Si l’on en croit la préface de
Marco Caporali, David Mus est un poète qui chemine (“per David camminare è una
passione non solo letteraria ») et, en effet, il est question ici de
mouvement (d’un sentier à suivre) et
des limites auxquelles il se heurte : celles du jour et de la nuit,
omniprésentes, et celles qu’offre sans cesse le paysage, particulièrement murs
et ornières, les deux étant étroitement mêlées :
Et l’affrontement des murs, disons le jour
à affronter, nuit et jour.
Soit un poème tout autant écrit avec les pieds (et avec, bien sûr, ceux,
homonymes, des vers, le plus souvent distribués en distiques et dont la coupe (1)
évoque inévitablement les multiples tournants) qu’avec la tête, au fil d’une
longue promenade attentive à travers la « propre profusion » de
chaque jour, revenant sur les mêmes lieux, les mêmes mots, creusant à pas
comptés (c’est-à-dire à la syllabe près) son chemin singulier dans la langue,
faisant preuve d’une gravité qui n’exclut pas, parfois, un humour
discret :
Le port des pieds nous pèse comme
à l’autre
le port d’armes, d’ailes, de soleil
sur la tête.
Trajet effectué pour l’occasion dans l’entre-deux des langues disposées face à
face puisqu’une page est la traduction décalée de l’autre :
Cette face française du jour sert
Questo volto italiano del giorno
d’objectif serve da lente
et ce jusqu’au dépassement prévisible par les événements, comme on dit, qui ne
manqueront pas, eux, de suivre leur cours après la disparition pas seulement
élocutoire du poète-piéton :
(À vendre, demeure appelée jour,
sise au premier plan,
selon l’annonce, et tu seras mis
de suite à la porte.)
[Bruno Fern]
1.La tourne, comme
l’écrivait Jacques Réda, autre poète-marcheur.
David Mus, Pagine di giorni senza esito, Choix de jours sans suite Editions Empirìa
www.empiria.com
février 2013, 36 pages, 7 €