Pas facile pour Georges Rémi Junior d’exister quand on est soi -même dessinateur, entre un père, peintre équestre de talent et un oncle qui n’entend laisser personne lui faire de l’ombre.
Hergé avait un frère cadet, Paul (1912-1986), militaire de carrière et résistant belge. Cet homme, respecté et très droit, a même dirigé une section militaire belge au Congo. Il a donné un prénom, lourd à porter, à son fils Georges Rémi Jr, le même que son oncle et parrain.
Dans ce livre, l’auteur raconte les relations difficiles qu’il a pu entretenir avec ce génie. D’ailleurs, le plus intéressant dans cette biographie, c’est que Georges Jr nous dévoile des extraits de correspondance entre Hergé et sa première femme Germaine. Des relations épistolaires fortes, surtout quand le père de Tintin, décide de quitter sa femme pour Fanny, sa seconde épouse.
« Georges m’a fait l’aveu d’aimer Fanny et Fanny l’aime ! Je m’y attendais. [...] Au moment même, cela m’a laissée froide et je me détache de lui encore davantage. » Il y a dans ces lettres beaucoup d’amertume, de résiliation, de nostalgie. Germaine en veut beaucoup à Hergé, à Fanny mais aussi à Alain Barran (secrétaire d’Hergé) ou encore à Nick Rodwell (second mari de Fanny et gestionnaire souvent malhabile de l’œuvre d’Hergé). Elle estime qu’elle a été délaissée et pourtant Tintin » [...] c’était notre histoire à nous deux. J’en ai partagé la genèse, les péripéties et les succès, mais aussi les moments difficiles. » Elle souligne avec force : « Des années de lutte, de désespoir, pour arriver à quoi : être seule … vaillante sans doute… Quelle dure leçon de vie. »
Dans ce livre, nous découvrons aussi un Hergé susceptible et rigide (souvent avec les collaborateurs de son studio ainsi qu’ avec son neveu) mais aussi un Hergé affectueux avec son frère. Paul, pourtant militaire et plutôt rigide dans son approche avec les autres; pouvait être décontracté avec son frère ainé, blaguant facilement et aimant la bonne chair. Tous les deux avaient un humour très particulier, teinté d’auto-dérision.
Quant aux relations entre les deux Georges, elles sont orageuses, distantes. Pourtant Hergé accueille son filleul dans son studio mais rapidement ce dernier le quitte car il n’est pas trop en phase avec le style ligne claire. De plus l’ambiance ne lui plait pas. Junior prendra ses distances lorsque son oncle dira sans ménagement ce qu’il pense de ses œuvres, trop primaires et trop photographiques à son goût.
Dans ce livre, Georges Rémi Jr, se définirait comme le seul garant moral de l’œuvre de son oncle, par opposition à Nick Rodwell et Fanny, qui seraient eux plus mercantiles dans leur approche. Une vie délicate, toujours en réaction face à son oncle ou ses légataires universels par la suite.
- Un oncle nommé Hergé
- Auteur : Georges Rémi Junior
- Editeur: l’Archipel
- Sortie: 6 février 2013