’ai déroulé mon petit discours calmement et parfois les gens ont rit quand je parlais (mais là j’ai vraiment pas compris pourquoi). J’y aurais pas passé des heures (je continuais à sentir mon coeur qui battait la chamade et la vague de chaleur sous mes aisselles), mais le moment est devenu presque agréable et j’ai fini par apprécier la sensation d’être écoutée. Y a de l’amélioration, je suis contente.
La douleur aux dents ? Plus très vive juste après mon intervention, elle a fini par disparaître rapidement.